Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler, d'une part, la décision du 4 mai 2018 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé son licenciement ainsi que le rejet de son recours hiérarchique, né le 3 novembre 2018, d'autre part, la décision du 1er mars 2019 par laquelle la ministre du travail, retirant le rejet implicite de recours hiérarchique, a annulé la décision du 4 mai 2018 de l'inspectrice du travail et a autorisé son licenciement.
Par un jugement n° 1808562, 1902883 lu le 23 juin 2020, le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande d'annulation de la décision de l'inspectrice du travail du 4 mai 2018 et du rejet implicite de recours hiérarchique, et a annulé la décision de la ministre du travail du 1er mars 2019, en tant qu'elle autorise le licenciement de M. A....
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 août et 14 décembre 2020, la clinique Monts du Forez, représentée par Me Cherif, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il annule la décision du 1er mars 2019 en ce qu'elle a autorisé le licenciement de M. A... ;
2°) de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la ministre du travail a examiné le lien avec le mandat lors de la contre-enquête ;
- la décision de la ministre n'est pas tardive ;
- l'inspecteur du travail n'a pas méconnu le principe du contradictoire ;
- la matérialité et la gravité des faits reprochés au salarié sont avérés ;
- il n'y a pas de lien avec le mandat.
Par un mémoire enregistré le 14 octobre 2020, M. A..., représenté par Me Peyrard, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la clinique Monts du Forez une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Par un mémoire enregistré le 2 février 2021, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion s'en remet à la sagesse de la cour.
Par une ordonnance du 8 décembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 10 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ;
- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
- et les observations de Me Cherif pour la clinique Monts du Forez, ainsi que celles de Me Peyrard pour M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Par jugement du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé pour défaut de motivation et défaut d'examen du lien entre le licenciement avec les fonctions représentatives de M. A..., la décision du 1er mars 2019 par laquelle la ministre du travail a autorisé la société clinique Monts du Forez à licencier M. A... pour motif disciplinaire. La clinique Monts du Forez relève appel de ce jugement en tant qu'il annule la décision du 1er mars 2019 en ce qu'elle a autorisé le licenciement de M. A....
2. En vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale. Lorsque, comme en l'espèce, la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution du mandat dont il est investi.
3. Il résulte du rapport de contre-enquête rédigé, le 8 octobre 2018, pour les besoins de l'instruction du recours hiérarchique de M. A..., que l'existence d'un rapport éventuel entre le projet de licenciement et l'exercice des fonctions représentatives de l'intéressé a été recherchée au cours de la contre-enquête, dont la ministre s'est appropriée les conclusions. La clinique Monts du Forez est donc fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a regardé comme fondé le moyen tiré du défaut d'examen du lien entre la demande de licenciement et les fonctions représentatives du salarié.
4. Toutefois et d'une part, aux termes de l'article R. 2421-5 du code du travail applicable à la décision du ministre du travail statuant sur recours hiérarchique : " (...) La décision de l'inspecteur du travail est motivée (...) ". D'autre part, aux termes de l'article R. 2422-1 du même code du travail : " Le ministre chargé du travail peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours (...) du salarié (...) ", tandis qu'aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) ".
5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions et des principes rappelés au point 2 que lorsque le ministre, saisi d'un recours hiérarchique, statue de nouveau sur la demande d'autorisation de licenciement, sa décision est soumise aux mêmes obligations de motivation que la décision de l'inspecteur du travail qu'il annule. Il doit donc exposer les motifs qui le conduisent à regarder la faute comme matériellement établie et d'un degré de gravité suffisante, mais aussi à écarter le lien entre l'exercice de l'activité représentative du salarié et la demande de l'employeur.
6. Or, il ressort des pièces du dossier que la ministre du travail après avoir annulé la décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement pour non-respect du contradictoire, a de nouveau autorisé par décision du 1er mars 2019 le licenciement en raison du comportement inapproprié de M. A... envers plusieurs stagiaires, sans exposer en quoi la demande de l'employeur ne pouvait être regardée comme liée au mandat exercé par l'intéressé.
7. Il suit de là que la décision litigieuse ne répond aux exigences des dispositions citées au point 4 et que ce vice suffisait à entraîner l'annulation prononcée en première instance. Dès lors, la clinique Monts du Forez n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal a annulé la décision du 1er mars 2019 et les conclusions doivent être rejetées.
8. M. A... n'étant pas la partie perdante, les conclusions de la clinique Monts du Forez présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... en application de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la clinique Mont du Forez est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la clinique Mont du Forez, à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et à M. B... A....
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.
N° 20LY02228 2