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16/03/2022 | FRANCE | N°19LY02160

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 16 mars 2022, 19LY02160


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon, dans le dernier état de ses écritures, de condamner l'établissement d'enseignement supérieur consulaire Grenoble école de management (GEM) ou la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Grenoble à lui verser une somme de 150 000 euros en réparation de son préjudice de perte de chance ainsi qu'une somme de 4 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Par un jugement n° 1703349 du 4 avril 2019, le tribunal administratif de Lyon a reje

té sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 juin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon, dans le dernier état de ses écritures, de condamner l'établissement d'enseignement supérieur consulaire Grenoble école de management (GEM) ou la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Grenoble à lui verser une somme de 150 000 euros en réparation de son préjudice de perte de chance ainsi qu'une somme de 4 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Par un jugement n° 1703349 du 4 avril 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 juin 2019, M. B..., représenté par la société d'avocats Aarpi Thémis, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 4 avril 2019 ;

2°) de condamner solidairement l'établissement d'enseignement supérieur consulaire Grenoble école de management (GEM) et la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Grenoble à lui verser une somme de 150 000 euros en réparation de son préjudice de perte de chance ainsi qu'une somme de 4 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

3°) de mettre à la charge des deux établissements une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique.

Il soutient que :

- le jugement omet de statuer sur les conclusions au titre du préjudice moral lié à son exclusion ;

- le jugement omet de statuer sur les conclusions au titre du préjudice moral et aux troubles dans les conditions d'existence liés à la décision du 7 décembre 2012 et au refus persistant de lui communiquer ses notes et ses copies depuis cette date ;

- le jugement est entaché d'une double erreur de fait et d'une contradiction par rapport au jugement du 15 juin 2017 ;

- le jugement n'a pas statué sur l'ensemble des illégalités fautives, s'en tenant aux seuls moyens retenus par le jugement de 2017 ;

- le jugement est entaché d'un défaut de motivation ;

- il existe des illégalités fautives sur lesquelles le tribunal a omis de statuer ;

- le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit en ne statuant pas sur le moyen tiré de l'irrégularité des conditions d'obtention du diplôme qui lui ont été opposées ;

- la GEM et la CCI ont commis une des fautes de nature à engager leur responsabilité à son égard et devront en conséquence l'indemniser de l'ensemble de ces préjudices ;

- la sanction d'exclusion dont il a fait l'objet le 21 novembre 2013 est illégale.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 septembre 2019, la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Grenoble, représentée par Me Renaud, demande à la Cour :

- à titre principal, de juger que la CCI ne peut être attraite par M. B... car elle n'est pas concernée par ce litige, de juger que la requête de M. B... à l'encontre de la CCI est irrecevable et de rejeter la requête ;

- à titre subsidiaire, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement n° 1703349 rendu par le tribunal administratif de Lyon le 4 juillet 2019 et en conséquence de rejeter les demandes de M. B... ;

- à titre très subsidiaire, de juger que la demande indemnitaire de M. B... est infondée tant en son principe qu'en son quantum et de débouter M. B... de ses demandes indemnitaires ;

- en tout état de cause de mettre à la charge de M. B... une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens présentés par M. B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 31 août 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 18 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Moreau, représentant la chambre de commerce et d'industrie de Grenoble et l'école supérieure de commerce (ESC) ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été scolarisé en qualité d'étudiant à l'école supérieure de commerce (ESC) de Grenoble, entité de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Grenoble, au cours de l'année 2011-2012 dans le cadre d'un partenariat entre l'université Pierre Mendès-France et l'école. Par une décision du 7 décembre 2012, la commission d'appel a confirmé la décision du 15 novembre 2012 du jury de scolarité de 3ème année de l'ESC de Grenoble lui refusant l'attribution du diplôme. Par une décision en date du 21 novembre 2013, le jury de scolarité a décidé de l'exclure du programme. Par un jugement du 15 juin 2017, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions des 15 novembre et 7 décembre 2012 et du 21 novembre 2013, et a enjoint au directeur de l'ESC de Grenoble de réexaminer la situation de M. B.... Ce dernier a demandé au même tribunal de condamner l'établissement d'enseignement supérieur consulaire Grenoble école de management (GEM), nouvelle appellation de l'ESC de Grenoble, ou la CCI de Grenoble à lui verser une somme de 150 000 euros en réparation de son préjudice de perte de chance ainsi qu'une somme de 4 000 euros en réparation de son préjudice moral, nés de l'illégalité fautive des décisions annulées par le tribunal. Par un jugement du 4 avril 2019 dont il relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. B... .

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. Par un arrêté du 3 mai 2016 portant approbation des statuts de l'établissement d'enseignement supérieur consulaire GEM, ce dernier est devenu une personne morale de droit privé. Toutefois, la requête de M. B... tendant à la condamnation de GEM ou de la CCI de Grenoble à l'indemniser des préjudices nés, selon lui, de l'illégalité des décisions des 15 novembre et 7 décembre 2012 et du 21 novembre 2013, lesquelles ont été prises dans le cadre d'une mission de service public administratif et qui comportent l'exercice de prérogatives de puissance publique, relève de la compétence de la juridiction administrative.

Sur la régularité du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Afin de satisfaire au principe de motivation des décisions de justice, rappelé par les dispositions précitées, le juge administratif doit répondre, à proportion de l'argumentation qui les étaye, aux moyens qui ont été soulevés par les parties auxquelles sa décision fait grief et qui ne sont pas inopérants. Pour écarter les moyens opérants tirés d'une part, de ce que les décisions du 15 novembre 2012, du 7 décembre 2012 et du 21 novembre 2013 sont entachées d'une erreur de fait concernant les notes de la session de rattrapage d'octobre 2012 qui n'ont jamais été communiquées, d'autre part, de ce que les décisions sont entachées d'un vice de procédure dès lors qu'elles n'ont pas été précédées d'une procédure contradictoire garantissant les droits à la défense, les premiers juges se sont bornés à indiquer qu'" Aucun autre moyen soulevé par le requérant n'est susceptible d'emporter l'annulation des décisions en litige. ", sans répondre aux moyens visés, au demeurant, dans le jugement litigieux. Par conséquent, M. B... est fondé à soutenir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens contestant la régularité du jugement attaqué, ce jugement est irrégulier et doit être annulé. Il y a lieu pour la cour de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Lyon.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Si M. B... fait valoir que d'autres illégalités fautives sont susceptibles d'être retenues tenant, d'une part, à l'impossibilité pour GEM de calculer une moyenne pour les deux épreuves de la session de rattrapage de la Toussaint 2012, d'autre part, à l'irrégularité des conditions d'obtention du diplôme qui lui ont été opposées ou encore celles tirées de la rupture d'égalité entre les candidats, de la discrimination et de l'impossibilité de bénéficier d'un règlement adapté à sa situation, il ne résulte pas de l'instruction, que ces prétendues fautes résultant de l'illégalité des décisions du 15 novembre 2012, du 7 décembre 2012 et du 21 novembre 2013 seraient de nature à engager la responsabilité de l'établissement. De même, en se bornant à soutenir, d'une part, que les décisions du 15 novembre 2012, du 7 décembre 2012 et du 21 novembre 2013 sont entachées d'erreur de fait en l'absence de communication des notes obtenues lors de la session de rattrapage d'octobre 2012, d'autre part, de ce que lesdites décisions sont entachées d'un vice de procédure faute d'avoir été précédées d'une procédure contradictoire garantissant les droits de la défense, M. B... ne démontre pas l'existence d'une faute de la part de GEM.

5. Le règlement des études " programme grande école " précise que le règlement est applicable à tous les élèves suivant tout ou partie du programme. M. B..., qui a été admis en 3ème année du programme grande école, fait valoir que le règlement d'études de l'établissement était imprécis et contradictoire pour s'appliquer à sa situation et qu'il devait " faire le tri " pour savoir quelles dispositions lui étaient applicables, notamment en l'absence de renvoi à l'article 3.3.3 du règlement intérieur, l'article 2.1 n'étant pas exclu et l'article 5.4 étant inapplicable en l'état. Toutefois, la seule circonstance que certains articles du règlement n'étaient pas applicables à l'intéressé ne peut avoir pour effet de rendre irrégulières les conditions d'obtention de son diplôme. En outre, l'appelant ne peut utilement se prévaloir de la circonstance qu'il avait obtenu de bons résultats au cours de l'année, qui auraient dû conduire le jury à délivrer le diplôme sollicité, dès lors que l'article 5.4 " tableau des coefficients " du règlement des études prévoit : " Pour obtenir son diplôme, l'étudiant doit avoir obtenu une moyenne minimale de 12/20 sur l'ensemble des évaluations de sa scolarité tout en respectant les conditions suivantes : avoir validé avec 10/20 minimum l'ensemble des modules d'enseignement au management (...) ". Par suite, les décisions refusant de lui attribuer le diplôme étaient légalement justifiées par le non-respect de la condition de validation avec la note de 10/20 pour les modules d'enseignement au management. Enfin, M. B... ne peut, pas plus, se prévaloir du bénéficie de la convention signée entre GEM et l'Université Pierre-Mendès-France le 20 septembre 2010, laquelle a pour objet de régir les seules relations contractuelles entre ces deux personnes morales.

6. Si M. B... soutient que le jugement attaqué est entaché d'erreur de fait et de contradiction par rapport au jugement du 15 juin 2017, lequel précise que la chambre de commerce et d'industrie de Grenoble n'a pas versé les notes obtenues aux examens de rattrapage, alors que le jugement en discussion a indiqué " qu'il résulte de l'instruction que M. B... a eu communication des notes obtenues aux examens de rattrapage, toutes deux inférieures à la moyenne ", il résulte de l'instruction, notamment des propres déclarations de l'appelant dans le cadre de l'instance n° 1706560, qu'il a obtenu, la note de 8,5 en "Gouvernement d'entreprise" au lieu de 9,57 et la note de 5 en "Décisions avancées" au lieu de 2,5. En tout état de cause, ces notes, inférieures à la moyenne, ne permettaient pas à M. B... d'obtenir son diplôme.

7. Dans ces conditions, la demande d'indemnité présentée par M. B..., lequel a eu la possibilité de passer à trois reprises les épreuves de rattrapage et qui ne démontre pas qu'il a perdu une chance sérieuse d'obtenir le diplôme, ne peut qu'être rejetée, sans que le fait qu'il ait été exclu de la liste des anciens élèves ne soit de nature à établir un quelconque lien de causalité entre les prétendues illégalités fautives et les préjudices invoqués.

8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les conclusions incidentes de la CCI de Grenoble, que M. B... n'est pas fondé à demander la condamnation de l'établissement d'enseignement supérieur consulaire GEM ou de la CCI de Grenoble en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Grenoble, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 500 euros à verser à la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Grenoble, au titre des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1703349 du tribunal administratif de Lyon du 4 avril 2019 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : M. B... versera à la chambre de commerce et d'industrie de Grenoble une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la chambre de commerce et d'industrie de Grenoble et à l'établissement d'enseignement supérieur consulaire Grenoble école de management.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2022, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2022.

2

N° 19LY02160


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY02160
Date de la décision : 16/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

30-01-04-02 Enseignement et recherche. - Questions générales. - Examens et concours. - Jury.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : RENAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-03-16;19ly02160 ?
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