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03/02/2022 | FRANCE | N°20LY00875

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 03 février 2022, 20LY00875


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner l'État à leur verser la somme de 40 000 euros chacun en réparation du préjudice moral subi du fait du décès en prison par suicide de leur frère Mustapha C....

Par un jugement n° 1704194 du 19 décembre 2019, ce tribunal a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 février 2020, M. E... et Mme C..., représentés par Me Gallo, demandent à la cour :>
1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'État à verser à chacun la somme de 40 000 euros en ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner l'État à leur verser la somme de 40 000 euros chacun en réparation du préjudice moral subi du fait du décès en prison par suicide de leur frère Mustapha C....

Par un jugement n° 1704194 du 19 décembre 2019, ce tribunal a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 février 2020, M. E... et Mme C..., représentés par Me Gallo, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'État à verser à chacun la somme de 40 000 euros en réparation de leur préjudice moral respectif ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à chacun au titre des frais du litige.

Ils soutiennent que M. D... C..., dont la pathologie psychiatrique, connue de l'administration pénitentiaire, présageait un passage à l'acte imminent, n'a pas fait l'objet d'une surveillance pénitentiaire renforcée et d'une surveillance médicale pendant son placement en quartier disciplinaire.

Un mémoire enregistré le 7 janvier 2022 présenté pour le garde des sceaux, ministre de la justice, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Michel,

- et les conclusions de M. Savouré, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... C..., qui était écroué depuis le 25 avril 2016 en détention provisoire à la maison d'arrêt de Grenoble-Varces, a été retrouvé mort par pendaison dans sa cellule du quartier disciplinaire de la maison d'arrêt le 30 mai 2016. Mme C..., sa sœur, et M. E..., son frère, ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner l'État à leur verser la somme de 40 000 euros chacun en réparation du préjudice moral du fait de ce suicide, qu'ils attribuent à une faute de l'administration pénitentiaire. Par un jugement du 19 décembre 2019 dont ils relèvent appel, ce tribunal a rejeté leur demande.

2. La responsabilité de l'État en cas de préjudice matériel ou moral résultant du suicide d'un détenu peut être recherchée pour faute des services pénitentiaires en raison notamment d'un défaut de surveillance ou de vigilance. Une telle faute ne peut toutefois être retenue qu'à la condition qu'il résulte de l'instruction que l'administration n'a pas pris, compte tenu des informations dont elle disposait, en particulier sur les antécédents de l'intéressé, son comportement et son état de santé, les mesures que l'on pouvait raisonnablement attendre de sa part pour prévenir le suicide. À l'appui d'une action en responsabilité engagée contre l'État du fait des services pénitentiaires en cas de dommages résultant du suicide d'un détenu, les ayants droits de ce détenu peuvent utilement invoquer une faute du personnel de santé de l'unité de consultations et de soins ambulatoires de l'établissement public de santé auquel est rattaché l'établissement pénitentiaire s'il s'avère que cette faute a contribué à la faute du service public pénitentiaire.

3. Il résulte de l'instruction que M. C..., souffrant de schizophrénie de type paranoïde, a fait l'objet pour ce motif dès le 25 avril 2016 et jusqu'au jour de son décès d'une surveillance pénitentiaire et médicale spécifique. S'il a tenu pour la première et unique fois des propos suicidaires le jour de son placement, après l'agression d'une surveillante, en quartier disciplinaire à titre préventif, qui ont justifié l'attribution le 18 mai 2016 de la dotation de protection d'urgence, cette mesure a été levée le lendemain après une réévaluation pénitentiaire et médicale de son état. Jusqu'au jour de son suicide, aucun changement majeur dans son comportement n'a été constaté par l'infirmière et le médecin de l'unité de consultations et de soins ambulatoires de la maison d'arrêt qui l'ont vu les 19, 20 et 23 mai 2016 et par le personnel pénitentiaire, y compris lors de son dernier repas au cours duquel il a parlé et plaisanté avec un officier pénitentiaire. Son comportement ne pouvait ainsi laisser présager un passage à l'acte imminent et n'imposait pas la levée de son placement en quartier disciplinaire. Aucune faute de négligence dans la prévention de son acte ne peut ainsi être reprochée au personnel pénitentiaire et au personnel de santé de l'unité de soins ambulatoires de la maison d'arrêt de Grenoble-Varces de nature à engager la responsabilité de l'État.

4. Il résulte de ce qui précède que M. E... et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande. Leur requête doit donc être rejetée, en toutes ses conclusions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Mme A... C... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, présidente assesseure,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 février 2022.

2

N° 20LY00875


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00875
Date de la décision : 03/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Juridictions administratives et judiciaires - Exécution des jugements - Exécution des peines - Service public pénitentiaire.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services pénitentiaires.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : GALLO

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-02-03;20ly00875 ?
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