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17/03/2022 | FRANCE | N°21LY00787

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 17 mars 2022, 21LY00787


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 11 décembre 2020 par lesquels le préfet de l'Isère, d'une part, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois, et, d'autre part, a prononcé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2007464 du 16 décembre 2020, la magistrat

e désignée du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 11 décembre 2020 par lesquels le préfet de l'Isère, d'une part, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois, et, d'autre part, a prononcé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2007464 du 16 décembre 2020, la magistrate désignée du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 mars 2021, M. A..., représenté par Me Schürmann, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3 ) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle a été signée par une personne incompétente pour ce faire ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle porte une porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle méconnaît le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur de droit dès lors qu'il n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur de droit dès lors qu'il n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision d'assignation à résidence :

- il n'existe aucune perspective raisonnable d'éloignement.

Le préfet de l'Isère a produit un mémoire, enregistré le 23 avril 2021, par lequel il conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Evrard ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant macédonien né le 6 août 1993, est entré en France le 11 janvier 2019, selon ses déclarations, et a été interpellé dans le cadre d'une vérification de son droit au séjour le 10 décembre 2020. Par des arrêtés du 11 décembre 2020, le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai sur le fondement du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination, a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. A... relève appel du jugement du 16 décembre 2020 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier produites par le préfet de l'Isère que, par arrêté du 10 février 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial du même jour, Mme D... C..., sous-préfète chargée de mission auprès du préfet de l'Isère, secrétaire générale adjointe de la préfecture, a reçu délégation à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions, documents et correspondances administratives diverses relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception d'actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions relatives à la police des étrangers, en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général. Il n'est pas établi, ni même allégué, qu'en l'espèce, ce dernier n'aurait été ni absent ni empêché. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté attaqué manque en fait.

3. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué vise le 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique que M. A..., après être entré irrégulièrement en France, n'a pas sollicité son admission au séjour et qu'il a été interpellé dans le cadre d'une vérification de son droit au séjour le 10 décembre 2020. Par suite, cet arrêté comporte la mention des circonstances de fait et de droit qui en constituent le fondement, et est, par suite, suffisamment motivé.

4. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... ne séjournait en France que depuis un an et demi à la date de la décision attaquée, qu'il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français sans solliciter son admission au séjour, que la communauté de vie qu'il déclare avoir engagée avec une compatriote titulaire d'une carte de résident, dont la réalité n'est établie qu'à compter du mois de septembre 2019, présentait un caractère très récent à la date de cette décision, et que le requérant n'établit pas qu'il serait effectivement le père du jeune E..., né à Bourgoin-Jallieu le 17 décembre 2018 et qu'il n'a pas reconnu. En outre, M. A... n'établit pas être dépourvu de toute attache privée et familiale en République de Macédoine, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-six ans. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet de l'Isère n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

Sur la légalité de la décision refusant un délai de départ volontaire :

6. M. A... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance tirés de la méconnaissance du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de ce qu'il ne pouvait faire l'objet d'une décision de refus de délai de départ volontaire dès lors qu'il n'avait pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée une telle décision. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par la magistrate désignée du tribunal administratif de Grenoble.

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par M. A... de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

8. En second lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " III. ' L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...)La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

9. Le préfet de l'Isère, qui a pris en considération la durée de la présence sur le territoire français de M. A... et la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, en relevant que l'intéressé était entré récemment en France, qu'il n'établissait pas contribuer à l'éducation ni à l'entretien de l'enfant né de son union avec une compatriote et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine, n'a pas inexactement appliqué le III précité de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prenant à son encontre une mesure d'interdiction de retour en France d'une durée de six mois, alors même que le requérant ne s'est pas soustrait à une précédente mesure d'éloignement.

10. En dernier lieu, dans les circonstances de l'espèce, et eu égard aux motifs précédemment évoqués, la décision attaquée n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....

Sur la légalité de la décision portant assignation à résidence :

11. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) ".

12. L'assignation à résidence prévue à l'article L. 561-2, qui est susceptible d'être prononcée à l'égard d'étrangers qui ne peuvent quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, peut être décidée pour une durée maximale de quarante-cinq jours, renouvelable une fois.

13. M. A... se borne à faire valoir que le préfet de l'Isère n'a pas démontré qu'il existerait une perspective raisonnable qu'il soit éloigné compte tenu des mesures de restriction de circulation consécutives à la pandémie de Covid-19. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'éloignement du requérant vers tout pays où il serait légalement admissible, et notamment son pays d'origine, ne demeurait pas matériellement envisageable à la date de la décision attaquée en dépit des contraintes liées à cette pandémie.

14. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 10 février 2022 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

Mme Caraës, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2022.

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N° 21LY00787


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00787
Date de la décision : 17/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

33-01 Établissements publics et groupements d’intérêt public. - Notion d'établissement public.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : SCHURMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-03-17;21ly00787 ?
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