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07/04/2022 | FRANCE | N°20LY03820

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 07 avril 2022, 20LY03820


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2020 par lequel le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation.

Par jugement n° 2005064 lu le 28 septembre 2020, la magistrate désignée par la présidente du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par

requête enregistrée le 24 décembre 2020, présentée pour M. A..., il est demandé à la cour :

1°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2020 par lequel le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation.

Par jugement n° 2005064 lu le 28 septembre 2020, la magistrate désignée par la présidente du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 24 décembre 2020, présentée pour M. A..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté du 16 juillet 2020 ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire méconnaît le 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui fait obstacle à l'éloignement des mineurs en ce que les éléments dont se prévaut le préfet ne sont pas de nature à combattre la présomption de validité des actes d'état civil de l'article 47 du code civil ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône, qui n'a pas produit d'observations.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 25 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Seillet, président assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen qui déclare être né le 10 juin 2003 à Conakry (Guinée Conakry), est entré irrégulièrement sur le territoire français en juin 2018 selon ses déclarations et a bénéficié d'une prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du conseil départemental du Gard puis du conseil départemental du Rhône. Par un arrêté du 16 juillet 2020, le préfet du Rhône a pris à l'encontre de M. A... une décision d'obligation de quitter le territoire français, au motif de son entrée et de son maintien irréguliers et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

2. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une l'obligation de quitter le territoire français : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans (...) ".

3. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. A..., dépourvu de tout document d'identité et de voyage, est entré irrégulièrement en France et n'est pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Il entrait ainsi dans le cas prévu par les dispositions alors codifiées au 1° de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet pouvait lui faire obligation de quitter le territoire français.

4. D'autre part, aux termes de l'article 388 du code civil : " Le mineur est l'individu (...) qui n'a point encore l'âge de dix-huit ans accomplis. / Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l'âge, en l'absence de documents d'identité valables et lorsque l'âge allégué n'est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l'autorité judiciaire et après recueil de l'accord de l'intéressé. / Les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d'erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l'intéressé est mineur. Le doute profite à l'intéressé (...) ".

5. L'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit, en son premier alinéa, que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. Cet article dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

6. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

7. M. A..., qui déclare être né le 10 juin 2003 et a été placé, ainsi qu'il a été dit au point 1, en tant que mineur étranger isolé, auprès du service de l'aide sociale du département du Rhône, invoque sa minorité à la date de la décision d'obligation de quitter le territoire français en litige et la méconnaissance des dispositions précitées du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a produit notamment un jugement supplétif du tribunal de première instance de Conakry 2 du 14 janvier 2019 ainsi qu'un extrait du registre de l'état-civil de la commune de Ratoma Conakry du 28 janvier 2019 portant transcription du jugement supplétif. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'analyse documentaire réalisée par les services de la police aux frontières le 29 juin 2020 a conclu à la falsification du jugement supplétif sur la base duquel avait été délivré l'extrait du registre d'état-civil, alors que l'examen réalisé par le service de médecine légale des Hospices civils de Lyon, le 7 juillet 2020, avait conclu, à partir d'examens radiographiques du poignet gauche et des clavicules et d'un odontogramme, que l'âge allégué par ce dernier était incompatible avec les éléments constatés, l'âge moyen de la personne examinée étant de vingt-deux ans, avec une marge d'erreur de 1,8 déviation standard. M. A..., seul en mesure de le faire, n'a, en particulier, pas produit de document d'identité ou de voyage comportant de photographie de nature à établir son identité ni, par suite, que les actes d'état-civil produits, à les supposer même authentiques, le concernent. Dès lors, même s'il fait valoir que les mêmes actes d'état-civil ont fait l'objet d'une double légalisation des autorités guinéennes en France, constatée par les services de la police aux frontières le 30 novembre 2020, et que, par un jugement du 11 décembre 2020, le juge des tutelles a rejeté une demande de mainlevée de sa tutelle, et alors même que les examens pratiqué par le service de médecine légale des Hospices civils de Lyon n'auraient pas été pratiqués dans des conditions régulières et comporteraient une marge d'erreur, M. A..., dont l'identité n'est au demeurant pas justifiée, n'établit pas qu'il était mineur à la date de la décision qu'il conteste, et il ne peut se prévaloir des dispositions du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la légalité de la fixation du pays de renvoi :

8. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français prise par le préfet du Rhône au soutien de ses conclusions dirigées contre la fixation du pays de renvoi.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 16 juillet 2020 portant obligation de quitter le territoire dans les quatre-vingt-dix jours et fixation du pays de destination.

10. Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 par M. A..., partie perdante, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2022 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président-assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 avril 2022.

Le rapporteur,

Ph. SeilletLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY03820

al


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03820
Date de la décision : 07/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : SAIDI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-04-07;20ly03820 ?
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