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08/12/2021 | FRANCE | N°20LY02337

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 08 décembre 2021, 20LY02337


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de leurs revenus du patrimoine perçus en 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1721248 du 11 février 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 août 2020 et le 14 mai 2021, M. et Mme B..., représentés par Me Fouquet-Chabert, demandent à

la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions, à hauteu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de leurs revenus du patrimoine perçus en 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1721248 du 11 février 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 août 2020 et le 14 mai 2021, M. et Mme B..., représentés par Me Fouquet-Chabert, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions, à hauteur de la somme de 196 526 euros ;

3°) de prononcer la restitution des sommes acquittées par eux au titre de ces prélèvements, assorties des intérêts moratoires ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme non chiffrée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

Sur les cotisations de contribution sociale généralisée, de prélèvement social et de contribution additionnelle au prélèvement social :

- l'administration ne pouvait soumettre leurs revenus du patrimoine aux prélèvements sociaux sans méconnaître le principe d'unicité de la législation sociale résultant de l'article 11 du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- il existe, compte tenu de l'assujettissement aux prélèvements sociaux en litige, une rupture d'égalité devant l'impôt entre les travailleurs frontaliers exerçant leur activité en Suisse ayant opté pour l'assurance privée, ces mêmes travailleurs affiliés à la couverture maladie universelle en France et ceux assurés à l'assurance maladie Suisse ;

- il existe également, compte tenu de l'assujettissement aux prélèvements sociaux en litige, une rupture d'égalité devant l'impôt entre les travailleurs frontaliers et les salariés exerçant leur activité en France ;

- l'administration a méconnu les principes de la libre circulation des personnes, d'égalité de traitement et de non-discrimination qui résultent des articles 45 et 157 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de l'article 4 du règlement (CE) n° 883/2004 ;

- ils peuvent se prévaloir, dès lors qu'ils se trouvent dans la même situation au titre des années antérieures à 2016, d'une note interne du ministère des affaires sociales à la direction générale des finances publiques, reprise par le Groupement transfrontalier européen dans ses publications, selon laquelle : " Pour l'application de l'exonération de CSG-CRDS sur les revenus du capital et dans le cas des frontaliers avec la Suisse, il n'y a pas lieu de distinguer selon que les intéressés ont opté ou non pour la dispense d'affiliation en Suisse. Dès lors qu'ils relèvent en principe de la législation sociale suisse au regard des règles de répartition des compétences posées par le règlement (que ce soit pour toutes les branches, y compris la maladie, ou même que par exercice de l'option pour l'exemption en Suisse, ils soient affiliés à la branche maladie en France), ils sont exonérés de CSG et de CRDS (...) " ;

Sur la contribution additionnelle de 1,1 % et le prélèvement de solidarité de 2 % :

- l'administration n'était pas fondée à les assujettir à la contribution additionnelle de 1,1 % et au prélèvement de solidarité de 2 % dès lors que ces contributions sont affectées au financement de la sécurité sociale.

Par un mémoire enregistré le 15 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, fait à Luxembourg le 21 juin 1999, son annexe II, ensemble les décisions n° 2/2003 du 15 juillet 2003 et n° 1/2012 du 31 mars 2012 du comité mixte ;

- le règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Evrard, présidente-assesseure,

- et les conclusions de Mme Vinet, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui exerce une activité salariée en Suisse, était fiscalement domicilié en France avec son épouse au titre des années 2012, 2013 et 2014. Il a fait usage de la faculté d'exemption ouverte par l'annexe II de l'accord du 21 juin 1999 entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes et a souscrit, ainsi que le permettait alors le II de l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale, un contrat auprès d'un assureur privé, la société Swisslife, qui a couvert le risque maladie au titre de ces trois années. M. et Mme B... ont été assujettis aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine qu'ils ont perçus au titre des années 2012, 2013 et 2014. Ils ont contesté ces impositions en se prévalant du principe de l'unicité de la législation applicable en matière sociale résultant de l'article 11 du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale. L'administration n'a fait que partiellement droit à cette demande, en maintenant à leur charge une fraction de la contribution sociale généralisée au titre des années 2012, 2013 et 2014 et du prélèvement social au titre des années 2013 et 2014 et l'intégralité de la contribution additionnelle au prélèvement social au titre de ces trois années, au motif que ces prélèvements ou fractions de prélèvements étaient affectés au financement de l'assurance-maladie, et l'intégralité du prélèvement de solidarité au taux de 2 %, au motif que ce prélèvement était situé en dehors du champ d'application du règlement (CE) n° 883/2004. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 11 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur les conclusions à fin de décharge des cotisations de contribution sociale généralisée, de prélèvement social et de contribution additionnelle au prélèvement social :

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 11 du règlement (CE) n° 883/2004 :

2. En vertu de l'article 11 du règlement n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, les personnes auxquelles ce règlement est applicable ne sont soumises qu'à la législation sociale d'un seul Etat membre. Conformément à ce principe d'unicité de législation, ce règlement prévoit que l'exercice d'une activité salariée ou non salariée dans un Etat membre implique normalement l'application de la législation sociale de cet Etat.

3. Depuis le 1er avril 2012, en vertu de la décision n° 1/2012 du 31 mars 2012 du comité mixte qui a modifié l'annexe II de l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes du 21 juin 1999, l'annexe XI du règlement n° 883/2004 a été complétée par des dispositions prévoyant que les personnes exerçant une activité en Suisse sont soumises à la législation de cet Etat en matière d'assurance maladie alors même qu'elles n'y résideraient pas, mais que les résidents de certains Etats, dont la France depuis la décision n° 2/2003 du 15 juillet 2003 du comité mixte, peuvent demander à être exemptés de cette affiliation obligatoire sous réserve de prouver qu'ils bénéficient dans l'Etat de résidence d'une couverture en cas de maladie.

4. Aux termes de l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige, qui définit en droit interne les conditions de l'exemption présentée ci-dessus : " I. - Les travailleurs frontaliers résidant en France et soumis obligatoirement à la législation suisse de sécurité sociale au titre des dispositions de l'accord du 21 juin 1999 entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, mais qui, sur leur demande, sont exemptés d'affiliation obligatoire au régime suisse d'assurance maladie en application des dispositions dérogatoires de cet accord, sont affiliés obligatoirement au régime général dans les conditions fixées par l'article L. 380-1. / II. - Toutefois, les travailleurs frontaliers occupés en Suisse et exemptés d'affiliation obligatoire au régime suisse d'assurance maladie peuvent demander à ce que les dispositions du I ne leur soient pas appliquées, ainsi qu'à leurs ayants droit, jusqu'à la fin des dispositions transitoires relatives à la libre circulation des personnes entre la Suisse et l'Union européenne, soit douze ans à partir de l'entrée en vigueur de l'accord du 21 juin 1999 précité, à condition d'être en mesure de produire un contrat d'assurance maladie les couvrant, ainsi que leurs ayants droit, pour l'ensemble des soins reçus sur le territoire français (...) ". Il résulte de ces dispositions que, par dérogation à la règle de rattachement définie par le règlement (CE) n° 883/2004, les personnes résidant en France et exerçant une activité en Suisse, qui ont demandé à bénéficier de la clause d'exemption ouverte par l'annexe II de l'accord du 21 juin 1999, relèvent, pour la couverture maladie, de la seule législation française, qui prescrit leur affiliation au régime général et, pendant une période transitoire s'achevant le 31 mai 2014, les autorisait, sur demande, à souscrire un contrat d'assurance auprès d'un opérateur privé en lieu et place de leur affiliation au régime général.

5. Il résulte de l'instruction que M. B... résidait en France et exerçait une activité en Suisse au titre des années 2012, 2013 et 2014, et qu'il a demandé à bénéficier de la clause d'exemption de l'assurance obligatoire suisse ouverte par l'annexe II de l'accord du 21 juin 1999. L'exercice par le requérant de cette faculté d'exemption conduit à rendre applicable, pour la couverture maladie, la législation sociale française, quand bien même cette législation prévoyait, durant les années d'imposition en litige, l'exercice d'une option entre l'affiliation au régime général et la souscription d'un contrat d'assurance auprès d'un opérateur privé. La circonstance que M. B... a fait usage de cette dernière faculté ne permet pas de le regarder comme relevant du régime de sécurité sociale suisse. Par suite, M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que les impositions restant en litige ont été prélevées en méconnaissance du principe d'unicité de législation.

En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance des principes d'égalité devant l'impôt, d'égalité de traitement et de non-discrimination et de liberté de circulation :

6. En premier lieu, aux termes de l'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. La libre circulation des travailleurs est assurée à l'intérieur de l'Union. / 2. Elle implique l'abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail (...). ". En l'espèce, M. B..., qui relève, ainsi qu'il a été dit plus haut, de la législation française en matière d'assurance maladie, a uniquement été assujetti aux prélèvements sociaux dont le produit est affecté au financement des fonds assurant la couverture du risque maladie. Par suite, les requérants n'établissent pas qu'ils auraient été placés, du fait de leur assujettissement à ces prélèvements, dans une situation susceptible de caractériser une entrave à la libre circulation des travailleurs garantie par l'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

7. En deuxième lieu, M. B..., qui relève, ainsi qu'il a été dit plus haut, de la législation française en matière d'assurance maladie, a uniquement été assujetti aux prélèvements sociaux dont le produit est affecté au financement des fonds assurant la couverture du risque maladie. Dans ces conditions, M. et Mme B..., qui ne relèvent pas, pour la couverture du risque maladie, de deux législations sociales différentes, ne sont pas fondés à soutenir qu'ils ont été assujettis à une double cotisation ni qu'ils ont subi une double imposition. Les requérants ne peuvent davantage utilement soutenir que l'administration a méconnu les principes d'égalité de traitement et de non-discrimination résultant des articles 157 et 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de l'article 4 du règlement (CE) n° 883/2004.

8. En dernier lieu, si M. et Mme B... soutiennent que les dispositions instituant les prélèvements en litige sont à l'origine d'une rupture d'égalité devant l'impôt entre les travailleurs frontaliers exerçant leur activité en Suisse assurés auprès d'un organisme d'assurance privée, les travailleurs frontaliers exerçant leur activité en Suisse assurés à la couverture maladie universelle en France, les travailleurs frontaliers exerçant leur activité en Suisse assurés à la loi fédérale sur l'assurance-maladie suisse (LaMal) et les personnes qui résident et exercent leur activité en France, il n'appartient pas au juge administratif, en dehors des cas où il est saisi dans les conditions prévues aux articles 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel et R. 771-3 du code de justice administrative, de se prononcer sur un moyen tiré de la non-conformité de dispositions législatives à des règles et principes de valeur constitutionnelle.

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

9. M. et Mme B... se prévalent d'une note interne du ministre des affaires sociales transmise à la direction générale des finances publiques, qui indique que : " Pour l'application de l'exonération de CSG-CRDS sur les revenus du capital et dans le cas des frontaliers avec la Suisse, il n'y a pas lieu de distinguer selon que les intéressés ont opté ou non pour la dispense d'affiliation en Suisse. Dès lors qu'ils relèvent en principe de la législation sociale suisse au regard des règles de répartition des compétences posées par le règlement (que ce soit pour toutes les branches, y compris la maladie, ou même que par exercice de l'option pour l'exemption en Suisse, ils soient affiliés à la branche maladie en France), ils sont exonérés de CSG et de CRDS (...) ". Toutefois, il est constant que cette note est relative aux seules impositions établies au titre de l'année 2019. Dans ces conditions, M. et Mme B... ne peuvent s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales à l'appui de leurs conclusions tendant à la décharge des impositions qui leur ont été assignées au titre des années 2012, 2013 et 2014.

10. En outre, au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ne peut être regardée comme une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal une prise de position qui n'émane pas de l'autorité compétente en matière d'assiette ou d'une personne disposant d'une délégation régulière de signature l'habilitant à agir au nom de cette autorité. Dans ces conditions, et en tout état de cause, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir d'un article de presse paru dans le Frontalier Magazine ni d'une lettre de la directrice des services de l'association Groupement frontalier européen à l'appui de leurs conclusions tendant à la décharge des impositions en litige.

Sur les conclusions à fin de décharge du prélèvement de solidarité de 2 % et de la contribution additionnelle au prélèvement social de 1,1 % :

11. M. et Mme B... soutiennent que la contribution additionnelle au prélèvement social et le prélèvement de solidarité entrent dans le champ du règlement (CE) n° 833/2004.

12. D'une part, aux termes de l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles : " I. - Le revenu de solidarité active est financé par le fonds national des solidarités actives mentionné au II et les départements. (...) Le fonds national des solidarités actives finance la différence entre le total des sommes versées au titre de l'allocation de revenu de solidarité active par les organismes chargés de son service et la somme des contributions de chacun des départements. Il prend également en charge ses frais de fonctionnement ainsi qu'une partie des frais de gestion exposés par les organismes mentionnés à l'article L. 262-16. (...) / III. Les recettes du fonds national des solidarités actives sont, notamment, constituées par une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale et une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l'article L. 245-15 du même code. Ces contributions additionnelles sont assises, contrôlées, recouvrées et exigibles dans les mêmes conditions et sont passibles des mêmes sanctions que celles applicables à ces prélèvements sociaux. Leur taux est fixé à 1,1' % et ne peut l'excéder (...) ". Il résulte de ces dispositions que la contribution qu'elles prévoient est spécifiquement affectée au financement du revenu de solidarité active.

13. Il résulte clairement des dispositions des articles 3 et 70 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, qui renvoient à l'annexe X de ce règlement, qu'une prestation non contributive relevant de l'assistance sociale n'entre dans le champ d'application de ce règlement que lorsqu'elle possède également les caractéristiques de la législation en matière de sécurité sociale visée au paragraphe 1 de son article 3 et à la condition, notamment, qu'elle soit mentionnée à l'annexe X à laquelle cet article renvoie.

14. Le revenu de solidarité active constitue une prestation non contributive relevant de l'assistance sociale. Alors même qu'il posséderait également les caractéristiques d'une législation en matière de sécurité sociale visée à l'article 3, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, le revenu de solidarité active n'est, en tout état de cause, pas mentionné à l'annexe X de ce règlement qui liste les branches de sécurité sociale auxquelles il s'applique.

15. Il résulte de ce qui précède que la contribution en litige, dès lors qu'elle est spécifiquement affectée au financement d'une prestation qui ne relève pas de l'article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, n'entre pas elle-même dans le champ d'application de ce règlement.

16. D'autre part, aux termes de l'article 1600-0 S du code général des impôts : " I. - Il est institué : / 1° Un prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine mentionnés à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale ; / 2° Un prélèvement de solidarité sur les produits de placement mentionnés à l'article L. 136-7 du même code. / (...) / III. - Le taux des prélèvements de solidarité mentionnés au I est fixé à 2 % (...) ". Dans sa rédaction antérieure à celle applicable à compter du 1er janvier 2015 résultant de la loi du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, le IV du même article prévoyait que le produit de ces prélèvements de solidarité était affecté, pour partie, " au fonds mentionné à l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles ", pour partie " au fonds mentionné à l'article L. 351-6 du code de la construction et de l'habitation " et enfin, pour partie, " au fonds mentionné à l'article L. 5423-24 du code du travail ".

17. Le fonds national d'aide au logement finance l'aide personnalisée au logement, la prime de déménagement prévue à l'article L. 351-5 du code de la construction et de l'habitation et les dépenses de gestion qui s'y rapportent, les dépenses du conseil national de l'habitat ainsi que l'allocation de logement relevant du titre III du livre VIII du code de la sécurité sociale et les dépenses de gestion qui s'y rapportent. Contrairement à ce que soutient les requérants, les prestations ne relèvent d'aucune des branches de sécurité sociale au sens de l'article 3, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004. En particulier, elles ne relèvent pas de la branche qui concerne les " prestations familiales " au sens du z) de l'article 1er du règlement (CE) n° 883/2004, dès lors qu'elles ne sont pas " destinées à compenser les charges de famille ".

18. En vertu de l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable avant le 1er janvier 2015, le fonds national des solidarités actives finance une part du revenu de solidarité active. Pour les motifs exposés précédemment, cette prestation ne relève pas de l'article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004.

19. Enfin, en vertu de l'article L. 5423-24 du code du travail, le fonds de solidarité gère les moyens de financement de l'allocation de solidarité spécifique prévue à l'article L. 5423-1, de l'allocation équivalent retraite prévue à l'article L. 5423-18, de la prime forfaitaire prévue à l'article L. 5425-3 et de l'aide prévue au II de l'article 136 de la loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 de finances pour 1997. D'une part, l'allocation de solidarité spécifique n'est pas une " prestation de chômage " au sens de l'article 3, paragraphe 1, sous h) du règlement (CE) n° 83/2004 du 29 avril 2004. Il en va de même pour l'allocation équivalent retraite ainsi que pour les deux autres prestations financées par le fonds de solidarité. D'autre part, à supposer que ces prestations spéciales à caractère non contributif financées par le fonds de solidarité entrent dans le champ défini au paragraphe 1 de l'article 70 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, elles ne sont, en tout état de cause, pas énumérées à l'annexe X de ce règlement.

20. Aucune des prestations financées par les trois fonds mentionnés à l'article 1600-0 S du code général des impôts auxquels est spécifiquement affecté le prélèvement de solidarité prévu à l'article 1600-0 S du code général des impôts dans sa rédaction applicable avant le 1er janvier 2015 n'entre dans le champ d'application du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004. Dès lors que le prélèvement de solidarité est spécifiquement affecté au financement de prestations qui ne relèvent pas du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, il n'entre pas lui-même dans le champ d'application de ce règlement. Le moyen tiré de ce que ce prélèvement méconnaît son article 11 est, dès lors, inopérant.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au demeurant non chiffrées, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 4 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

Mme Evrard, présidente de la formation de jugement,

Mme Caraës, première conseillère,

Mme Lesieux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 décembre 2021.

2

N° 20LY02337


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02337
Date de la décision : 08/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices.


Composition du Tribunal
Président : Mme EVRARD
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : JOUANJAN et PARTNERS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-12-08;20ly02337 ?
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