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16/12/2021 | FRANCE | N°19LY02845

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 16 décembre 2021, 19LY02845


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge :

- des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes ;

- des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1806000 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de

Lyon, après avoir décidé qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur les conclusions de M. A... ten...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge :

- des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes ;

- des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1806000 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de Lyon, après avoir décidé qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur les conclusions de M. A... tendant à la décharge, en droits et en pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2013 à concurrence d'un montant total de 6 417 euros, a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 juillet 2019 et 15 mars 2021, M. A..., représenté par Me Michaud et Me Swiatkowski, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 21 mai 2019, en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge du surplus des impositions et pénalités susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros en ce qui concerne la première instance et une somme de 2 500 euros, en ce qui concerne l'instance d'appel, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.

Il soutient que :

- il retire son moyen tiré de ce que le tribunal ne s'est pas prononcé sur l'ensemble des moyens invoqués ;

- la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée devait être admise sur l'ensemble des achats de véhicules ;

- la proposition de rectification du 23 novembre 2016 est insuffisamment motivée en ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux de l'année 2013 et donc au moment de la proposition de rectification du 29 mars 2017 le droit de reprise de l'administration fiscale était prescrit ;

- en tout état de cause la reconstitution du bénéfice des années 2013 et 2014 est erronée ;

- la notification de la mise en demeure du 5 juillet 2016 est irrégulière et en conséquence, les pénalités devront être déchargées ; à titre subsidiaire, en tout état de cause la mise en demeure du 5 juillet 2016 n'a pas concerné les bénéfices industriels et commerciaux et en conséquence, les pénalités devront être déchargées à due concurrence.

Par des mémoires enregistrés les 13 décembre 2019 et 15 avril 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le jugement attaqué n'est entaché d'aucune omission à statuer ;

- le requérant ne peut demander la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, en se fondant uniquement sur les décaissements figurant sur ses relevés bancaires ;

- la proposition de rectification du 23 novembre 2016 est suffisamment motivée ;

- le requérant ne démontre pas que les résultats reconstitués comprendraient encore des opérations non imposables ;

- le requérant a été régulièrement mis en demeure de déposer ses déclarations ; notamment, il a bien été mis en demeure de souscrire sa déclaration n° 2031.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... exploite, sous la forme d'une entreprise individuelle, une activité de négoce de véhicules qui a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er juin 2013 au 31 décembre 2015, étendue au 31 mai 2016 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. En l'absence de présentation de comptabilité et de déclaration de chiffre d'affaires, le vérificateur a procédé à une reconstitution du chiffre d'affaires de l'activité correspondant à cette période. Par des propositions de rectification des 23 novembre 2016 et 29 mars 2017 portant respectivement sur les années 2013 et 2014, l'administration a notifié à M. A... des rappels en matière de taxe sur la valeur ajoutée et de bénéfices industriels et commerciaux, ainsi que des majorations correspondantes. L'administration a également adressé à l'intéressé, deux autres propositions de rectification des 23 novembre 2016 et 29 mars 2017, incluant des rectifications issues d'un contrôle sur pièces dont l'intéressé avait fait l'objet. M. A... relève appel du jugement du 21 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

2. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) 2. La déduction ne peut pas être opérée si les redevables ne sont pas en possession soit desdites factures, soit de la déclaration d'importation sur laquelle ils sont désignés comme destinataires réels (...) ".

3. M. A... qui ne demande plus en appel le bénéfice de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge pour une partie des véhicules revendus, sollicite désormais la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il aurait acquittée lors de l'achat de ces biens.

4. Le requérant se prévaut de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 21 novembre 2018, Lucretiu Hadrian Vadan c/ Agentia Nationala de Administrare Fiscala, C-664/16, selon lequel le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée exige que la déduction de celle-ci, en amont, soit accordée dès lors que la taxe porte sur les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel, même si certaines conditions formelles ont été omises par les assujettis. Le requérant en déduit que l'administration fiscale ne saurait refuser le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée au seul motif que l'assujetti n'a pas produit de facture, si elle dispose de toutes les données pour vérifier que les conditions de fond relatives à ce droit sont satisfaites. Il incombe toutefois à l'assujetti d'établir que des biens et des services lui ont effectivement été fournis en amont par des assujettis, pour les besoins de ses propres opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, et à l'égard desquels il s'est effectivement acquitté de la taxe sur la valeur ajoutée.

5. Il résulte de l'instruction que pour évaluer le montant des charges supportées par l'entreprise individuelle du requérant, l'administration s'est fondée sur les décaissements mentionnés sur les relevés bancaires de l'intéressé au titre des exercices clos en 2013 et 2014. Le requérant demande que le montant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible à prendre en compte, soit calculé sur la base de ces mêmes décaissements et soutient que l'administration ne saurait refuser le droit de déduction des achats en cause au seul motif que les factures n'ont pas été présentées. Toutefois, les documents produits par le requérant consistant en des relevés bancaires qui ne précisent ni la nature des dépenses concernées, ni le bénéficiaire, et en quelques factures dont la plupart ne mentionnent pas la taxe sur la valeur ajoutée ne sauraient constituer une preuve objective permettant d'établir qu'il remplissait les conditions de fond pour pouvoir bénéficier du droit à déduction. Par suite, le requérant n'est pas fondé à demander la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée correspondant à ces dépenses.

Sur les bénéfices industriels et commerciaux :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée ". Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. En cas de motivation par référence, l'administration doit, en principe, annexer les documents auxquels elle se réfère dans la proposition de rectification ou en reprendre la teneur.

7. M. A... fait valoir que la proposition de rectification du 23 novembre 2016 est insuffisamment motivée, dans la mesure où elle ne justifie pas le choix du pourcentage de 50 % des produits retenus pour déterminer le montant des charges. Toutefois, il résulte de l'instruction que cette proposition de rectification indique clairement qu'en l'absence de déclaration des bénéfices industriels et commerciaux et de présentation de documents comptables ou de pièces justificatives, le bénéfice réalisé au titre de l'année 2013 a été reconstitué et que par souci de réalisme, l'administration a déterminé un montant de charges à hauteur de 50 % des produits retenus dont le montant figure dans l'annexe 3 de cette proposition de rectification. Ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la proposition de rectification du 23 novembre 2016 est insuffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. ". Aux termes de l'article L. 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification (...) ". Pour produire un effet interruptif de prescription en application de ces dispositions, une proposition de rectification doit indiquer la catégorie d'impôt en cause, l'année d'imposition, la nature et le montant des redressements envisagés, dans des termes suffisamment explicites pour permettre au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations.

9. Il résulte de ce qui a été exposé au point précédent que la proposition de rectification du 23 novembre 2016, était régulièrement motivée au regard des prescriptions de l'article L. 57 et, par suite, contrairement à ce qu'il est soutenu, de nature à interrompre la prescription pour l'année en cause en matière d'impôt sur le revenu. Le moyen tiré de la prescription de ces impositions doit, par suite, être écarté.

10. En dernier lieu, en se bornant à faire valoir que ce n'est qu'en cours de première instance que l'administration a déduit de la reconstitution du chiffre d'affaires de son activité des opérations non imposables, le requérant ne démontre pas qu'il existerait d'autres sommes que l'administration aurait omis de déduire. Dans ces conditions, le requérant n'établit pas que la reconstitution des bénéfices industriels et commerciaux comprendrait des erreurs qui la rendrait excessivement sommaire ou radicalement viciée.

Sur les pénalités :

11. Aux termes des dispositions du I de l'article 1728 du code général des impôts : " Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration (...) entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) / b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; / (...) ".

12. Il résulte de l'instruction que par deux courriers du 4 juillet 2016, l'administration a mis en demeure M. A... de déposer d'une part, les déclarations de chiffre d'affaires concernant la période en litige et d'autre part, sa " déclaration n°2031 des résultats (impôt sur le revenu, BIC, régime simplifié et régime du bénéfice réel) " pour les années 2013 à 2015. Le requérant fait valoir que les avis de réception de ces courriers ne mentionnent ni la date à laquelle ces courriers ont été présentés ou avisés, ni les motifs de non distribution des plis. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'administration qui a également adressé par plis recommandés, les copies de ces deux courriers au domicile personnel du requérant a produit les avis de réception mentionnant que ces plis ont été avisés le 8 juillet mais non réclamés. Dans ces conditions, l'administration établit qu'elle a régulièrement notifié à l'intéressé les mises en demeure litigieuses. Par ailleurs, contrairement à ce que prétend le requérant, l'administration l'a bien mis en demeure de déposer ses déclarations en matière de bénéfices industriels et commerciaux ainsi qu'il ressort du courrier précité du 4 juillet 2016 portant sur la " déclaration n° 2031 ". Dès lors qu'il est constant que l'intéressé n'a pas déposé les déclarations demandées, l'administration a pu légalement appliquer la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1728 du code général des impôts.

13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 25 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 décembre 2021.

2

N° 19LY02845

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY02845
Date de la décision : 16/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02-08-01 Contributions et taxes. - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. - Taxe sur la valeur ajoutée. - Liquidation de la taxe. - Base d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : CABINET LM LAURANT et MICHAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-12-16;19ly02845 ?
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