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17/03/2022 | FRANCE | N°20LY02989

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 17 mars 2022, 20LY02989


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la chambre de commerce et d'industrie de région (CCIR) Auvergne-Rhône-Alpes à lui verser une somme de 86 177,68 euros, outre les intérêts et leur capitalisation, en réparation des préjudices qu'elle impute à son maintien dans un statut de vacataire.

Par un jugement n° 1901683 du 13 août 2020, le tribunal administratif de Grenoble a condamné la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes à verser à Mme B... une indemnité de 3 318 euros, o

utre intérêts et capitalisation, ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre de l'art...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la chambre de commerce et d'industrie de région (CCIR) Auvergne-Rhône-Alpes à lui verser une somme de 86 177,68 euros, outre les intérêts et leur capitalisation, en réparation des préjudices qu'elle impute à son maintien dans un statut de vacataire.

Par un jugement n° 1901683 du 13 août 2020, le tribunal administratif de Grenoble a condamné la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes à verser à Mme B... une indemnité de 3 318 euros, outre intérêts et capitalisation, ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 16 octobre 2020 et des mémoires enregistrés le 14 avril 2021 et le 18 février 2022, présentés pour Mme B..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1901683 du 13 août 2020 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

2°) de condamner la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes à lui verser une somme totale de 86 177,68 euros en réparation des préjudices subis, outre intérêts à compter du 15 novembre 2018 et la capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête répond aux prescriptions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative et est donc recevable ;

- tous les établissements au sein desquels elle a dispensé des cours de droit dans le cadre de la formation initiale et procédé à la surveillance des examens portant sur ces formations faisaient partie de CCI formation, dépendant de la CCI de la Drôme, devenue la CCIR Rhône-Alpes puis la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes, le lieu d'exécution était le même, le campus consulaire à Valence, et ses fiches de paye étaient établies par le même service et selon des outils logiciels et procédures identiques ;

- dès lors qu'il résulte de l'avis de la commission paritaire nationale publié le 1er mars 2000, applicable au cas d'espèce, que, dans le titre III du statut relatif aux enseignants, a été abrogé le sous-titre II qui permettait le recours à des enseignants vacataires et autres intervenants non statutaires, il était exclu qu'il y soit recouru par le biais des articles 49-5 et 49-6 alors créés dans le titre IV relatif aux personnels contractuel, et cet avis prévoyait en outre une date de titularisation des agents enseignants hors statut déjà en poste avec une prise d'effet au plus tard au 1er juin 2000 ; il en résulte que, lors de son embauche initiale, la CCI de la Drôme aurait dû la recruter exclusivement dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, fut-il à temps plein ou à temps partiel ; c'est à tort qu'elle a été considérée comme une vacataire, le titre IV relatif aux personnels vacataires ne s'appliquant pas aux enseignants, hormis soit pour une tâche spécialisée soit dans les services de formation professionnelle continue ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré que les emplois en CFA obéiraient à des règles particulières et seraient nécessairement temporaires et précaires, au regard des dispositions des articles L. 6232-1 et L. 6232-2 du code du travail, inapplicables en l'espèce, alors que s'appliquaient, à la date de son recrutement, les articles L. 116-1-1, L. 116-2, L. 116-4 et les articles R. 116-21 à R. 116-23 du même code, abrogés depuis, et que son employeur a toujours été la CCI de la Drôme, et plus particulièrement son établissement secondaire " service enseignement ", puis " CCIT de la Drôme formation ", et non un CFA dont la réalité juridique n'est pas démontrée ; elle a également dispensé, à compter d'octobre 2005, des formations pour l'école de gestion et de commerce de Valence qui n'est pas un sujet de droit distinct de la CCI ; elle avait donc la qualité d'agent public soumis au statut du personnel administratif des CCI ;

- elle n'a jamais exécuté une tâche spécialisée ou offert une expertise en complément d'une autre activité professionnelle exercée à titre principal dès lors que, si elle dispensait occasionnellement d'autres cours dans des établissements privés, il ne s'agissait aucunement d'une activité principale, ces interventions n'étant que de nature ponctuelle et tout à fait accessoire et précisément à l'effet de compléter ses revenus puisqu'elle ne travaillait qu'à temps partiel au sein de la CCI ;

- en conséquence de la faute commise par la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes en lui appliquant le régime des vacataires alors qu'elle aurait dû bénéficier d'un contrat d'enseignant permanent, elle a subi des préjudices dont elle est fondée à réclamer l'indemnisation, au titre des indemnités de rupture de contrat, correspondant à l'indemnité de licenciement, au titre d'un préjudice financier correspondant à l'absence de rémunération au titre du mois d'août chaque année et à une indemnité de chômage moindre, au titre d'un préjudice moral résultant du non-renouvellement de son contrat de travail et au titre d'une perte de chance d'avoir perçu des éléments de rémunération inhérent à la qualité d'agent non titulaire occupant un emploi permanent.

Par des mémoires enregistrés les 12 mars et 29 avril 2021 et le 18 février 2022 (non communiqué), la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes conclut :

- au rejet de la requête ;

- à titre incident, à l'annulation du jugement n° 1901683 du 13 août 2020 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il l'a condamnée à verser à Mme B... une somme de 3 318 euros, outre intérêts et capitalisation, et une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- à la mise à la charge de Mme B... d'une somme de 6 000 euros au titre des frais liés au litige.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable en ce qu'elle ne comporte pas de critique motivée du jugement attaqué ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ;

- le jugement attaqué, en ce qu'il a considéré que Mme B... aurait dû bénéficier d'un contrat à durée indéterminée à temps non complet en application des dispositions de l'article 48-7 du statut du personnel administratif des chambres consulaires et que la fin de la relation de travail devait être ainsi requalifiée en licenciement, est insuffisamment motivé ;

- la prescription quadriennale peut être opposée à la créance de Mme B... pour ce qui concerne les éléments antérieurs à l'année 2014 ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'à raison du quantum annuel des heures d'enseignement assurées par Mme B... pour le compte de la CCI elle devait bénéficier d'un contrat à durée indéterminé, dès lors que le quantum retenu est inexact, que les enseignements ont été dispensés dans différents cursus et non pour une classe unique, et pour des formations différentes ; en outre, dès lors, d'une part, que Mme B... a accompli des tâches spécialisées et a fait bénéficier l'institution consulaire d'une expertise dans des domaines variés de l'enseignement du droit et, d'autre part, qu'elle entretenait une relation de travail avec d'autres employeurs, elle doit être regardée comme ayant été employée par l'institution consulaire en exécution de tâches spécialisées, d'une expertise, en complément d'une autre activité professionnelle exercée à titre principal, au sens de l'article 49-5 du statut.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code du travail ;

- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 2010-853 du 23 juillet 2010 ;

- l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, des chambres de commerce et d'industrie et des groupements consulaires ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Seillet, président assesseur ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me Buisson, pour Mme B..., ainsi que celles de Me Bousquet, pour la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été recrutée, par un premier engagement à durée déterminée du 19 septembre 2001, par la CCI de la Drôme en qualité d'" intervenant(e) vacataire " au sein de son centre de formation des apprentis (CFA), puis elle été recrutée chaque année, jusqu'en juillet 2018, par des contrats de vacataires ou à durée déterminée, pour enseigner le droit dans différentes structures relevant de cet organisme consulaire, ou en lien avec lui, sur le campus consulaire de Valence, en particulier, outre le CFA, l'institut des forces de vente (IFV) et l'institut drômois des formations en alternance (IDFA), ainsi qu'au sein de l'école de gestion et de commerce (EGC) de l'école supérieure de commerce Drôme-Ardèche (ESCDA). Au terme du dernier contrat conclu avec l'IDFA, ayant pris fin le 3 juillet 2018, Mme B... a sollicité l'indemnisation par la chambre de commerce et d'industrie de région (CCIR) Auvergne-Rhône-Alpes des préjudices subis du fait de son placement dans une situation irrégulière durant toute la période d'exercice de son activité au sein de la chambre et de la rupture des relations de travail. D'une part, Mme B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a limité à une somme globale de 3 318 euros l'indemnité mise à la charge de la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes et, d'autre part, cet organisme consulaire relève appel, à titre incident, de ce jugement en tant qu'il l'a condamné à indemniser Mme B....

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes :

2. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. ".

3. Le mémoire introductif d'appel de Mme B... ne constitue pas la reproduction littérale de sa demande de première instance, mais énonce à nouveau, de manière précise, les moyens soulevés au soutien de ses conclusions indemnitaires et comporte des critiques du jugement attaqué. Une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 du code de justice administrative. Ainsi, la fin de non-recevoir opposée par la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes et tirée du défaut de motivation de la requête doit être écartée.

Sur la responsabilité de la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes :

4. Aux termes de l'article 48-7 du statut du personnel administratif des chambres consulaires : " Les compagnies consulaires peuvent employer des enseignants permanents hors statut (...). Ces enseignants seront employés sous contrat permanent hors statut (...) ". Aux termes de l'article 49-5 du même statut : " Les compagnies consulaires peuvent employer des intervenants vacataires dans les cas suivants : exécution d'une tâche précise sur un emploi dénué de permanence, exécution d'une tâche spécialisée, d'une expertise, en complément d'une autre activité professionnelle exercée à titre principal (...) ". Ces dispositions ouvrent la possibilité aux compagnies consulaires d'employer des enseignants permanents hors statut et limitent l'emploi d'intervenants vacataires aux situations d'exécution de tâches précises ou spécialisées, dénuées de permanence.

5. Il résulte de l'instruction qu'ainsi qu'il a été dit au point 1, Mme B... a exercé ses fonctions d'enseignante en qualité de vacataire, entre le mois de septembre 2001 et le mois de juillet 2018, au sein du CFA, de l'institut des forces de vente (IFV) et de l'institut drômois des formations en alternance (IDFA), organismes internes à la CCI de la Drôme, le plus souvent dans le cadre de cours de droit dispensés à des élèves de BTS, ainsi qu'au sein de l'école de gestion et de commerce (EGC) de l'école supérieure de commerce Drôme-Ardèche (ESCDA).

6. En premier lieu, il résulte des dispositions du code du travail relatives à la durée limitée des conventions créant un centre de formation d'apprentis, dans leur version en vigueur tant à la date du premier recrutement de Mme B... en 2001 qu'au cours de toute la période de son recrutement par la CCI de la Drôme, que les emplois occupés dans un tel centre sont, nécessairement, des emplois temporaires. Par suite, dès lors que la création des centres de formation d'apprentis est décidée par convention pour une durée renouvelable de cinq ans, Mme B..., lorsqu'elle était recrutée pour dispenser un enseignement au sein d'une telle structure, n'occupait pas un emploi permanent. Il en est de même des contrats de vacation pour la surveillance d'examens.

7. En deuxième lieu, dès lors que l'école de gestion et de commerce de Valence est une entité de l'école supérieure de commerce Drôme-Ardèche, personne morale de droit privé distincte de la compagnie consulaire, alors même que cette école utilise les locaux de la CCI et a de nombreux liens avec elle, Mme B... ne peut se prévaloir des contrats, soumis au demeurant à la convention collective des organismes de formation, qu'elle a conclus avec cet établissement d'enseignement, par lequel elle était rémunérée de manière distincte, pour soutenir avoir occupé à ce titre un emploi permanent auprès de l'organisme consulaire, et il en est de même des enseignements assurés dans cette école dans le cadre d'une mise à disposition par cet organisme.

8. En dernier lieu, toutefois, il résulte également de l'instruction que, durant la période de 2002 à 2018, Mme B... a dispensé, chaque année, un enseignement de droit, au sein des structures internes à la CCI de la Drôme, devenue la CCI territoriale de la Drôme de la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes, dits IFV, CCI Formation Alternance ou IDFA, pour l'année scolaire, dans le cadre d'au moins un BTS, dénommé " assistant de gestion ", ou " négociation et relation client " ou " CGO NRC " (comptabilité et gestion des organisation et négociation relation client ") ou " CGO " ou encore " CG ", pour un nombre d'heures compris, selon les années, entre vingt-cinq et quatre-vingt-douze heures. Dès lors, Mme B... devait être regardée comme occupant un emploi permanent et aurait dû bénéficier, pendant toute la période durant laquelle elle a enseigné au sein de ces structures consulaires, d'un contrat à durée indéterminée en application des dispositions citées ci-dessus de l'article 48-7 du statut du personnel administratif des chambres consulaires, nonobstant, d'une part, la variation, d'une année sur l'autre, du volume et des dates de ses interventions, d'autre part, l'exercice par l'intéressée d'autres activités au sein d'autres structures de formation. Par suite, Mme B... est fondée à invoquer la faute résultant de l'absence de recrutement dans le cadre d'un contrat permanent et à se prévaloir de ce que la fin de la relation de travail avec l'organisme consulaire ne lui a pas ouvert le bénéfice des effets d'une procédure de licenciement.

9. Dès lors qu'en vertu des dispositions du III de l'article 40 de la loi du 23 juillet 2010 susvisée relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux service, selon lesquelles " Les agents de droit public sous statut employés par les chambres de commerce et d'industrie territoriales, à l'exception de ceux employés au sein de leurs services publics industriels et commerciaux, sont transférés à la chambre de commerce et d'industrie de région, qui en devient l'employeur, au 1er janvier 2013 (...) Ces agents sont de droit mis à la disposition de la chambre territoriale qui les employait à la date d'effet du transfert. (...) ", Mme B... devait être regardée, ainsi qu'il vient d'être dit, comme occupant un emploi permanent et, par voie de conséquence, comme ayant été transférée à la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes qui en était devenue l'employeur à compter du 1er janvier 2013, et qui au demeurant l'avait recrutée pour exercer les mêmes fonctions après cette date. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 8 que la requérante est fondée à rechercher la condamnation de cet organisme à l'indemniser des préjudices subis tant du chef de la rupture de ces relations que du fait d'avoir été illégalement maintenue sous le statut de vacataire, pour les activités d'enseignement exercées au sein des structures internes à l'organisme consulaire mentionnées au point 8.

Sur les préjudices :

10. En premier lieu, en vertu des dispositions de l'article 48-7 du statut du personnel des chambres consulaires les enseignants sont employés sous contrat permanent, qui doit obligatoirement fixer le délai de préavis en cas de licenciement qui ne peut être inférieur à un mois entre six et vingt-quatre mois d'ancienneté et de deux mois au-delà, et le mode de calcul de l'indemnité de licenciement qui ne peut être calculée sur une base inférieure à un demi mois par année de service du salaire mensuel brut moyen de la dernière année dans la limite de six mois d'indemnité.

11. Il résulte de l'instruction que, comme il a été dit au point 8, Mme B... a exercé des activités d'enseignement dans les structures internes de la CCI de la Drôme, au profit d'élèves de BTS, durant la période correspondant aux années 2002 à 2018, soit une durée de seize années, lui ouvrant droit à une indemnité de préavis égale à deux mois de son salaire ainsi qu'à une indemnité de licenciement égale à six mois de son salaire mensuel brut moyen de la dernière année. Il en résulte également que Mme B... avait conclu, le 27 août 2017, un contrat, pour la période du 28 août 2017 au 30 mai 2018, pour une action de formation dans le cadre du " BTS CG contrat de pro " pour trente heures de cours et un taux horaire brut de 35 euros, et qu'elle avait également conclu, le 26 septembre 2017, un autre contrat pour la période du 26 septembre 2017 au 3 juillet 2018, en qualité d'intervenante vacataire, dans le cadre de la même formation " BTS CG contrat de pro " pour trente-six d'heures de cours, rémunérées au même taux horaire brut. Ainsi, au cours de la dernière année d'emploi de Mme B... par l'organisme consulaire, au titre d'un besoin permanent, elle a perçu, sur une période de dix mois, un montant total de 2 310 euros, correspondant à un salaire mensuel brut moyen de 231 euros. Elle est donc fondée à réclamer une indemnité équivalente à celle qui aurait dû lui être versée au titre du préavis et de l'indemnité de licenciement si elle avait bénéficié d'un contrat permanent, soit une somme totale de 1 617 euros (462 euros au titre des deux mois de préavis et 1 386 euros au titre d'une indemnité de licenciement correspondant à six mois du dernier salaire mensuel brut).

12. En deuxième lieu, il sera fait une juste appréciation du préjudice résultant des troubles dans les conditions d'existence de Mme B... causés par la rupture des relations de travail en 2018, ainsi que du préjudice moral subi tant du chef de la rupture de ces relations que du fait d'avoir été illégalement maintenue sous le statut de vacataire, en l'évaluant à la somme globale de 2 000 euros.

13. En dernier lieu, si Mme B... réclame l'indemnisation du préjudice financier qu'elle estime avoir subi pour avoir été maintenu indûment sous le statut de vacataire et la perte de revenus, depuis le non renouvellement des engagements de la CCI, ainsi que pour n'avoir pas bénéficié de salaire au mois d'août durant les années d'exercice de ses fonctions, elle n'établit pas avoir subi un préjudice à ce titre, à défaut de démontrer, en premier lieu, avoir perçu une rémunération inférieure à celle qui lui aurait été versée si elle avait été recrutée par un contrat à durée indéterminée, en deuxième lieu n'avoir reçu aucune rémunération au mois d'août, alors au demeurant qu'une partie des contrats conclus couvraient cette période et que d'autres incluaient une indemnité de congés payés, et, en dernier lieu, qu'elle aurait perçu des revenus plus élevés si la rupture de ses relations de travail était intervenue dans le cadre d'un licenciement. Elle n'établit pas davantage la réalité du préjudice correspondant à la perte d'un supplément familial de traitement.

Sur la prescription quadriennale :

14. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'État (..) toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ".

15. La créance dont Mme B... est fondée à demander le paiement trouve son origine, ainsi qu'il a été dit aux points 10 à 12, dans la faute de la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes à ne pas l'avoir recrutée en contrat permanent et correspond à l'indemnisation des préjudices résultant, d'une part, de l'absence de versement d'une indemnité de licenciement et, d'autre part, de la rupture des relations de travail. Dès lors que Mme B... n'a pu connaître la réalité et l'étendue de ces préjudices qu'à la date de la rupture de ces relations de travail, lors de la non-reconduction de ses derniers contrats, en juillet 2018, la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes n'est, par suite, pas fondée à opposer l'exception de prescription quadriennale aux créances dont se prévaut Mme B... et dont elle a réclamé l'indemnisation par une demande présentée le 15 novembre 2018.

16. Il résulte de ce qui précède, d'une part, que la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à indemniser Mme B... des préjudices qu'elle a subis et, d'autre part, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal a limité à la somme de 3 318 euros l'indemnité mise à la charge de la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes qui doit être fixée à 3 617 euros.

17. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes la somme de 1 500 euros au titre des frais liés au litige exposés par Mme B... à l'occasion de la présente instance. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, une somme au titre des frais exposés par la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 3 318 euros, outre intérêts capitalisés, que la CCIR Auvergne Rhône-Alpes a été condamnée à verser à Mme B... en réparation de son préjudice, par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 13 août 2020, est portée au montant de 3 617 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 1901683 du 13 août 2020 est réformé en ce qu'il a contraire au présent arrêt.

Article 3 : La CCIR Auvergne-Rhône-Alpes versera à Mme B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions de la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., et à la chambre de commerce et d'industrie de région (CCIR) Auvergne-Rhône-Alpes.

Délibéré après l'audience du 24 février 2022 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2022.

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N° 20LY02989


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02989
Date de la décision : 17/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

14-06-01 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. - Organisation professionnelle des activités économiques. - Chambres de commerce et d'industrie.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : BOUSQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-03-17;20ly02989 ?
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