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16/12/2021 | FRANCE | N°21LY01104

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 16 décembre 2021, 21LY01104


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par jugement nos 1601565, 1603477 du 12 juin 2018 le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions implicites par lesquelles le ministre de l'intérieur avait rejeté les demandes de M. B... des 7 novembre 2015 et 7 février 2016 tendant à la révision de sa situation administrative au regard du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté et a enjoint au ministre de l'intérieur de prendre un arrêté reconstituant la carrière de M. B... en lui attribuant le bénéfice de l'avantage spécifique d'a

ncienneté et de procéder au versement des sommes correspondant à cette reconstit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par jugement nos 1601565, 1603477 du 12 juin 2018 le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions implicites par lesquelles le ministre de l'intérieur avait rejeté les demandes de M. B... des 7 novembre 2015 et 7 février 2016 tendant à la révision de sa situation administrative au regard du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté et a enjoint au ministre de l'intérieur de prendre un arrêté reconstituant la carrière de M. B... en lui attribuant le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté et de procéder au versement des sommes correspondant à cette reconstitution dans un délai de deux mois.

Par jugement n° 2000840 du 9 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a enjoint au ministre de l'intérieur de verser à M. B... les sommes dues à la suite de la reconstitution de sa carrière consécutive à l'attribution du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté, outre les intérêts au taux légal à compter du 20 août 2018, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai.

Par jugement n° 2101152 du 17 mars 2021, le tribunal administratif de Lyon a fixé le montant de l'astreinte due par l'État à M. B... à 1 000 euros pour la période couverte, sans préjudice des sommes qui pourraient être mises à la charge de l'État au titre de périodes ultérieures, en cas de persistance de l'inexécution, enjoint au ministre de l'intérieur de communiquer au tribunal une copie des éléments permettant de justifier des mesures prises pour exécuter le jugement du 12 juin 2018 et a mis à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 9 avril 2021, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2101152 du 17 mars 2021 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rejeter la demande de M. B... tendant à la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement n° 2000840 du 9 septembre 2020.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier, d'une part, en ce que les premiers juges ont omis de répondre à un moyen en défense tiré du caractère irrecevable de la contestation de la légalité de la décision du 16 février 2018 ayant opposé la prescription quadriennale, eu égard au caractère définitif de cette décision et, d'autre part, en ce que le mémoire qu'il avait produit le 26 février 2021 n'a pas été communiqué à M. B... alors pourtant qu'il contenait des éléments nouveaux ;

- le jugement du 12 juin 2018 a été entièrement exécuté dans la mesure, en premier lieu, où l'attribution rétroactive de l'avantage spécifique d'ancienneté a été dépourvue de conséquence financière pour la période postérieure au 1er janvier 2011 et, en second lieu, où les créances résultant des différences indiciaires des échelons dans lesquels était classé indûment l'agent, et ceux qui lui ont été reconnus grâce aux bonifications d'ancienneté, pour la période antérieure au 1er janvier 2011, étaient prescrites, en application des dispositions de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances de l'État, ainsi que l'indiquait la décision du 16 février 2018, devenue définitive ;

- M. B... ne pouvait faire valoir que l'opposition de la prescription quadriennale pour les rappels de traitements concernant la période se rapportant aux années 1998 à 2010 méconnaissait la force de chose jugée attachée au jugement du 12 juin 2018, dès lors que cette prescription avait déjà été opposée par une décision du 16 février 2018 antérieure à ce jugement, qui n'avait pu dès lors en méconnaître l'autorité de chose jugée, et alors que l'intéressé entendait ainsi contester cette décision, ce qui relève d'un litige distinct de celui tranché par le jugement ;

- les conclusions dirigées contre la décision du 16 février 2018 sont irrecevables dès lors que ladite décision, que M. B... avait contestée devant le tribunal avant de se désister, était devenue définitive ;

- dès lors que le jugement du 12 juin 2018 avait été entièrement exécuté antérieurement à l'astreinte prononcée par le jugement du 9 septembre 2020, les premiers juges ne pouvaient en prononcé la liquidation.

Par mémoire enregistré le 11 août 2021, présenté pour M. A... B..., il conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ;

- le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;

- l'arrêté du 17 janvier 2001 fixant la liste des secteurs prévue au 1° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 ;

- l'arrêté du 3 décembre 2015 fixant la liste des secteurs prévue au 1° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Seillet, président assesseur ;

- et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., fonctionnaire de la police nationale du corps d'encadrement et d'application, au grade de gardien de la paix, a été affecté à la circonscription de sécurité publique de Lyon du 1er août 1982 au 2 septembre 2016, date de son départ à la retraite. Par deux demandes des 7 novembre 2015 et 27 avril 2016, il a demandé à sa hiérarchie le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté (ASA) prévu par l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 susvisée, au titre de cette affectation, et contesté devant le tribunal administratif de Lyon les décisions implicites de rejet nées du silence gardé par l'administration. Par un jugement du 12 juin 2018 le tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions implicites et a enjoint au ministre de l'intérieur de prendre un arrêté reconstituant la carrière de M. B... en lui attribuant le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté et de procéder au versement des sommes correspondant à cette reconstitution dans un délai de deux mois. Saisi d'une demande tendant à ce que le ministre de l'intérieur prenne les mesures d'exécution impliquées par ce jugement, le tribunal administratif de Lyon, par un jugement du 9 septembre 2020, a, de nouveau, enjoint au ministre de l'intérieur de verser à M. B... les sommes dues à la suite de la reconstitution de sa carrière consécutive à l'attribution du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai. Enfin, par un jugement du 17 mars 2021, le tribunal administratif de Lyon a fixé le montant de l'astreinte due par l'État à M. B... à 1 000 euros pour la période couverte, sans préjudice des sommes qui pourraient être mises à la charge de l'État au titre de périodes ultérieures, en cas de persistance de l'inexécution. Le ministre de l'intérieur relève appel de ce jugement.

2. L'annulation, prononcée par le jugement du tribunal administratif du 12 juin 2018, des décisions implicites de rejet des demandes de M. B... tendant au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté au titre de son affectation à la circonscription de sécurité publique de Lyon (CSP) du 1er août 1982 au 2 septembre 2016, impliquait nécessairement, compte tenu du motif d'annulation de ces décisions, que, comme l'avait prescrit ce jugement, l'administration, en premier lieu, prenne un arrêté reconstituant la carrière de M. B... en lui attribuant le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté. Il n'est pas contesté que le ministre de l'intérieur a pris une décision du 1er avril 2019 constatant que M. B... pouvait prétendre au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté au titre de son affectation à la CSP de Lyon du 1er janvier 1995 au 16 décembre 2015 alors que, par un arrêté du 13 février 2018, pris au demeurant avant même le jugement du 12 juin 2018, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est avait reconstitué la carrière de M. B..., en prenant en compte l'avantage spécifique d'ancienneté, dans des conditions de bonification non contestées par ce dernier. L'annulation prononcée par le jugement du 12 juin 2018 impliquait également, nécessairement, que l'administration procède au versement à M. B... des sommes dues, à la date de ce jugement, à la suite de la reconstitution de sa carrière consécutive à l'attribution du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté. Une telle mesure d'injonction ne faisait pas obstacle, toutefois, dès lors notamment que le tribunal n'avait pas déterminé dans ce jugement les sommes en cause ni la période concernée par le versement, à ce que l'administration, après avoir procédé à la reconstitution de la carrière de M. B... en prenant en compte le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté, vérifie, d'une part, si cet avantage était de nature à produire un effet sur l'avancement de cet agent par rapport à celui qu'avait connu sa carrière et, d'autre part, si les créances résultant, le cas échéant, d'une différence entre les traitements perçus au cours d'une période et ceux qui auraient dû lui être versés s'il avait bénéficié d'un avancement plus rapide par l'effet de cet avantage, n'étaient pas prescrites et restaient, dès lors, dues à l'agent.

3. Il résulte de l'instruction, d'une part, qu'à la date du jugement attaqué, comme d'ailleurs à la date du jugement du 12 juin 2018, l'administration avait, ainsi qu'il a été dit au point 2, pris une décision de reconstitution de la carrière de M. B... intégrant le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté dans des conditions non contestées par ce dernier, s'agissant en particulier de l'absence d'effet d'avancement une fois atteint l'échelon exceptionnel de son grade et le treizième et dernier échelon de ce grade. Il en résulte également qu'à cette même date, aucune somme n'était due à M. B... en exécution du jugement compte tenu, en premier lieu, de ce que la prise en compte du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté n'avait eu aucune conséquence à compter du 1er juillet 2011, date à laquelle l'intéressé avait été nommé dans le 13ème et dernier échelon du grade de gardien de la paix, en second lieu, de ce que les créances antérieures au 1er janvier 2011 étaient frappées de prescription, ainsi qu'il avait été constaté par une décision du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est du 16 février 2018, devenue définitive après le désistement de l'action dirigée contre cette décision engagée par M. B... et au demeurant antérieure au jugement du 12 juin 2018 dont elle n'avait pu dès lors méconnaître l'autorité de chose jugée. Dès lors, c'est à tort que les premiers juges, pour liquider l'astreinte dont était assortie l'injonction adressée, par leur jugement du 9 septembre 2020, au ministre de l'intérieur de verser à M. B... les sommes dues à la suite de la reconstitution de sa carrière consécutive à l'attribution du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté, se sont fondés sur le motif tiré de ce que l'administration devait être regardée comme n'ayant pas exécuté ce jugement.

4. Il résulte de ce qui précède que, l'astreinte ayant été liquidée au vu du constat erroné d'une inexécution du jugement du 12 juin 2018, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a fixé le montant de l'astreinte due par l'État à M. B... à 1 000 euros.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B... à l'occasion du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 2101152 du 17 mars 2021 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la demande de M. B... devant le tribunal administratif de Lyon et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 25 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 décembre 2021.

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N° 21LY01104


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01104
Date de la décision : 16/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-06-07-01 Procédure. - Jugements. - Exécution des jugements. - Astreinte.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : CAYUELA

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-12-16;21ly01104 ?
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