La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/11/2021 | FRANCE | N°21LY00760

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 18 novembre 2021, 21LY00760


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 2 septembre 2019 par lequel le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2002285 du 12 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de l'Ain de délivrer à Mme B... un titre de séj

our portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 2 septembre 2019 par lequel le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2002285 du 12 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de l'Ain de délivrer à Mme B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédures devant la cour

Par une requête, enregistrée le 8 mars 2021, le préfet de l'Ain demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de Mme B....

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que le tribunal a méconnu l'étendue de son contrôle ;

- l'arrêté contesté ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Mme B... a produit un mémoire, enregistré le 12 octobre 2021, par lequel elle conclut au rejet de la requête, à ce que lui soit accordée l'aide juridictionnelle provisoire et à ce que soit mise à la charge de son conseil la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle s'en remet pour le surplus aux moyens soulevés en première instance.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91 647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Evrard, présidente-assesseure ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... B..., ressortissante ivoirienne née le 1er janvier 2001, est entrée en France le 24 juillet 2015 sous couvert d'un visa de court séjour. Le 7 septembre 2017, le préfet a refusé de lui délivrer un document de circulation pour étranger mineur. Mme B... a sollicité, le 3 décembre 2018, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 2 septembre 2019, le préfet de l'Ain a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 12 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de l'Ain de délivrer à Mme B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Le préfet de l'Ain relève appel de ce jugement.

2. Il ressort des pièces du dossier que, si Mme B... résidait en France depuis quatre ans à la date de l'arrêté du 2 septembre 2019, l'intéressée n'a jamais été autorisée à séjourner sur le territoire français, qu'aucun membre de sa famille n'y réside, qu'elle est hébergée dans un logement mis à sa disposition par une association caritative et qu'elle ne démontre l'existence d'aucune attache intense et stable au regard de celles dont elle dispose en Côte-d'Ivoire où elle a vécu jusqu'à sa quinzième année et où demeurent ses parents ainsi que les autres membres de sa famille. Si Mme B... a obtenu le diplôme du brevet des collèges ainsi que, postérieurement à l'arrêté du 2 septembre 2019, le baccalauréat professionnel " Logistique ", le préfet de l'Ain fait valoir, sans être contredit, que l'intéressée n'a pas sollicité son admission au séjour pour poursuivre des études ni fait état auprès de ses services d'un quelconque projet professionnel précis. Au demeurant, aucun élément ne s'oppose à ce que Mme B... poursuive ses études dans son pays d'origine. Enfin, les seules circonstances qu'elle maîtrise la langue française, qu'elle a suivi sa scolarité avec assiduité afin de surmonter ses difficultés d'apprentissage et qu'elle s'est montrée investie dans la vie lycéenne ne sont pas de nature à justifier son admission au séjour. Il en résulte que la décision par laquelle le préfet de l'Ain a refusé d'admettre Mme B... au séjour n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée. Par suite, c'est à tort que le tribunal a retenu ce motif pour annuler cette décision, et par voie de conséquence, la décision portant obligation de quitter le territoire français, celle fixant le délai de départ volontaire et celle fixant le pays de destination.

3. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... tant devant le tribunal administratif de Lyon que devant la cour.

4. L'arrêté contesté a été signé par M. C... A..., directeur de la citoyenneté et de l'intégration de la préfecture de l'Ain, qui disposait d'une délégation de signature du préfet de l'Ain, par un arrêté du 27 août 2019 publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture le 28 août 2019. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté doit être écarté comme manquant en fait.

5. Ni la durée du séjour de Mme B... en France, ni l'obtention du diplôme du brevet des collèges ainsi que, postérieurement à l'arrêté du 2 septembre 2019, celle du baccalauréat professionnel " Logistique ", ni encore la circonstance, au demeurant non établie, que la personne qui a été chargée d'élever Mme B... serait décédée ne suffisent à caractériser l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Compte tenu de la situation privée et familiale de Mme B... décrite précédemment, le préfet de l'Ain n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant à l'encontre de l'intéressée un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de faire usage de son pouvoir de régularisation.

7. L'obligation de quitter le territoire français, la décision fixant un délai de départ volontaire et la décision fixant le pays de destination ne sont pas illégales en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour.

8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que le préfet de l'Ain est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 2 septembre 2019. En conséquence, ce jugement doit être annulé et la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Lyon doit être rejetée. Les conclusions de Mme B... présentées en appel tendant à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, lui verse une somme au titre des frais du litige doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2002285 du tribunal administratif de Lyon du 12 février 2021 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal et ses conclusions d'appel présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

Mme Caraës, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 novembre 2021.

4

N° 21LY00760


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00760
Date de la décision : 18/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : SCP COUDERC - ZOUINE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-11-18;21ly00760 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award