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10/02/2022 | FRANCE | N°19LY03524

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 10 février 2022, 19LY03524


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Lyon, par deux requêtes distinctes, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011, d'une part, et 2012 et 2013, d'autre part, ainsi que des pénalités correspondantes, et de mettre à la charge de l'Etat, dans chaque instance, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jug

ement n° 1801815-1801816 du 9 juillet 2019, le tribunal administratif de Lyon a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Lyon, par deux requêtes distinctes, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011, d'une part, et 2012 et 2013, d'autre part, ainsi que des pénalités correspondantes, et de mettre à la charge de l'Etat, dans chaque instance, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1801815-1801816 du 9 juillet 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 septembre 2019 et le 25 mai 2020, M. et Mme D..., représentés par la Selarl Cabinet Champauzac, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge partielle, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils peuvent bénéficier de l'avantage fiscal de l'article 199 decies E du code général des impôts, au titre de leur logement acquis neuf, loué pour une durée minimale de neuf ans et situé dans une résidence de tourisme, édifiée sur un terrain compris, au jour de son acquisition par le vendeur, dans une zone de revitalisation rurale ; ils peuvent en particulier se prévaloir, s'agissant du caractère neuf, de la mesure de tolérance prévue au BOI-IR-RICI-50-10-10-20120912 ainsi que, s'agissant de la localisation en zone de revitalisation urbaine, du rescrit fiscal n° 2006/53, et les documents exigés par l'article 46 AGD de l'annexe III du code général des impôts peuvent, par ailleurs, être produits postérieurement par voie de réclamation ;

- s'agissant des revenus fonciers, les attestations de la société Rexel, selon lesquelles les articles visés par les factures étaient bien destinés à équiper leur bien loué dans le 3ème arrondissement de Lyon, suffisent à établir le lien entre les factures et l'appartement loué.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 31 mars 2020 et le 1er décembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code du tourisme ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'arrêté du 30 décembre 2005 modifié constatant le classement des communes en zone de revitalisation rurale ;

- l'arrêté du 9 avril 2009 modifié constatant le classement de communes en zone de revitalisation rurale ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Frapper, première conseillère,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un contrôle sur pièces des déclarations de revenus de M. et Mme D... pour les années 2011, 2012 et 2013, l'administration fiscale leur a adressé une proposition de rectification contradictoire le 12 novembre 2014. Certaines rectifications ont été ultérieurement abandonnées compte tenu des justificatifs produits, mais la réponse aux observations du contribuable du 26 janvier 2015 a notamment maintenu la remise en cause d'une réduction d'impôt au titre d'un investissement locatif dans le secteur touristique ainsi que le rejet de charges pour la détermination des revenus fonciers. Après mise en recouvrement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties de pénalités, auxquelles M. et Mme D... ont alors été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, puis rejet partiel de leur réclamation préalable, les contribuables ont saisi le tribunal administratif de Lyon de demandes devant être regardées comme tendant à la décharge, en droits et pénalités, des impositions supplémentaires maintenues à leur charge au titre des trois années en litige. Ils relèvent appel du jugement du 9 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'investissement locatif en zone de revitalisation rurale :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 199 decies E du code général des impôts : " Tout contribuable qui (...) acquiert un logement neuf ou en l'état futur d'achèvement faisant partie d'une résidence de tourisme classée dans une zone de revitalisation rurale et qui le destine à une location dont le produit est imposé dans la catégorie des revenus fonciers bénéficie d'une réduction d'impôt sur le revenu (...). / Elle est accordée au titre de l'année d'achèvement du logement ou de son acquisition si elle est postérieure (...). / Le propriétaire doit s'engager à louer le logement nu pendant au moins neuf ans à l'exploitant de la résidence de tourisme. Cette location doit prendre effet dans le mois qui suit la date d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition, si elle est postérieure (...) ".

3. Il résulte de l'instruction que M. et Mme D... ont acquis de la SARL Martine, par acte du 31 décembre 2010, un appartement à usage d'habitation compris dans la résidence de tourisme dénommée " Le Pradella II " située à Bolquère (Pyrénées Orientales), dont la construction, autorisée par un permis de construire du 27 septembre 2006, a été déclarée achevée le 12 décembre 2007. M. et Mme D... ayant procédé le 31 décembre 2010, ainsi que le précise l'acte de vente, à la première acquisition de l'immeuble en cause, résultant d'une construction nouvelle achevée depuis moins de cinq années, ils remplissent la condition d'acquisition d'un logement neuf au sens de la loi fiscale, alors même que le vendeur avait consenti à l'exploitant de la résidence un bail sur ce lot antérieurement à la vente, sans qu'il soit besoin d'examiner si les requérants peuvent également se prévaloir d'une interprétation administrative de la loi fiscale sur ce point.

4. En deuxième lieu, aux termes des dispositions d'ordre public de l'article L. 145-14 du code de commerce, relatif aux baux commerciaux : " La durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans ".

5. Par acte sous seing privé du 31 octobre 2010, M. et Mme D... ont consenti à la société Cosysnow, alors exploitante de la résidence de tourisme, un bail commercial d'une durée de onze années entières et consécutives devant être conclu à la date de l'acquisition, soit le 31 décembre 2010, avec effet au 1er juillet 2009. Postérieurement à la résiliation de ce bail à l'initiative du preneur, ils ont consenti le 29 novembre 2012 à la SARL Amorgos un nouveau bail commercial à effet au 1er décembre. Nonobstant toute stipulation contraire, la durée de ce nouveau bail ne pouvait être inférieure à neuf ans en vertu des dispositions précitées. Il résulte par ailleurs de l'instruction que M. et Mme D... ont fourni au soutien de leur réclamation préalable un engagement de location d'une durée de neuf années à compter du 1er janvier 2011. Par suite, les requérants remplissent la condition relative à la durée de location minimale pour pouvoir prétendre au bénéfice de la réduction d'impôt en litige.

6. En dernier lieu, si M. et Mme D... ne contestent pas qu'à la date de leur acquisition, la commune de Bolquère n'était mentionnée ni par l'arrêté du 9 avril 2009 constatant le classement des communes en zone de revitalisation rurale, ni par l'arrêté modificatif du 30 décembre 2010, de sorte qu'ils ne remplissent pas la condition de localisation du bien pour l'application de la loi fiscale, ils invoquent toutefois, sur le fondement du 1° de l'article L. 80B du livre des procédures fiscales, un rescrit fiscal 2006/53 publié le 24 octobre 2006 qui prévoit que : " Cela étant, dans un souci de sécurité juridique, il paraît possible d'admettre que ces avantages fiscaux s'appliquent, toutes les autres conditions étant par ailleurs remplies : / - aux acquisitions de logements neufs ou en état futur d'achèvement situés dans une résidence de tourisme édifiée sur un terrain compris, au jour de son acquisition par le vendeur, dans une zone de revitalisation rurale (CGI, art. 199 decies E) ; (...) / Ces précisions sont applicables aux investissements réalisés à compter du 1er janvier 2006 ".

7. Il résulte de l'instruction que la SARL Martine, vendeur du bien dans lequel ont investi M. et Mme D..., avait elle-même acquis le terrain d'assiette de l'immeuble le 31 août 2007. A cette date, l'arrondissement de Prades, dont fait partie la commune de Bolquère, était intégralement classé en zone de revitalisation rurale, par un arrêté du 30 décembre 2005 constatant le classement des communes en zone de revitalisation rurale, inchangé sur ce point par les arrêtés modificatifs intervenus ultérieurement. Par suite, M. et Mme D... sont fondés à soutenir qu'ils remplissent la condition de localisation, telle qu'interprétée par la documentation administrative.

8. Par suite, les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant au bénéfice de la réduction d'impôt prévue par les dispositions de l'article 199 decies E du code général des impôts.

En ce qui concerne les revenus fonciers :

9. M. et Mme D... reprennent en appel leur moyen tiré de ce qu'ils justifieraient de manière suffisante, pour la détermination de leurs revenus fonciers, de la réalité de charges, rejetées par l'administration fiscale, relatives à un appartement situé à Lyon. Il y a lieu pour la cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... sont seulement fondés à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013 du fait de la remise en cause du bénéfice de la réduction d'impôt au titre d'un investissement locatif dans le secteur touristique prévu à l'article 199 decies E du code général des impôts, ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur les frais liés au litige :

11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, le versement à M. et Mme D... d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme D... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013 du fait de la remise en cause du bénéfice de la réduction d'impôt relative à l'investissement locatif dans le secteur touristique prévue à l'article 199 decies E du code général des impôts, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 2 : Le jugement n° 1801815-1801816 du 9 juillet 2019 du tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme D... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et Mme A... B... épouse D... ainsi qu'au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 février 2022.

2

N° 19LY03524


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03524
Date de la décision : 10/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Établissement de l'impôt - Réductions et crédits d`impôt.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Mathilde LE FRAPPER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SELARL CABINET CHAMPAUZAC

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-02-10;19ly03524 ?
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