Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'ADAPEI de l'Ain a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la décision du 16 janvier 2019 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé de l'autoriser à licencier sa salariée, Mme B... A..., pour motif disciplinaire et la décision du 16 juillet 2019 par laquelle la ministre du travail a implicitement rejeté son recours hiérarchique, d'autre part, d'enjoindre à l'inspecteur du travail de réexaminer sa demande.
Par un jugement n° 1907190 lu le 17 juillet 2020, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire enregistré le 10 septembre 2020 et les 15 janvier et 16 juin 2021 (ce denier non communiqué), l'ADAPEI de l'Ain, représentée par Me Bousquet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et les décisions susmentionnées ;
2°) d'enjoindre à l'inspecteur du travail de réexaminer sa demande ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision de l'inspecteur du travail est insuffisamment motivée, dès lors que l'inspecteur du travail n'a pas entendu le résident supposé victime d'actes de maltraitance lors de son enquête contradictoire ;
- les faits reprochés sont établis et constituent une faute suffisamment grave pour justifier le licenciement de Mme A....
Par un mémoire enregistré le 9 mars 2021, Mme A..., représentée par Me Dumoulin, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'ADAPEI de l'Ain une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Par un mémoire enregistré le 23 décembre 2020, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 1er juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 juin 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ;
- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
- et les observations de Me Bousquet pour l'ADAPEI de l'Ain, ainsi que celles de Me Pieri pour Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Pour demander l'autorisation de licencier Mme A..., déléguée du personnel et conseillère prud'homale, l'ADAPEI de l'Ain lui a fait grief d'avoir, le 13 novembre 2018, agressé verbalement une collègue de travail et violenté physiquement un résident. Sa demande a été rejetée par l'inspecteur du travail en raison du défaut de matérialité des faits, puis implicitement par la ministre du travail. L'ADAPEI de l'Ain relève appel du jugement du 17 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation présentée contre ces deux décisions.
Sur le fond du litige :
2. En premier lieu, la décision du 16 janvier 2019, qui vise les dispositions applicables du code du travail et indique le motif qui a conduit son auteur à rejeter la demande, comporte une motivation suffisante et satisfait aux exigences de l'article R. 2421-12 du code du travail. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 2421-11 du code du travail : " L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat. / (...) En outre, l'inspecteur du travail peut procéder à une enquête contradictoire telle que définie à l'alinéa 1er du présent article (...) ". Ces dispositions ne font pas obligation à l'inspecteur du travail d'entendre un tiers à la relation de travail. Il suit de là que l'ADAPEI de l'Ain n'est pas fondée à soutenir que l'enquête menée par l'inspection du travail sur sa demande d'autorisation de licenciement serait entaché d'un défaut de contradictoire pour ne pas avoir recueilli le témoignage du résident présenté comme victime d'actes de maltraitance.
4. En troisième lieu, en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont matériellement avérés puis, cette condition étant satisfaite, si ces faits sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi. En outre, aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail : " (...) le juge, à qui il appartient d'apprécier (...) le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties (...) Si un doute subsiste, il profite au salarié ".
5. Or et d'une part, s'il ressort des pièces du dossier que Mme A... est à l'origine d'un échange avec une collègue qui était en retard, aucun élément ne vient étayer la violence des propos qui lui sont imputés. D'autre part, l'unique témoin présent sur les lieux, qui tournait le dos à la scène, n'a pas vu Mme A... donner un coup de poing sur la joue gauche du résident. Si elle-même reconnaît avoir eu un geste vif envers le résident et l'avoir réprimandé, elle nie l'avoir frappé. Dès lors qu'un doute subsiste sur ces deux griefs, l'article L. 1235-1 précité du code du travail faisait obligation à l'inspecteur du travail et la ministre du travail de les regarder comme n'étant pas matériellement établis.
6. Il résulte de ce qui précède que l'ADAPEI de l'Ain n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 16 janvier 2019 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement de Mme A... et la décision du 16 septembre 2019 de la ministre du travail rejetant son recours hiérarchique. Les conclusions de la requête présentées aux mêmes fins ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Les conclusions de l'ADAPEI de l'Ain, partie perdante, doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Mme A....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'ADAPEI de l'Ain est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'ADAPEI de l'Ain, à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et à Mme B... A....
Délibéré après l'audience du 24 février 2022 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2022.
N° 20LY02681 2