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03/03/2022 | FRANCE | N°20LY03327

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 03 mars 2022, 20LY03327


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du maire de Saint-Ilpize du 9 février 2020 portant non-opposition avec prescriptions à la déclaration préalable de travaux présentée par M. C... A... pour la construction d'un abri de jardin sur un terrain situé au lieu-dit " Tapon " à Saint-Ilpize.

Par une ordonnance n° 2000710 du 11 septembre 2020, la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procé

dure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 novembre 2020 et 4 j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du maire de Saint-Ilpize du 9 février 2020 portant non-opposition avec prescriptions à la déclaration préalable de travaux présentée par M. C... A... pour la construction d'un abri de jardin sur un terrain situé au lieu-dit " Tapon " à Saint-Ilpize.

Par une ordonnance n° 2000710 du 11 septembre 2020, la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 novembre 2020 et 4 janvier 2022, Mme D..., représentée par Me Danckaert, doit être regardée comme demandant à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2000710 du 11 septembre 2020 ainsi que l'arrêté susvisés ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Ilpize la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme D... soutient que :

- elle subit un préjudice visuel constitué par la vue qu'elle aura sur le futur abri de jardin d'une hauteur de 3,60 mètres et qui surplombera de 6 mètres la parcelle 588 qui lui appartient, un trouble de jouissance et un préjudice économique dès lors que sa propriété subira une moins-value substantielle causée par la construction projetée ;

- le dossier de demande de déclaration présenté par le pétitionnaire était insuffisant puisqu'il ne comprenait pas de plan en coupe précisant la hauteur du terrain ni le document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet par rapport aux constructions existantes ;

- la terrasse sur laquelle s'implante l'abri étant illégale, le maire ne pouvait délivrer l'arrêté sans avoir préalablement demandé au pétitionnaire de régulariser la construction de la terrasse.

Par quatre mémoires, enregistrés les 26 février 2021, 14 décembre 2021, 22 décembre 2021 et 25 janvier 2022, la commune de Saint-Ilpize, représentée par Me Brun, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme D... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que la requête est irrecevable et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées le 23 novembre 2021, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrégularité de l'ordonnance n° 2000710 du 11 septembre 2020 attaquée (irrégularité dans la composition de la formation de jugement) dès lors qu'elle a écarté à tort comme inopérant le moyen tiré de l'irrégularité de la construction de la terrasse de M. A... sur laquelle s'implante l'abri de jardin.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, rapporteur,

- les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me Brun, pour la commune de Saint-Ilpize.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., propriétaire d'une maison d'habitation et d'un jardin de 53 m² situés sur les parcelles cadastrées n° 581 et 588 au lieu-dit " Tapon " dans la commune de Saint-Ilpize, relève appel de l'ordonnance par laquelle la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 février 2020 portant non-opposition à déclaration préalable délivré par le maire de la commune autorisant M. A... à construire un abri de jardin sur la parcelle cadastrée section B n°1648 au lieu-dit " Tapon ", mitoyenne de la parcelle n°588.

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

2. Si la commune de Saint-Ilpize fait valoir en défense que la requête présentée par Mme D... est irrecevable dès lors qu'elle ne présente aucun moyen dirigé contre l'ordonnance attaquée ni ne présente de conclusions tendant à l'annulation de celle-ci, il ressort de la requête d'appel que Mme D... soulève de nouveaux moyens opérants à l'encontre de l'arrêté en litige et qu'elle doit ainsi être regardée comme demandant l'annulation de l'ordonnance susvisée. La fin de non-recevoir opposée en défense doit ainsi être écartée.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

3. Le moyen, soulevé par Mme D... devant le tribunal, tiré de ce que la terrasse sur laquelle l'abri de jardin à construire par M. A... aurait été construite illégalement sans permis de construire n'est pas inopérant, contrairement à ce qu'a relevé le premier juge. Par suite, c'est à tort que, sur le fondement du 7°) de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande présentée par Mme D... faute de moyen opérant soulevé. Le jugement de cette demande relevait ainsi d'une formation collégiale de ce tribunal. Il suit de là que ce jugement a été rendu par une formation de jugement irrégulièrement composée. Il y a, dès lors, lieu de l'annuler, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme D... devant le tribunal.

Sur la légalité de l'arrêté du 9 février 2020 du maire de Saint-Ilpize :

4. En premier lieu, si Mme D... se prévaut d'un préjudice de pertes de vue et d'ensoleillement causé par l'abri autorisé ainsi que d'un préjudice financier en raison de la perte de valeur vénale de son bien, de telles circonstances sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté en litige dès lors que les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, sont accordées sous réserve du droit des tiers.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R*431-36 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la déclaration comprend : / a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; / b) Un plan de masse coté dans les trois dimensions lorsque le projet a pour effet de créer une construction ou de modifier le volume d'une construction existante ; / c) Une représentation de l'aspect extérieur de la construction faisant apparaître les modifications projetées et si le projet a pour effet de modifier celui-ci ; / d) Le justificatif de dépôt de la demande d'autorisation prévue à l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile lorsque le projet porte sur une construction susceptible, en raison de son emplacement et de sa hauteur, de constituer un obstacle à la navigation aérienne. / (...) Lorsque la déclaration porte sur un projet de création ou de modification d'une construction et que ce projet est visible depuis l'espace public ou que ce projet est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, le dossier comprend également les documents mentionnés aux c et d de l'article R. 431-10. " Aux termes de l'article R*431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : / (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. "

6. La circonstance que le dossier de déclaration préalable de travaux ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions précitées du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité la décision de non-opposition à déclaration préalable que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

7. Contrairement à ce que soutient la requérante, les dispositions de l'article R. 431-36 précitées du code de l'urbanisme n'imposaient pas au pétitionnaire de préciser l'altitude du terrain en cause. En outre, il ressort des pièces du dossier que l'abri de jardin en litige sera pour partie visible depuis l'espace public, en l'espèce le chemin communal situé entre les parcelles n°580 et n°588, de sorte qu'en application de l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme, un document graphique ainsi que deux photographies permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche devaient être joints à la déclaration, ce qui a été fait en l'espèce, sans que les photographies produites ne fassent état de la vue depuis le jardin de la requérante. Toutefois, il se déduit de la modestie des travaux en cause et de l'ensemble des plans et photographies joints à la déclaration que le service instructeur disposait de suffisamment d'éléments permettant d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

8. En dernier lieu, si Mme D... soulève un moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le maire de la commune dès lors que la hauteur réelle de la construction n'est pas mentionnée, le dossier de déclaration préalable comportait un plan de l'abri de jardin en litige mentionnant la hauteur de la construction. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient l'appelante, que l'abri de jardin en litige aurait pour terrain d'assiette une terrasse dont l'aménagement aurait été effectué par des travaux non déclarés ou non autorisés par l'autorité compétente. Il ressort au contraire des photographies produites de la parcelle n°589 que la partie de parcelle en litige, sur laquelle doit s'implanter l'abri de jardin en cause, est actuellement enherbée. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la terrasse du pétitionnaire sur laquelle s'implantera l'abri de jardin ayant été irrégulièrement construite, le maire de la commune ne pouvait prendre la décision litigieuse.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 9 février 2020 portant non-opposition à déclaration préalable délivré par le maire de la commune de Saint-Ilpize autorisant M. A... à construire un abri de jardin sur la parcelle cadastrée section B n°1648 au lieu-dit " Tapon ".

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Saint-Ilpize qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Mme D... la somme demandée par celle-ci au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Saint-Ilpize sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2000710 du 11 septembre 2020 de la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulée.

Article 2 : La demande de Mme D... présentée devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Ilpize sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D..., à M. C... A... et à la commune de Saint-Ilpize.

Délibéré après l'audience du 3 février 2022 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, président assesseur,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 mars 2022.

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N°20LY03327


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03327
Date de la décision : 03/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : CABINET ALTERNATIVES AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-03-03;20ly03327 ?
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