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14/04/2022 | FRANCE | N°21LY01081

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 14 avril 2022, 21LY01081


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- d'annuler, en tant qu'elle ne prévoit pas un effet rétroactif, la délibération du 26 juin 2017 par laquelle le conseil d'administration de l'Institut national de police scientifique (INPS) a décidé d'accorder, à compter du 1er juillet 2017, à l'ensemble des fonctionnaires administratifs et techniques en fonction au service central des laboratoires de l'institut, le régime indemnitaire applicable en administration centrale au ministère de

l'intérieur, ainsi que la décision implicite de rejet de sa demande du 26 juill...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- d'annuler, en tant qu'elle ne prévoit pas un effet rétroactif, la délibération du 26 juin 2017 par laquelle le conseil d'administration de l'Institut national de police scientifique (INPS) a décidé d'accorder, à compter du 1er juillet 2017, à l'ensemble des fonctionnaires administratifs et techniques en fonction au service central des laboratoires de l'institut, le régime indemnitaire applicable en administration centrale au ministère de l'intérieur, ainsi que la décision implicite de rejet de sa demande du 26 juillet 2017, adressée au directeur général de la police nationale et tendant au versement des sommes dont elle estime avoir été illégalement privée ;

- de condamner solidairement l'Etat et l'INPS à lui verser, à titre principal, la somme à parfaire de 51 174,52 euros, en réparation des préjudices qu'elle a subis, ou, subsidiairement, la différence entre le montant des primes qu'elle a perçues et le montant des primes qu'elle aurait dû percevoir, outre intérêts et capitalisation.

Par un jugement nos 1708468-1803123 du 3 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 7 avril 2021, présentée pour Mme A..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement nos 1708468-1803123 du 3 février 2021 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 51 174,52 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi, somme à parfaire, ou, à titre subsidiaire, à lui verser la différence entre la prime perçue et la prime qu'elle aurait dû percevoir en application du barème applicable aux agents affectés en administration centrale, outre intérêts de droit avec capitalisation annuelle, à compter de la date de réception de la demande préalable ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en raison d'une motivation insuffisante dès lors qu'il n'a pas été répondu à l'ensemble des moyens soulevés ;

- le régime indemnitaire qui lui a été appliqué jusqu'à la délibération du conseil d'administration de l'INPS du 27 juin 2017 est illégal compte tenu de la méconnaissance du principe d'égalité résultant de l'application d'un régime indemnitaire différencié en fonction de la date d'affectation de l'agent au sein du service central des laboratoires, au demeurant pris sans délibération des organes compétents de l'établissement public ; l'administration ne peut se prévaloir de l'illégalité du régime dont bénéficiaient les agents affectés antérieurement avant le 1er janvier 2008 pour contester cette rupture d'égalité ; contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la différence de régime indemnitaire ne peut être justifiée par des différences inhérentes aux fonctions confiées aux administrations centrales, eu égard aux spécificités propres à l'INPS tant en ce qui concerne la nature du lien fonctionnel entre l'établissement public et son autorité de tutelle que les fonctions d'administration centrale dévolues à cet établissement public ; cette différence de traitement est disproportionnée ;

- la délibération du conseil d'administration de l'INPS du 27 juin 2017 est illégale en tant qu'elle prévoit l'attribution des régimes indemnitaires applicables en administration centrale à l'ensemble des agents du service central des laboratoires de l'INPS de façon non-rétroactive, dès lors que, compte tenu de l'illégalité du régime indemnitaire appliqué aux agents entrés en fonction après le 1er janvier 2008, l'INPS était tenu de prendre toutes les dispositions nécessaires pour réparer cette illégalité, non seulement y mettre un terme pour l'avenir mais également en effacer les conséquences préjudiciables pour le passé ;

- elle a subi un préjudice financier d'un montant de 47 174,52 euros, au titre de la période du 1er septembre 2009 à juin 2017, et un préjudice moral qui doit être réparé par une indemnité de 4 000 euros.

Un mémoire présenté par le ministre de l'intérieur, enregistré après la clôture de l'instruction, n'a pas été communiqué.

La requête a été communiquée à l'INPS qui n'a pas produit d'observations.

Par ordonnance du 21 octobre 2021 la clôture de l'instruction a été fixée au 30 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 ;

- le décret n° 85-1057 du 2 octobre 1985 ;

- le décret n° 92-604 du 1er juillet 1992 ;

- le décret n° 2004-1211 du 9 novembre 2004 ;

- le décret n° 2008-1533 du 22 décembre 2008 ;

- le décret n° 2013-728 du 12 août 2013 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- le décret n° 2015-510 du 7 mai 2015 ;

- l'arrêté du 22 décembre 2008 fixant les montants de référence de la prime de fonctions et de résultats ;

- l'arrêté du 3 juin 2015 pris pour l'application au corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Seillet, président assesseur ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me Alberto, pour Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., attachée d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer du ministère de l'intérieur, affectée à compter du 1er septembre 2009 au service central des laboratoire de l'INPS, établissement public de l'Etat, a bénéficié, depuis cette affectation et jusqu'au 1er juillet 2017, du régime indemnitaire des fonctionnaires du ministère de l'intérieur affectés dans les services déconcentrés, conformément à une décision du 20 septembre 2007 du directeur de l'administration de la police nationale selon laquelle seuls les agents de cet institut y étant déjà affectés à la date du 1er janvier 2008 pouvaient conserver le régime indemnitaire mis en place dans les services de l'administration centrale. Mme A... a contesté, par une lettre du 26 juillet 2017 adressée au directeur général de la police nationale, la délibération du 26 juin 2017 par laquelle le conseil d'administration de l'INPS a décidé d'accorder à l'ensemble des fonctionnaires administratifs et techniques en fonction au service central des laboratoires de l'institut le régime indemnitaire applicable en administration centrale au ministère de l'intérieur, à compter du 1er juillet 2017, en tant qu'elle ne comportait aucun effet rétroactif et elle a sollicité, par cette même lettre, le versement des montants de prime dont elle estimait avoir été indûment privée depuis sa prise de poste. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant aux mêmes fins.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 413-1 du code de la sécurité intérieure alors en vigueur : " L'Institut national de police scientifique est un établissement public placé sous la tutelle du ministre de l'intérieur. / L'Institut national de police scientifique a pour mission de réaliser tous les examens, recherches et analyses d'ordre scientifique et technique qui lui sont demandés par les autorités judiciaires ou les services de police et de gendarmerie aux fins de constatation des infractions pénales et d'identification de leurs auteurs. Il développe et promeut, au plan national et international, les techniques et les procédés mis en œuvre à cette fin ". Cet établissement public, créé par l'article 58 de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 susvisée relative à la sécurité quotidienne, ne relève pas des dispositions de l'article 1er du décret n° 85-1057 du 2 octobre 1985 susvisé reprises à l'article 1er du décret n° 2013-728 du 12 août 2013 également susvisé portant organisation de l'administration centrale du ministère de l'intérieur et du ministère de l'outre-mer, qui dressent la liste des structures que comprend l'administration centrale du ministère de l'intérieur. L'INPS ne peut être regardé, dès lors, nonobstant son organisation, ses missions et ses liens avec la direction générale de la police nationale, comme une administration centrale pour l'application des dispositions réglementaires fixant le régime indemnitaire des fonctionnaires de l'Etat, tels l'arrêté du 22 décembre 2008 fixant les montants de référence de la prime de fonctions et de résultats ou l'arrêté du 16 décembre 2015 pris pour l'application au corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat, lorsqu'ils opèrent une distinction entre les fonctionnaires affectés, d'une part, en administration centrale et, d'autre part, dans un service déconcentré, un établissement public ou un service à compétence nationale ou, entre ceux affectés, d'une part, en " administration centrale, établissements et services assimilés " et, d'autre part, dans les " services déconcentrés, établissements et services assimilés ". La circonstance que des services d'inspection ont relevé, au demeurant comme une anomalie, l'insuffisante autonomie des organes dirigeants de cet établissement public n'a pas eu pour incidence de modifier le statut de l'établissement ni, par voie de conséquence, celui des agents qui y sont affectés et le régime indemnitaire auquel ils sont soumis à raison de leur affectation. Par suite, la requérante n'est pas fondée à se prévaloir de sa qualité de fonctionnaire affecté dans une administration centrale pour revendiquer le bénéfice du régime indemnitaire fixé par ces textes pour les agents affectés dans une telle administration. Si Mme A..., en ce qu'elle affirme que tous les textes réglementaires prévoyant une différence de traitement avec l'administration centrale sont entachés d'illégalité, doit être regardée comme ayant entendu soulever un moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces textes, en tant qu'ils instituent une telle distinction, un tel moyen, en ce qu'il se borne à contester le principe d'une telle distinction, eu égard aux caractéristiques de l'INPS, est dépourvu des précisions suffisantes pour en établir le bien-fondé.

3. En second lieu, s'il résulte de l'instruction que l'INPS a continué à verser aux agents affectés avant le 1er janvier 2008 au sein du service central des laboratoires une indemnité calculée selon les modalités prévues pour les fonctionnaires affectés en administration centrale alors qu'ils ne remplissaient pas les conditions leur permettant d'en bénéficier, cette pratique, qui équivaut à la création illégale d'une indemnité n'ayant été instituée par aucun texte législatif ou réglementaire au profit des agents auxquels elle a été versée, ne saurait ouvrir droit aux agents qui n'en bénéficient pas de réclamer l'extension de cet avantage sur le fondement du principe d'égalité, même s'ils sont dans une situation analogue. Dès lors que l'administration, qui ne pouvait légalement créer, tant par la décision du 20 septembre 2007 du directeur de l'administration de la police nationale que par la délibération du conseil d'administration de l'INPS du 26 juin 2017, un cadre servant de fondement à une décision d'accorder aux fonctionnaires affectés dans cet établissement public un avantage, réservé aux agents exerçant en administration centrale, auquel ils ne pouvaient prétendre, était tenue de rejeter la demande dont Mme A... l'avait saisie, le moyen tiré de ce que le principe d'égalité aurait imposé le versement d'une telle indemnité doit être écarté comme inopérant.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme A..., qui ne peut utilement se prévaloir d'une rupture d'égalité tant avec les agents affectés en administration centrale qu'avec les agents affectés au service central des laboratoires de l'INPS avant le 1er janvier 2008, ni, par suite invoquer une illégalité fautive résultant du refus de lui permettre de bénéficier du même régime, à compter de son affectation ou d'une manière rétroactive à compter de la délibération du conseil d'administration de l'INPS du 26 juin 2017, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme au titre des frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2022 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 avril 2022.

Le rapporteur,

Ph. SeilletLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

A.C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

1

2

N° 21LY01081

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01081
Date de la décision : 14/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : CABINET ALTERNATIVES AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-04-14;21ly01081 ?
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