Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2013, ainsi que des majorations correspondantes.
Par un jugement n° 1800913 du 31 octobre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 13 février 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de remettre à la charge de B... la somme de 2 244 euros dont elle a été déchargée en application du jugement attaqué.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a considéré que la distribution avait été opérée en 2012, en retenant l'année de réalisation de la prestation effectuée par la société Fidal, alors que l'année du fait générateur de l'imposition des revenus distribués par la SAS Groupe Brachet était l'année 2013 ;
- il reprend son argumentation de première instance concernant les moyens examinés au titre de l'effet dévolutif.
Par un mémoire enregistré le 20 décembre 2021, Mme B..., représentée par Me Brisson conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a bénéficié de l'opération de conversion dès la conclusion de la convention constatant cette opération sans qu'il y ait lieu de tenir compte de la date du paiement de la prestation juridique ; ainsi, elle a disposé de cet avantage au cours de l'année 2012 ; subsidiairement, la société a pris en charge les honoraires litigieux au cours de l'année 2012 ;
- subsidiairement, l'administration qui ne rapporte pas la preuve de l'appréhension des distributions par leurs bénéficiaires aurait dû mettre en œuvre la procédure prévue par l'article 117 du code général des impôts.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Evrard, présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme Vinet, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS Groupe Brachet, dont Mme B... est associée, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2011 au 30 juin 2013 à l'issue de laquelle l'administration a constaté que cette société avait déduit de son résultat de l'exercice clos en 2013 des honoraires, d'un montant de 53 916 euros, rémunérant une étude relative à l'opération de conservation des actions détenues en usufruit par ses associés en actions détenues en pleine propriété. L'administration a procédé à la réintégration de ces frais dans les bénéfices sociaux pour le motif que la société ne devait pas supporter une charge afférente à une opération effectuée, à titre personnel, par les associés, et imposé en conséquence entre les mains de Mme B..., en tant que revenus distribués sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, le montant de ces frais à due concurrence du nombre d'actions qu'elle a obtenues à l'issue de l'opération de conversion des actions. Par un jugement du 31 octobre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a déchargé Mme B... des compléments d'impôt sur le revenu et de prélèvement sociaux auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2013, ainsi que des majorations correspondantes. Le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour d'annuler ce jugement.
2. Aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année. ".
3. Aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ". Ces revenus sont présumés distribués à la date de clôture de l'exercice au terme duquel leur existence a été constatée, sauf si le contribuable ou l'administration apportent des éléments de nature à établir que la distribution a été, en fait, soit postérieure, soit antérieure à cette date. A cet égard, la seule circonstance que le contribuable soit le maître de l'affaire n'est pas de nature à apporter une telle preuve.
4. Il résulte de l'instruction que, le 30 octobre 2012, les associés de la SAS Groupe Brachet ont décidé de convertir leurs actions détenues en usufruit en actions de pleine propriété. Pour permettre la réalisation de cette opération, la société a supporté des frais d'un montant de 53 916 euros, correspondant à des prestations juridiques qui lui ont été facturées par la société Fidal le 31 décembre 2012 et dont la société a assuré le paiement le 10 avril 2013. L'administration a estimé que ces frais n'incombaient pas à la société mais à ses associés, et qu'à l'instar des autres associés, Mme B... qui était partie prenante à l'opération de conversion des actions avait tiré bénéfice des dépenses litigieuses à la date à laquelle elles ont été effectivement réglées, soit le 10 avril 2013. En conséquence, elle a imposé ces revenus réputés distribués entre les mains de Mme B... au titre de l'année 2013. Toutefois, il résulte des éléments produits par l'intimée, et notamment de l'acte de conversion des titres détenus en usufruit par les associés de la société, établi le 30 novembre 2012, que la conversion des titres a été opérée à compter de cette date. Dans ces conditions, les éléments produits par Mme B... sont de nature à établir que la distribution dont elle a bénéficié a été réalisée en 2012 et non en 2013.
5. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a déchargé Mme B... des compléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2013, ainsi que des majorations correspondantes.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au bénéfice de Mme B... et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du ministre de l'action et des comptes publics est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 3 mars 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme Caraës, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 mars 2022.
La rapporteure,
A. Evrard
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
M.-Th. Pillet
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY00602