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27/01/2022 | FRANCE | N°21LY01673

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 27 janvier 2022, 21LY01673


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... D... a demandé au président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les arrêtés du 15 février 2021 par lesquels le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois et l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours, d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de procéder à

l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'informati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... D... a demandé au président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les arrêtés du 15 février 2021 par lesquels le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois et l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours, d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de procéder à l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen et de lui délivrer, sous astreinte, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2100324 du 19 février 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a admis M. C... D... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire (article 1er), a renvoyé devant une formation collégiale les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2021 en tant qu'il refuse de délivrer un titre de séjour (article 2), a annulé les décisions du 15 février 2021 portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois et assignation à résidence (article 3), a enjoint au préfet du Puy-de-Dôme de réexaminer la situation de M. C... D... au regard du délai de départ volontaire et de faire procéder à la suppression, par les services compétents, du signalement dont il fait l'objet aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen (article 4), et a rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 5).

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 28 mai 2021, M. C... D..., représenté par Me Shveda, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 5 de ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 15 février 2021 lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de réexaminer sa situation et de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- la mesure d'éloignement procède d'une erreur manifeste d'appréciation, eu égard à l'ancienneté de son séjour en France, à son insertion professionnelle ainsi qu'à sa situation personnelle ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, alors qu'il pouvait être admis au séjour sur d'autres fondements.

La requête a été communiquée au préfet du Puy-de-Dôme, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. C... D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Le Frapper, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C... D..., ressortissant égyptien né le 9 septembre 1986, est entré régulièrement en France le 15 octobre 2012. Il a épousé le 4 mai 2018 une ressortissante française et obtenu en sa qualité de conjoint la délivrance d'un premier titre de séjour valable du 19 juin 2019 au 18 juin 2020, dont il a demandé le renouvellement le 11 mars 2020. Par un arrêté du 15 février 2021, le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français à destination du pays dont il a la nationalité et a prononcé une interdiction de retour d'une durée de dix-huit mois. M. C... D... relève appel de l'article 5 du jugement du 19 février 2021 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) ".

3. Il ressort des termes de l'arrêté du 15 février 2021 que le préfet du Puy-de-Dôme, qui n'était pas tenu de faire état de l'ensemble des éléments de fait se rapportant à la situation de l'intéressé portés à sa connaissance, s'est fondé sur la rupture de la communauté de vie avec Mme A... pour refuser à M. C... D... la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur. La mesure d'éloignement accompagnant le refus de titre de séjour, qui vise les dispositions précitées et n'avait pas à faire l'objet d'une motivation en fait distincte, est, par suite, suffisamment motivée.

4. En deuxième lieu, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. C... D... était présent sur le territoire français depuis un peu plus de 8 ans à la date de l'arrêté attaqué. Ce séjour s'est toutefois déroulé pour l'essentiel en situation irrégulière. Il n'est pas contesté que la communauté de vie avec son épouse de nationalité française a cessé au cours de l'année 2020, le requérant ayant lui-même fait état d'un prochain divorce dans une déclaration de main courante effectuée le 29 août 2020. M. C... D... ne se prévaut par ailleurs d'aucune autre attache personnelle ou familiale particulière en France. Si le requérant bénéficie depuis octobre 2019 d'un parcours d'insertion par l'activité économique et occupe un emploi en qualité d'intérimaire par l'intermédiaire d'une association agréée, cette activité était encore relativement récente à la date de l'arrêté attaqué, et le requérant ne fait pas état de perspectives d'embauche pérenne à l'issue de ce parcours d'insertion. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu d'attaches en Egypte, où il a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans. Si le requérant produit enfin une planche photographique issue d'une procédure pénale en cours montrant une blessure au bras qui lui aurait été infligée par son épouse, dans des circonstances qui ne sont pas précisées, et un procès-verbal d'investigations rapportant les propos d'un témoin, ces seuls éléments ne suffisent pas à établir que le requérant serait victime de violences conjugales. Par suite, la mesure d'éloignement n'a pas porté d'atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale, protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle ne procède pas, pour les mêmes motifs, d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

7. En dernier lieu, M. C... D... ne peut utilement faire valoir, pour contester l'obligation de quitter le territoire français, qu'il remplirait les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-10 ou L. 313-14, dans leur rédaction alors applicable, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne sont pas des titres délivrés de plein droit. Pour les motifs exposés au point précédent du présent arrêt, il ne peut par ailleurs prétendre de plein droit à la délivrance d'un titre de séjour susceptible de faire obstacle à la mesure d'éloignement, sur le fondement alors en vigueur du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 5 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 février 2021 lui faisant obligation de quitter le territoire français. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.

Délibéré après l'audience du 6 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 janvier 2022.

2

N° 21LY01673


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01673
Date de la décision : 27/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Mathilde LE FRAPPER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SHVEDA

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-01-27;21ly01673 ?
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