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17/03/2022 | FRANCE | N°20LY03447

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 17 mars 2022, 20LY03447


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 10 juillet 2019 par laquelle la ministre du travail, après avoir annulé la décision de l'inspectrice du travail de la 20ème section du département du Rhône du 25 janvier 2019 ayant refusé d'autoriser son licenciement pour inaptitude, a autorisé la société Apave Sudeurope à la licencier.

Par un jugement n° 1907036 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant

la cour

Par une requête enregistrée le 9 décembre 2020 et des mémoires enregistrés les 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 10 juillet 2019 par laquelle la ministre du travail, après avoir annulé la décision de l'inspectrice du travail de la 20ème section du département du Rhône du 25 janvier 2019 ayant refusé d'autoriser son licenciement pour inaptitude, a autorisé la société Apave Sudeurope à la licencier.

Par un jugement n° 1907036 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 décembre 2020 et des mémoires enregistrés les 18 mai et 25 août 2021, présentés pour Mme A..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1907036 du 29 septembre 2020 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler la décision susmentionnée ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé, que c'est à tort que la ministre du travail et les premiers juges ont estimé que son licenciement pour inaptitude était sans lien avec ses fonctions représentatives et son appartenance syndicale, dès lors qu'elle a fait l'objet d'une discrimination syndicale, reconnue par les juridictions civiles, ainsi que d'obstacles à l'exercice de ses mandats syndicaux, qui sont en lien direct avec la dégradation de son état de santé.

Par des mémoires enregistrés les 2 février et 27 août 2021, présentés pour la société Apave Sudeurope, elle conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 23 avril 2021, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête en soutenant que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Seillet, président assesseur ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me Ritouet pour Mme A..., ainsi que celles de Me Bilal, pour la société Apave Sudeurope ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., recrutée en 1973 par la société Apave Sudeurope, entreprise spécialisée dans l'inspection et la formation dans les domaines de l'hygiène et de la sécurité, notamment industrielle, comme secrétaire sténodactylo, et qui, en dernier lieu, exerçait des fonctions d'inspectrice principale et était également titulaire des mandats de déléguée du personnel suppléante et de déléguée syndicale, a été déclarée inapte, en premier lieu par un avis émis le 26 septembre 2017 par le médecin du travail à l'occasion d'une première visite de reprise après une période d'arrêt de travail du 28 novembre 2016 au 24 octobre 2017, précisant que son état de santé ferait obstacle à tout reclassement, puis, après une étude de poste et des conditions de travail par ce même médecin, par un second avis, du 4 octobre 2017, mentionnant que tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. Par une décision du 10 juillet 2019, la ministre du travail, sur recours hiérarchique de la société Apave Sudeurope, a annulé la décision de l'inspectrice du travail de la 20ème section du département du Rhône du 25 janvier 2019 ayant refusé d'autoriser le licenciement de Mme A... pour inaptitude physique et a autorisé la société Apave Sudeurope à la licencier pour ce motif. Mme A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cette décision ministérielle.

2. En vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale.

3. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude du salarié, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement envisagé, compte tenu des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi et de la possibilité d'assurer son reclassement dans l'entreprise. En revanche, dans l'exercice de ce contrôle, il n'appartient pas à l'administration de rechercher la cause de cette inaptitude.

4. Toutefois, ainsi qu'il a été indiqué au point 2, il appartient en toutes circonstances à l'autorité administrative de faire obstacle à un licenciement en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par un salarié ou avec son appartenance syndicale.

5. Par suite, même lorsque le salarié est atteint d'une inaptitude susceptible de justifier son licenciement, la circonstance que le licenciement envisagé est également en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale fait obstacle à ce que l'administration accorde l'autorisation sollicitée. Le fait que l'inaptitude du salarié résulte d'une dégradation de son état de santé, elle-même en lien direct avec des obstacles mis par l'employeur à l'exercice de ses fonctions représentatives est à cet égard de nature à révéler l'existence d'un tel rapport.

6. Il ressort des pièces du dossier que, comme l'a au demeurant constaté la cour d'appel de Lyon par des arrêts des 4 juin 2007 et 21 mai 2021 condamnant la société Apave Sudeurope à indemniser Mme A... des préjudices subis, l'intéressée a été victime de faits de discrimination syndicale commis par son employeur, résultant notamment de refus de ses demandes de passage à temps complet, de l'absence d'entretiens annuels, de l'absence d'évolution professionnelle à partir de 1986 d'une absence de définition de son poste et des missions, de retraits de stages qu'elle animait et d'une procédure de licenciement conduite en 2010. Il ne ressort toutefois pas des pièces produites par la requérante, en particulier des certificats médicaux et des avis du médecin du travail constatant son inaptitude physique, conséquence d'un accident physiologique, que celle-ci résulterait d'une dégradation de son état de santé elle-même en lien direct avec des obstacles mis par l'employeur à l'exercice de ses fonctions représentatives ou avec les faits de discrimination syndicale commis par ce dernier, alors au demeurant que la cour d'appel de Lyon, dans son arrêt du 21 mai 2021, a également constaté que Mme A... ne démontrait ni ne justifiait du lien de causalité entre la discrimination syndicale dont elle a fait l'objet et la dégradation de son état de santé. Dès lors, contrairement à ce que soutient Mme A..., la ministre du travail a pu légalement se fonder, pour accorder à la société Apave Sudeurope, l'autorisation de la licencier pour un motif tiré de son inaptitude physique, sur l'absence de lien entre le licenciement envisagé et les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressée ou avec son appartenance syndicale.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la mise à la charge de l'État d'une somme au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et à la société Apave Sudeurope.

Délibéré après l'audience du 24 février 2022 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2022.

1

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N° 20LY03447


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03447
Date de la décision : 17/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07 Travail et emploi. - Licenciements.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : SCP J. AGUERA et ASSOCIES - LYON

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-03-17;20ly03447 ?
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