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14/04/2022 | FRANCE | N°21LY04242

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 14 avril 2022, 21LY04242


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2021 par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa remise aux autorités suisses.

Par un jugement n° 2107180 du 7 décembre 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a, dans un article 2, rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Djinderedjian, demande à la cour :
r>1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2021 susvisé ;

3°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2021 par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa remise aux autorités suisses.

Par un jugement n° 2107180 du 7 décembre 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a, dans un article 2, rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Djinderedjian, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2021 susvisé ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros, à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement n°604/2013 du 26 juin 2013.

Par un mémoire en défense, enregistrée le 26 janvier 2022, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n°603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant érythréen, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 5 septembre 2019 et y a déposé une demande d'asile. Il relève appel du jugement par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 octobre 2021 du préfet du Rhône ordonnant sa remise aux autorités suisses, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

2. Aux termes du 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Aux termes de l'article 17 du même règlement : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'Etat membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'Etat membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". L'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, désormais repris aux articles L. 571-1 et 573-1, rappelle le droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat. Il résulte de ces dispositions que la faculté laissée à chaque Etat membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement précité, est discrétionnaire et ne constitue pas un droit pour les demandeurs d'asile. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

3. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. D'une part, M. B... n'apporte aucun élément de nature à établir l'existence avérée de défaillances systémiques dans la procédure d'asile et dans les conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Suisse, pays qui a donné son accord explicite à sa réadmission le 20 septembre 2021. Aucun élément versé au dossier ne permet de considérer que les autorités suisses ne sont pas en mesure d'examiner ou de réexaminer sa demande d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile et que M. B... encourrait en Suisse un risque réel d'être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, alors que la Confédération Suisse est partie à la convention de Genève du 28 juillet 1951. La décision de transfert contestée ne méconnaît donc pas les dispositions précitées du 2 de l'article 3 du règlement (UE) du 26 juin 2013.

5. D'autre part, en l'espèce, M. B... se borne à produire un courrier du 7 juin 2019 des autorités suisses mentionnant que le tribunal administratif fédéral envisage, à la suite de sa demande de protection internationale, un retour dans son pays et lui rappelle qu'il a la possibilité de présenter des observations pour faire obstacle à cette mesure. M. B..., qui n'a volontairement pas usé de cette faculté, ne produit aucun élément justifiant du rejet définitif de sa demande d'asile en Suisse, ni ne démontre qu'un éventuel réexamen de celle-ci serait impossible au regard des nouveaux éléments qu'il pourrait faire valoir. Il ne démontre pas davantage faire l'objet d'une décision d'éloignement de ce pays devenue définitive. Par suite, compte tenu de ces éléments et de ce qui a été précisé au point 2, les moyens tirés de ce que la décision litigieuse serait contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ne peuvent qu'être écartés.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles de son conseil tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2022, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 avril 2022.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

C. Langlet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N°21LY04242

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY04242
Date de la décision : 14/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : DJINDEREDJIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-04-14;21ly04242 ?
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