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08/12/2021 | FRANCE | N°21LY00909

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 08 décembre 2021, 21LY00909


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2004965 du 10 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 22 mars 2021, Mme C..., représent

ée par Me Boyer, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2004965 du 10 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 22 mars 2021, Mme C..., représentée par Me Boyer, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa demande ;

Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

- la décision est entachée d'une erreur de fait ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas présenté d'observations.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Caraës, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C..., ressortissante nigériane née le 28 juin 1988, déclare être entrée en France irrégulièrement le 3 février 2009. Elle a sollicité le bénéfice de l'asile. Par une décision du 2 juillet 2009, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 20 juillet 2010. Par un arrêté du 23 novembre 2010, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de délivrer à Mme C... un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français, obligation réitérée par un arrêté du 8 avril 2012. Le 10 mars 2014, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 30 septembre 2014, dont la légalité a été confirmée par un jugement du 25 août 2015 du tribunal administratif de Lyon et par un arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 29 juin 2017, le préfet du Rhône l'a obligée à quitter le territoire français. Le 21 juin 2017, Mme C... a sollicité un titre de séjour sur les fondements du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 29 janvier 2020, le préfet du Rhône a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme C... relève appel du jugement du 10 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2020.

Sur les moyens communs à l'ensemble des décisions litigieuses prises à l'encontre de Mme C... :

2. Le préfet, qui n'était pas tenu de mentionner l'ensemble des éléments de la situation personnelle de Mme C..., a suffisamment motivé les décisions contestées contenues dans l'arrêté du 29 janvier 2020 et ce alors que l'intéressée n'établit pas avoir porté à la connaissance de l'autorité administrative que son enfant D... bénéficiait de soins.

3. Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le préfet du Rhône se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation de Mme C... avant de refuser de l'admettre au séjour.

Sur les moyens relatifs à la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

4. Mme C... fait valoir que la décision critiquée mentionne à tort qu'elle était âgée de quarante-sept ans à la date de cette décision et que deux de ses enfants résidaient au Nigéria, alors qu'elle est âgée de trente-deux ans et qu'elle n'a pas d'enfants dans son pays d'origine. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le préfet du Rhône, qui a relevé par ailleurs que l'intéressée résidait en France depuis plus de dix ans, qu'elle avait fait l'objet de plusieurs mesures d'éloignement, qu'elle avait donné naissance à deux enfants sur le territoire national en 2014 et 2019, qu'elle se déclarait célibataire et n'avait plus de contact avec les pères de ses enfants, qu'elle n'était pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident un frère et une sœur et où elle avait vécu l'essentiel de son existence, aurait pris la même décision s'il n'avait pas commis d'erreur sur l'âge de l'intéressée et l'existence d'enfants dans son pays d'origine.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. (...) ".

6. Mme C... fait valoir qu'elle vit en France depuis onze ans, qu'elle a fui son pays en raison de son mariage forcé et que son fils, qui souffre d'un retard de développement, est suivi en France. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la durée de son séjour en France, que le préfet ne conteste pas, résulte uniquement du maintien irrégulier de l'intéressée sur le territoire français en dépit des décisions refusant son admission au séjour et des mesures d'éloignement prises à son encontre. Si elle indique avoir dû fuir son pays, elle n'apporte aucun élément de nature à établir l'existence de risques personnels et actuels en cas de retour au Nigéria alors que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui a examiné sa situation à l'égard de ce pays, a rejeté sa demande d'asile le 2 juillet 2009, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 20 juillet 2010. Par ailleurs, si son enfant, D..., est suivi pour un retard de développement psychomoteur global associé à une instabilité psychomotrice diagnostiqué comme un trouble du spectre autistique, il n'est pas établi que cet enfant ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son handicap dans son pays d'origine. Ainsi rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale puisse se reconstituer au Nigeria alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C... serait particulièrement bien insérée dans la société française sur le plan social ou professionnel en l'absence de toute indication sur les liens qu'elle aurait pu tisser avec différentes personnes en France. Par suite, eu égard aux conditions de son séjour en France et alors qu'elle dispose d'attaches familiales dans son pays d'origine, le préfet du Rhône n'a pas porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision critiquée a été prise. Il s'ensuit que la décision litigieuse n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

7. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

8. La décision litigieuse n'a ni pour effet ni pour objet de séparer les membres de la famille. En tout état de cause, rien ne fait obstacle à ce que les deux enfants de B... C..., nés en France les 3 octobre 2014 et 30 avril 2019, puissent vivre dans des conditions satisfaisantes au Nigeria. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

9. En dernier lieu, Mme C... reprend en appel le moyen qu'elle avait invoqué en première instance tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Lyon.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français devrait être annulée en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 4 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

Mme Evrard, présidente de la formation de jugement,

Mme Caraës, première conseillère,

Mme Lesieux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 décembre 2021.

3

N° 21LY00909


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00909
Date de la décision : 08/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme EVRARD
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : BOYER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-12-08;21ly00909 ?
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