Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A..., a demandé au tribunal administratif de Grenoble :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 9 juin 2017 par laquelle le directeur du centre hospitalier Le Valmont a constaté que son contrat avait pris fin le 31 mai 2017 en qualifiant cette fin de contrat de démission ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'attestation destinée à Pôle emploi datée du 13 juin 2017 par laquelle le directeur du centre hospitalier Le Valmont a déclaré que la fin de son contrat était une rupture anticipée d'un contrat de travail à durée déterminée (CDD) à son initiative ;
3°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier Drôme Vivarais, dans un délai d'un mois à compter de la notification, de qualifier de fin de contrat sa cessation des fonctions et de lui transmettre les documents rectifiés ;
4°) de condamner le centre hospitalier Drôme Vivarais à lui verser une indemnité de 7 000 euros destinée à réparer les préjudices moral et financier résultant de la faute de son employeur à avoir considéré qu'elle avait démissionné.
Par un jugement n° 1704431 du 2 juillet 2019, le tribunal administratif de Grenoble a donné acte du désistement des conclusions indemnitaires de Mme A... (article 1er), a annulé l'attestation d'employeur du 13 juin 2017 (article 2), a enjoint au directeur du centre hospitalier Drôme Vivarais de transmettre dans un délai d'un mois une attestation d'employeur rectifiée (article 3), et a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 4).
Procédure devant la cour
Par une requête et des mémoires enregistrés les 7 août 2019, 20 mars 2020 et 22 février 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le centre hospitalier Drôme Vivarais, représenté par Me Renouard, demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 2 juillet 2019 ;
2°) de rejeter les demandes présentées par Mme A... devant ce tribunal ;
3°) de mettre une somme de 4 000 euros à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier pour être insuffisamment motivé quant à la fin de non-recevoir opposée en première instance aux conclusions dirigées contre l'attestation destinée à Pôle emploi ;
- le jugement attaqué est encore irrégulier pour avoir estimé que Mme A... n'a pas été informée du renouvellement de son contrat avant son terme ; elle a été informée le 22 mai 2017, lors de son évaluation de fin de contrat ;
- la demande est irrecevable, dès lors que l'attestation destinée à pôle emploi ne constitue pas une décision faisant grief ;
- Mme A... a été informée dans le délai de prévenance du centre hospitalier de renouveler son contrat ; cette information n'est pas nécessairement écrite ; elle a été donnée le 22 mai 2017 lors de son évaluation ; ce souhait a été confirmé le 24 mai 2017 ; un avenant à son contrat lui a été adressé par voie postale le 1er juin 2017 ;
- la requérante, qui a eu connaissance de la proposition d'emploi, a confirmé par courrier du 15 juin 2017 son désir d'obtenir ses documents de fin de contrat ; elle a donc nécessairement refusé le renouvellement de son contrat à durée déterminée.
Par deux mémoires en défense enregistrés le 21 octobre 2019 et le 22 décembre 2020, Mme A..., représentée par la SCP Benichou, Para Triquet-Dumoulin Lorin Baron, agissant par Me Baron, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge du centre hospitalier Drôme Vivarais en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés sont infondés.
Par ordonnance du 17 décembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er mars 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- le règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014 relative à l'indemnisation du chômage ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me Brendel pour le centre hospitalier Drôme Vivarais.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A... a été recrutée par le centre hospitalier Le Valmont, devenu centre hospitalier Drôme Vivarais, en qualité d'éducatrice spécialisée contractuelle pour la période du 2 au 31 mai 2017. Le centre hospitalier Drôme Vivarais relève appel du jugement du 2 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'attestation destinée à Pôle emploi datée du 13 juin 2017 par laquelle le directeur du centre hospitalier a déclaré que la fin du contrat de travail était une rupture anticipée à l'initiative de Mme A... et a enjoint au directeur du centre hospitalier Drôme Vivarais de transmettre dans un délai d'un mois une attestation d'employeur rectifiée.
Sur la régularité du jugement :
2. D'une part, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier Drôme Vivarais, les premiers juges, ont, au point 3 de leur jugement, suffisamment exposé les raisons pour lesquelles ils ont écarté la fin de non-recevoir opposée en défense aux conclusions de Mme A... dirigées contre l'attestation d'employeur du 13 juin 2017. Le moyen selon lequel c'est à tort que le tribunal n'a pas relevé l'irrecevabilité de la demande de première instance à ce titre n'entache pas la régularité du jugement mais doit être examiné dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel.
3. D'autre part, si le centre hospitalier Drôme Vivarais fait grief aux premiers juges d'avoir, à tort, estimé que Mme A... n'avait pas été informée du renouvellement de son contrat avant son terme, un tel moyen se rattache en tout état de cause au bien-fondé de la décision juridictionnelle et reste sans incidence sur sa régularité.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
4. Aux termes de l'article R. 1234-9 du code du travail : " L'employeur délivre au salarié, au moment de l'expiration ou de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications qui lui permettent d'exercer ses droits aux prestations mentionnées à l'article L.5421-2 et transmet sans délai ces mêmes attestations à Pôle emploi. (...) ".
5. La délivrance de l'attestation prévue par l'article R. 1234-9 du code du travail revêt le caractère d'une obligation pour l'employeur s'agissant notamment d'agents qui sont involontairement privés d'emploi. Le caractère erroné des informations portées à la connaissance de Pôle emploi, s'il est avéré, a pour conséquence de priver l'intéressé du bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Il en résulte que comme l'ont estimé les premiers juges, en tant qu'elle coche la case 37 correspondant à une " rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée à l'initiative de l'agent " et, en droit public, " au refus de renouvellement de contrat à durée déterminée non légitime ", en vertu de la table de correspondance annexée à la convention de gestion conclue entre le centre hospitalier et Pôle emploi, l'attestation du 13 juin 2017 fait grief à Mme A..., qui est ainsi recevable à en demander l'annulation.
Sur le bien-fondé du jugement :
6. Aux termes de l'article L. 5422-1 du code du travail : " Ont droit à l'allocation d'assurance les travailleurs involontairement privés d'emploi (...) ". Aux termes de l'article L. 5424-1 du même code : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : (...) 2º (...) les agents non statutaires des établissements publics administratifs autres que ceux de l'Etat (...) ". Aux termes de l'article L. 5424-2 du même code : " Les employeurs mentionnés à l'article L. 5424-1 assurent la charge et la gestion de l'allocation d'assurance (...) ". En vertu de l'article L. 5422-20 dudit code, ce régime d'assurance fait l'objet d'accords conclus entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés et agréés par l'autorité administrative. L'article 2 du règlement annexé à la convention du 14 mai 2014 relative à l'indemnisation du chômage, agréée par arrêté du 25 juin 2014, dispose : " Sont involontairement privés d'emploi ou assimilés les salariés dont la cessation du contrat de travail résulte : (...) - d'une fin de contrat à durée déterminée (...) ".
7. Il appartient à l'autorité administrative compétente d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les circonstances du non-renouvellement d'un contrat à durée déterminée permettent d'assimiler celui-ci à une perte involontaire d'emploi. L'agent qui refuse le renouvellement de son contrat de travail ne peut être regardé comme involontairement privé d'emploi, à moins que ce refus ne soit fondé sur un motif légitime.
8. Pour annuler l'attestation d'employeur du 13 juin 2017 par laquelle le directeur du centre hospitalier le Valmont a imputé à Mme A... l'initiative de la fin de son contrat, le tribunal administratif de Grenoble a retenu que Mme A... n'avait été informée du renouvellement de son contrat de travail que le 3 juin 2017, soit postérieurement à l'échéance de son contrat en cours fixée au 31 mai 2017, de sorte qu'elle ne pouvait être regardée comme ayant refusé ce renouvellement.
9. D'une part, il ne ressort nullement de l'attestation de la cadre de santé ayant conduit l'entretien d'évaluation de Mme A... le 22 mai 2017, contrairement à ce que prétend le centre hospitalier Drôme Vivarais, que l'intéressée aurait été informée oralement à cette occasion de l'intention du centre hospitalier de renouveler son contrat. Quand bien même ce renouvellement aurait été envisagé au cours de l'entretien, le centre hospitalier Drôme Vivarais ne justifie d'aucune proposition formelle en ce sens.
10. D'autre part, si, par une décision du 27 mai 2017, le centre hospitalier a prolongé le contrat de Mme A... du 1er juin au 30 septembre 2017, l'intéressée soutient, sans être contredite sur ce point, n'en avoir reçu notification que le 3 juin 2017, soit postérieurement à l'échéance de son contrat en cours fixée au 31 mai 2017. Dès lors, et sans qu'y fasse obstacle les circonstances que Mme A... n'a pas signé et renvoyé l'avenant modifiant la durée de son contrat de travail, alors que son contrat était échu, et a réitéré le 15 juin 2017 sa demande de transmission de l'attestation d'employeur destinée à Pôle emploi, elle doit être regardée comme ayant été, à la date 31 mai 2017, involontairement privée d'emploi à raison de l'expiration de son contrat de travail à durée déterminée, au sens de l'article 2 du règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014 susvisée.
11. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le centre hospitalier Drôme Vivarais n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'attestation du directeur du centre hospitalier du 13 juin 2017 destinée à Pôle emploi et a enjoint à cette autorité de transmettre dans un délai d'un mois une attestation d'employeur rectifiée.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A... qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par le centre hospitalier Drôme Vivarais. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge le versement à Mme A... d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête du centre hospitalier Drôme Vivarais est rejetée.
Article 2 : Le centre hospitalier Drôme Vivarais versera à Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier Drôme Vivarais et à Mme B... A....
Délibéré après l'audience du 30 novembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Gilles Fédi, président-assesseur assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2021.
2
N° 19LY03147