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14/12/2021 | FRANCE | N°20LY03463

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 14 décembre 2021, 20LY03463


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 7 février 2018 par laquelle le conseil municipal de Mercurol-Veaunes a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune nouvelle, en tant qu'elle omet le projet de route de jonction RD 115 / RD 260 et qu'elle classe en zone agricole la parcelle B 437.

Par un jugement n° 1802186 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requ

te et un mémoire complémentaire enregistrés les 27 novembre 2020 et 31 mai 2021, M. A......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 7 février 2018 par laquelle le conseil municipal de Mercurol-Veaunes a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune nouvelle, en tant qu'elle omet le projet de route de jonction RD 115 / RD 260 et qu'elle classe en zone agricole la parcelle B 437.

Par un jugement n° 1802186 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 27 novembre 2020 et 31 mai 2021, M. A..., représenté par Me Revol de la Selarl Guimet Avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 septembre 2020 ainsi que la délibération du 7 février 2018 ;

2°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de la commune de Mercurol-Veaunes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il a omis de répondre au moyen tiré de ce que le projet de carrefour entre la RD 115/RD260 aurait été omis sciemment du projet de PLU soumis à enquête publique et que son rajout dans le PLU finalement adopté ne procède pas de l'enquête publique ;

- la création de l'emplacement réservé n° 10 ne procède pas de l'enquête publique et le fait pour les auteurs du PLU de ne pas mentionner ce projet dans le projet de PLU a empêché que celui-ci fasse l'objet d'une consultation et d'avis du public lors de l'enquête publique ;

- la création de cet emplacement réservé est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; cet emplacement réservé aurait dû être réservé pour le département et non pour la commune qui ne dispose pas de la compétence pour aménager le carrefour ;

- le classement de la totalité de sa parcelle en zone agricole est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 25 février et le 22 juin 2021, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune de Mercurol-Veaunes, représentée par la Serlarl Retex Avocats, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que soit mis en œuvre l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, à titre encore plus subsidiaire, de n'annuler le PLU de la commune qu'en tant qu'il classe la parcelle B 437 en zone agricole et, dans le dernier état de ses écritures et en toute hypothèse, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'est entaché d'aucune omission à statuer ;

- la mention dans le PLU adopté du projet de route/carrefour RD115/260, et l'ajout de trois emplacements réservés supplémentaires, dont l'emplacement réservé n° 10 grevant la parcelle du requérant, procèdent de l'enquête publique ; à supposer ces modifications irrégulières, elles ne sont pas de nature à priver le requérant d'une garantie ;

- aucune erreur manifeste d'appréciation n'entache le classement de la parcelle en litige.

La clôture de l'instruction a été fixée au 23 juin 2021 par une ordonnance du 2 juin précédent en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Par une lettre du 22 octobre 2021, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation totale de la délibération du 7 février 2018, M. A... n'ayant demandé au tribunal que l'annulation de cette délibération en tant qu'elle classe sa parcelle en zone agricole et qu'elle omet le projet de jonction entre les routes départementales 115 et 260 et invitées à présenter leurs observations sur ce point.

Par courrier enregistré au greffe le 29 octobre 2021, M. A... a produit ses observations, lesquelles n'ont pas été communiquées.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christine Psilakis, première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Houssel, substituant Me Revol, pour M. A..., et celles de Me Cunin pour la commune de Mercurol-Veaunes ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... relève appel du jugement du 22 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Mercurol-Veaunes du 7 février 2018 approuvant le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune.

Sur la recevabilité des conclusions de la requête :

2. Il ressort du dossier de première instance que M. A... a demandé devant le tribunal l'annulation de la délibération du 7 février 2018 par laquelle le conseil municipal de Mercurol-Veaunes a adopté son PLU, uniquement en tant qu'elle omet le projet de jonction des routes départementales 115 et 260 et qu'elle classe en zone agricole sa parcelle cadastrée section B n° 437. Dans ces conditions, les conclusions tendant à l'annulation totale de la délibération précitée présentées en appel sans avoir été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles et sont, par suite, irrecevables dans cette mesure.

Sur la régularité du jugement :

3. Il ressort des écritures de première instance que M. A..., qui n'a pas eu recours à un avocat, soutenait notamment que le projet de jonction RD115-RD260 au village de Veaunes avait " été délibérément omis " non seulement du projet de PLU mais aussi de l'enquête publique et demandait une réouverture de l'enquête publique sur ce point car ce projet " n'était réapparu qu'au moment de l'adoption définitive de ce plan ". Le requérant doit être ainsi regardé comme soulevant le moyen tiré de ce que les modifications tendant à inclure dans le PLU finalement adopté, le projet précité de même qu'en conséquence l'instauration d'un emplacement réservé n° 10 sur sa parcelle ne procédaient pas de l'enquête publique. Le tribunal, en se bornant à relever que " ce projet était mentionné page 129 du rapport de présentation et page 16 du PADD. Il a donné lieu à une recommandation du commissaire-enquêteur relative à son omission dans le règlement graphique du plan local d'urbanisme. Suite à cette recommandation, un emplacement réservé n°10 a été porté sur le règlement graphique. M. A... n'est donc pas fondé à soutenir que le plan local d'urbanisme est illégal pour ne pas avoir pris en compte ce projet " ne s'est pas explicitement prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant. Par suite, son jugement doit être annulé.

4. Il y a, dès lors, lieu pour la cour de se prononcer par la voie de l'évocation sur la demande de M. A....

Sur la légalité de la délibération du 7 février 2018 :

5. En premier lieu, selon l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme, à l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire enquêteur, est approuvé par le conseil municipal. Il est loisible à l'autorité administrative compétente de modifier le plan local d'urbanisme après l'enquête publique, sous réserve, d'une part, que ne soit pas remise en cause l'économie générale du projet et, d'autre part, que cette modification procède de l'enquête publique, ces deux conditions découlant de la finalité même de la procédure de mise à l'enquête publique.

6. Il ressort des pièces du dossier que le projet de carrefour entre les deux départementales, motivant la création de l'emplacement réservé n° 10, était mentionné p. 16 du PADD et p. 129 du rapport de présentation et a fait l'objet d'une remarque du requérant, reprise par le commissaire enquêteur. De même, la nécessité de créer une digue sur la Veaune est évoquée dans l'avis de l'établissement public Agglo-d'Ardèche-en-Hermitage et a fait l'objet d'une remarque du commissaire enquêteur. Dans ces conditions, et alors même que les mentions du PLU arrêté n'évoquaient pas le projet d'aménagement du Conseil général alors en cours de discussion avec M. A..., ce dernier n'est pas fondé à soutenir que la création de l'emplacement réservé n° 10 grevant sa parcelle, de même que la création des emplacements réservés n° 11 et 12 nécessaires à la création d'une digue sur la Veaune, ajoutés après l'enquête publique, ne procédaient pas de cette enquête. Par ailleurs, ces modifications, compte tenu de leur faible ampleur, ne modifient pas l'économie générale du PLU ainsi adopté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme, reprenant les dispositions antérieures du premier alinéa de l'article R. 123-7 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ".

8. Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

9. M. A... conteste le classement en zone agricole de la parcelle cadastrée section B 437 lui appartenant. A supposer que les bâtiments nécessaires à l'exploitation des vergers situés dans le voisinage immédiat de la parcelle de M. A... relèvent d'une activité industrielle de transformation de fruits, il ressort toutefois des pièces du dossier que la parcelle en litige située à l'entrée du village s'intègre à une vaste zone agricole et est contiguë à des vergers. Par ailleurs, le classement antérieur en zone constructible dans la carte communale adoptée en 2006 et la délivrance d'un certificat d'urbanisme positif le 17 décembre 1992 en vue d'y réaliser un lotissement étaient sans incidence sur la possibilité pour les auteurs du PLU de retenir un zonage différent. Dans ces conditions, le classement en zone agricole de la parcelle en litige, n'est pas, au regard de l'objectif que se sont fixés les auteurs du PLU de préserver le patrimoine agricole de la commune, entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : 1° Des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics dont il précise la localisation et les caractéristiques ; (...) ". Aux termes de l'article R. 151-48 du même code : " Dans les zones U, AU, A et N, le ou les documents graphiques du règlement font, en outre, apparaître, s'il y a lieu : (...) 2° Les emplacements réservés aux voies publiques délimités en application du 1° de l'article L. 151-41, en précisant leur destination et les collectivités, services et organismes publics bénéficiaires ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'intention d'une commune de réaliser un aménagement sur une parcelle suffit à justifier légalement son classement en tant qu'emplacement réservé en application de l'article L. 151-41 1° du code de l'urbanisme, sans qu'il soit besoin pour la commune de faire état d'un projet précisément défini. La personne publique bénéficiaire doit être toutefois identifiée de même que les dimensions précises de cet emplacement.

11. Il ressort des pièces du dossier que le PLU en litige identifie sur la parcelle du requérant un emplacement réservé n° 10 qui a pour objet l'aménagement d'un carrefour à l'entrée du village de Veaunes entre les routes départementales 115 et 260. Bien que, selon l'avis du Conseil général de la Drôme, cet aménagement relèverait de la compétence de ce dernier, et alors que la commune peut participer à la réalisation d'un tel aménagement, la circonstance que la commune en soit identifiée comme unique bénéficiaire dans les documents du PLU n'est pas de nature à entacher ce classement d'erreur manifeste d'appréciation.

12. Enfin, dès lors que la modification du PLU en vue d'y inscrire l'emplacement réservé n° 10 procède de l'enquête publique et que la création de cet emplacement réservé ainsi que le classement de la parcelle de M. A... se justifient par des considérations d'urbanisme, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir, ainsi qu'il l'a fait devant les premiers juges, que le PLU en litige est entaché d'un détournement de procédure ou d'un détournement de pouvoir.

13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la délibération en litige est entachée d'illégalité.

Sur les frais d'instance :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que la somme que M. A... demande au titre des frais qu'il a exposés soit mise à la charge de la commune de Mercurol-Veaunes, qui n'est pas, pour l'essentiel, partie perdante. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement d'une somme au titre des frais exposés par la commune de Mercurol-Veaunes.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 22 septembre 2020 est annulé.

Article 2 : La demande ainsi que les conclusions d'appel de M. A... sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la commune présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... ainsi qu'à la commune de Mercurol-Veaunes.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme Christine Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2021.

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N° 20LY03463


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03463
Date de la décision : 14/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SELARL RETEX AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-12-14;20ly03463 ?
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