Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon :
- d'une part, d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2020 par lequel le préfet de l'Ain a décidé sa remise aux autorités italiennes et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée de deux ans ;
- d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Ain de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.
Par jugement n° 2000278 du 8 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par requête, enregistrée le 29 juillet 2020, présentée pour M. B..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 2000278 du tribunal administratif de Lyon du 8 juin 2020 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt et après remise d'une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de remise aux autorités italiennes est illégale dès lors que le préfet a méconnu le droit à un recours effectif en exécutant d'office la mesure en litige, en violation de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, en dépit du recours formé devant le tribunal administratif ;
- la décision de remise méconnaît le 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son droit à une vie privée et familiale, eu égard à la durée de sa présence habituelle et continue sur le territoire français ;
- dès lors qu'il est titulaire d'un titre de séjour en Italie équivalent à une carte de résident portant la mention " résident de longue durée - UE ", le préfet ne pouvait assortir la décision de remise d'une interdiction de circulation sans démontrer que son séjour constituerait une menace pour l'ordre public ni en quoi il aurait commis un abus de droit, au regard des dispositions du II de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par mémoire, enregistré le 21 janvier 2021, la préfète de l'Ain conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Seillet, président assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 30 décembre 1968 à Metkaouak (Algérie), titulaire d'une carte de séjour italienne, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 13 janvier 2020 par lequel le préfet de l'Ain a décidé sa remise aux autorités italiennes et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Sur la décision de remise aux autorités italiennes :
2. Aux termes des dispositions alors codifiées au I de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " " I. - (...) l'étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1 et L. 311-1 peut être remis aux autorités compétentes de l'État membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les États membres de l'Union européenne, en vigueur au 13 janvier 2009. / L'étranger visé au premier alinéa est informé de cette remise par décision écrite et motivée prise par une autorité administrative définie par décret en Conseil d'État. / Cette décision peut être exécutée d'office par l'administration après que l'étranger a été mis en mesure de présenter des observations et d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. "
3. En premier lieu, M. B... ne peut utilement se prévaloir, pour contester la décision de remise aux autorités italiennes en litige, de la circonstance, sans incidence sur la légalité de cette décision, que le préfet de l'Ain a procédé d'office à l'exécution de cette mesure, alors même qu'il avait saisi le tribunal administratif de Lyon d'un recours, alors, au demeurant, qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard aux effets et aux conditions d'exécution d'une décision de remise d'un étranger aux autorités compétentes d'un autre État membre, cette décision peut être exécutée d'office, sous la seule réserve que la personne concernée ait été mise à même de présenter utilement des observations et d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix préalablement à l'exécution de la décision.
4. En deuxième lieu, M. B... se prévaut de sa présence en France dont il affirme qu'elle est continue depuis 2007, et des attaches dont il y dispose. Toutefois, outre que les pièces qu'il produit établissent seulement une présence ininterrompue sur le territoire français, il ressort des pièces du dossier et, en particulier, de son audition par les services de police, que son épouse et ses enfants mineurs, dont les deux derniers sont nés en Algérie en 2007 et 2013, résident dans ce pays alors qu'il en ressort également qu'il a fait l'objet de deux mesures d'éloignement, les 8 octobre 2015 et 13 avril 2017, dont la légalité a été confirmée par le juge administratif et qu'il n'a pas exécutées. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige porterait au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
5. En dernier lieu, M. B... ne peut utilement se prévaloir d'une méconnaissance des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 (4°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives à la carte de séjour temporaire délivrée à un étranger marié avec un ressortissant de nationalité française, dans le champ d'application duquel il n'entre pas eu égard à sa nationalité algérienne, dès lors que la décision en litige n'a pas pour objet de refuser de lui délivrer un titre de séjour suite à une demande qu'il aurait formulée.
Sur l'interdiction de circulation sur le territoire français :
6. Aux termes des dispositions alors codifiées au II de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par décision motivée, assortir la décision de remise prise en application du premier alinéa du I à l'encontre d'un étranger titulaire d'un titre de séjour dans un autre État membre de l'Union européenne d'une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée maximale de trois ans. Toutefois, cette interdiction de circulation sur le territoire français n'est applicable à l'étranger détenteur d'une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " en cours de validité accordée par un autre État membre (...) que lorsque leur séjour en France constitue un abus de droit ou si leur comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. Le prononcé et la durée de l'interdiction de circulation sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
7. Il ressort des pièces du dossier que, si M. B... se prévaut d'une carte de séjour, délivrée en 2004 portant, en italien, la mention " carta di soggiorno per stranieri ", qui lui a été délivrée pour une durée indéterminée par les autorités italiennes mais dont il a au demeurant indiqué, lors de son audition par les services de police le 12 janvier 2020, qu'elle avait expiré en 2014 sans qu'il en demande le renouvellement, il n'est pas détenteur d'une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " pour l'application des dispositions précitées. Dès lors, M. B... ne peut utilement soutenir que le préfet de l'Ain n'a pas démontré que sa présence en France constituerait un abus de droit ou une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour l'ordre public ou la sécurité publique ni, par suite, que ne sont pas remplies les conditions posées par ces dispositions pour permettre à l'autorité préfectorale de prendre une mesure d'interdiction de circulation à l'encontre d'un étranger titulaire d'une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE ". Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en lui faisant interdiction de circuler sur le territoire français, le préfet de l'Ain a méconnu les dispositions précitées.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'État d'une somme au titre des frais liés au litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.
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N° 20LY02099