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12/01/2022 | FRANCE | N°20LY01588

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 12 janvier 2022, 20LY01588


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la commune de Jonage à lui verser la somme de 4 944,58 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Par un jugement n° 1705488 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 novembre 2019 et 5 février 2020, Mme B... a demandé au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de

Lyon du 12 juin 2019 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la commune de Jonage à lui verser la somme de 4 944,58 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Par un jugement n° 1705488 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 novembre 2019 et 5 février 2020, Mme B... a demandé au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 12 juin 2019 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Jonage la somme de 3 000 euros à verser à son avocat, la SCP Boulloche, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué n'est pas signé par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le jugement n'est pas suffisamment motivé, en s'abstenant de se prononcer sur son droit à recevoir une indemnité et en estimant que son préjudice moral n'était pas établi, la commune étant réputée avoir acquiescé aux faits exposés ;

- la commune était tenue de lui verser un traitement correspondant aux heures prévues par son contrat, indépendamment de la règle du service fait, l'absence de service ne lui étant pas imputable, et sans qu'une clause garantissant une rémunération minimale ne soit requise ;

- subsidiairement, la commune a commis une faute contractuelle, en ne lui attribuant pas vingt-six heures de travail hebdomadaire et en la privant d'une partie de son traitement, qui justifie qu'elle soit condamnée à lui verser une indemnité d'un montant correspondant aux traitements dont elle a été privée ;

- la réalité du préjudice moral qu'elle a subi est établie, la commune de Jonage étant notamment réputée avoir acquiescé à l'existence de ce préjudice.

Par une décision du 9 septembre 2019, Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par une décision n° 435853 du 9 juin 2020, le Conseil d'Etat a attribué le jugement de la requête de Mme B... à la cour administrative d'appel de Lyon.

Procédure devant la cour

La requête a été communiquée à la commune de Jonage qui n'a pas produit d'observations.

Par ordonnance du 21 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 mai 2021.

En application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, l'instruction a été rouverte pour les éléments demandés le 28 mai 2021 en vue de compléter l'instruction.

Un mémoire a été présenté pour Mme B... le 17 juin 2021 en réponse à cette mesure d'instruction et n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère,

- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... relève appel du jugement du 12 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Jonage à lui verser la somme de 4 944,58 euros, en réparation de l'insuffisance des rémunérations qu'elle a reçues en exécution de ses contrats de travail et du préjudice moral subi en raison de ses conditions de travail.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, applicable aux agents non titulaires des collectivités territoriales en vertu de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement (...) ".

3. Le droit de tout agent à percevoir son traitement ne peut cesser que si l'absence d'accomplissement de son service résulte de son propre fait.

4. En sollicitant le versement des salaires qu'elle aurait été en droit de percevoir si l'exécution de l'ensemble des heures de service prévues par ses contrats lui avait été régulièrement demandée, Mme B... doit être regardée comme sollicitant le versement de traitements prétendument dus et non le paiement d'une indemnité.

5. Mme B... a été recrutée à compter du 17 novembre 2014 par la commune de Jonage, afin d'effectuer l'entretien de locaux, dans le cadre d'un contrat d'une durée de onze jours. Elle a ensuite été recrutée par la commune jusqu'au 23 octobre 2015, dans le cadre de sept contrats d'une durée variant de deux jours à quatre mois, prévoyant un temps de travail hebdomadaire, lorsque celui-ci y était expressément stipulé, variant de 23 à 28,5 heures. Il résulte des fiches de paie de l'intéressée, lesquelles précisent le nombre d'heures effectuées le mois précédent, que le temps de travail ainsi stipulé n'a été atteint qu'aux mois de mai et de juin 2015. Il n'est pas contesté par la commune de Jonage, qui n'a pas produit dans la présente instance, que, pour les autres mois, les heures stipulées n'ont pas été effectuées dans leur totalité, à défaut pour cette dernière d'avoir régulièrement affecté Mme B... aux missions prévues. Par suite, l'absence d'accomplissement de ces heures ne lui étant nullement imputable, Mme B... ne saurait se voir opposer l'absence de service de fait. Dans ces conditions, et nonobstant l'absence de clause lui garantissant une rémunération minimale, Mme B... est fondée à soutenir qu'elle était en droit de percevoir un traitement correspondant aux heures de service que la commune de Jonage s'était contractuellement engagée à lui confier.

6. Il résulte du tableau établi par Mme B..., dont l'exactitude, nullement contestée en défense, est corroborée par les fiches de paie et les contrats produits, qu'elle est fondée à demander à ce titre le versement d'une somme qu'elle a elle-même limitée à 2 868,81 euros. Cette somme correspond aux traitements dus, mais non versés, en raison des heures de service contractuellement prévues mais non exécutées du fait de la commune de Jonage, du mois de décembre 2014 au mois d'octobre 2015, exception faite des mois de mai 2015 et de juin 2015 au cours desquels les heures rémunérées ont dépassé celles contractuellement prévues, sans que Mme B... n'invoque aucune disposition lui donnant droit à une indemnité au titre de ces heures supplémentaires.

7. En revanche, en invoquant, sans guère de précisions, diverses circonstances telles que la nature des missions qui lui ont été effectivement confiées, l'insuffisance de repos compensateur, des conditions de travail difficiles, de fréquents changements d'horaires, le silence de son employeur et le retard à lui remettre une attestation, Mme B... n'établit aucune autre faute imputable à la commune de Jonage. Ces circonstances étant, par ailleurs, dépourvues de lien avec l'insuffisance des traitements versés telle que retenue précédemment, elle ne démontre pas avoir subi un préjudice moral directement imputable à un comportement fautif de la commune de Jonage.

8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que la SCP Boulloche, avocate de Mme B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de la commune de Jonage le versement à cette dernière d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 12 juin 2019 est annulé.

Article 2 : La commune de Jonage est condamnée à verser à Mme B... une somme de 2 868,81 euros.

Article 3 : La commune de Jonage versera à la SCP Boulloche, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle, une somme de 2 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de Jonage.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Gilles Fédi, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2022.

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N° 20LY01588


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01588
Date de la décision : 12/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-02 Fonctionnaires et agents publics. - Agents contractuels et temporaires. - Exécution du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDI
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP BOULLOCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-01-12;20ly01588 ?
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