Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 1er septembre 2020 par lequel le préfet du Rhône lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2006933 du 29 janvier 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 26 février 2021, M. B..., représenté par Me Bescou, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 1er septembre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ou à tout le moins de procéder au réexamen de sa situation et ce, dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le préfet n'a pas procédé à un examen préalable, réel et sérieux de sa situation avant de lui opposer un refus de titre de séjour ; le préfet s'est manifestement contenté de s'approprier l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ; le jugement est insuffisamment motivé sur ce point ;
- le refus de titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant à quatre-vingt-dix jours le délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité de la décision sur laquelle elle se fonde ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant le titre de séjour et de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire ;
- elle méconnaît les articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lesieux, premier conseiller,
- et les observations de Me Sabatier, représentant M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant de la République démocratique du Congo né en 1974, est entré en France le 16 juillet 2015 selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 31 octobre 2016 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 3 juillet 2017 par la Cour nationale du droit d'asile. Dans l'intervalle, l'intéressé a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé, qui lui a été accordé sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, et renouvelé jusqu'au 16 décembre 2019. M. B... relève appel du jugement du 29 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 1er septembre 2020 lui refusant le renouvellement de ce titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et fixant le pays de destination.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". En relevant au point 3 de leur jugement qu'il ne ressort ni des termes de la décision attaquée ni des pièces du dossier que le préfet du Rhône ne se serait pas livré à un examen particulier et attentif de la situation personnelle du requérant, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par M. B..., ont suffisamment répondu au moyen soulevé devant eux.
Sur la légalité de l'arrêté du 1er septembre 2020 :
3. En premier lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier, ni des termes de l'arrêté contesté, qui fait état des conditions d'entrée et de séjour en France de M. B..., de la circonstance qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ainsi que de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 15 juin 2020, que le préfet du Rhône n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé avant de lui opposer un refus de renouvellement de son titre de séjour.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes du 10° de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
5. Par son avis du 15 juin 2020, le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. B..., qui souffre d'un cancer pulmonaire, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Pour contester le refus de renouvellement de son titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français pris par le préfet du Rhône au vu de cet avis, M. B... soutient que la prise en charge de sa pathologie est insuffisante en République démocratique du Congo, que le premier centre public de radiothérapie a été inauguré en 2020 et qu'il est originaire de Matadi, commune située à plus de 350 km de Kinshasa où ce centre est implanté. Ces éléments sont toutefois insuffisants à démontrer qu'il ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur version alors en vigueur, dirigés respectivement contre la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français doivent être écartés.
6. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur ni que le préfet du Rhône a entendu examiner sa situation au regard de ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance doit être écarté comme inopérant.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. M. B... fait valoir qu'il a toujours résidé régulièrement en France, qu'il exerce une activité professionnelle, qu'il dispose de son propre logement, qu'il maîtrise la langue française, qu'il est suivi médicalement et qu'il a noué des relations sociales et amicales. Toutefois, l'intéressé, qui ne démontre pas ne pas pouvoir bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en République démocratique du Congo, est entré en France à l'âge de quarante-et-un an après avoir vécu l'essentiel de sa vie dans son pays d'origine où résident son épouse et ses trois enfants mineurs. Dès lors, en lui opposant un refus de titre de séjour et une obligation de quitter le territoire français, le préfet du Rhône n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Le préfet du Rhône n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
9. En cinquième lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français. Il n'est pas non plus fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant à quatre-vingt-dix jours le délai de départ volontaire et contre celle fixant le pays de destination.
10. En dernier lieu, aux termes des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi (...) " et " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
11. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 du présent arrêt, dès lors que M. B... n'établit pas qu'il ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en République démocratique du Congo, qu'un retour dans son pays d'origine ne l'exposerait pas à un risque de subir des traitements contraires aux stipulations précitées.
12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des frais du litige doivent en conséquence être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Evrard, présidente de la formation de jugement,
Mme Caraës, première conseillère,
Mme Lesieux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 février 2022.
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N° 21LY00637