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18/11/2021 | FRANCE | N°20LY03831

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 18 novembre 2021, 20LY03831


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 7 août 2019 par lequel le préfet de la Drôme a retiré la carte de résident de 10 ans dont il était titulaire et lui a délivré une carte de séjour d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 1906752 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 28 décembre 2020, M. B..., représenté par Me Clément, demande

à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 décembre 2020 ;

2°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 7 août 2019 par lequel le préfet de la Drôme a retiré la carte de résident de 10 ans dont il était titulaire et lui a délivré une carte de séjour d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 1906752 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 28 décembre 2020, M. B..., représenté par Me Clément, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Drôme du 7 août 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer une carte de résident ou à défaut de procéder au réexamen de sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, entraînant le cas échéant renonciation à la perception de l'indemnité d'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- aucun texte n'autorise le préfet à retirer une carte de résident pour menace à l'ordre public à l'exception du titulaire d'une carte de résident longue durée-UE ;

- la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et est, à tout le moins, entache d'une erreur manifeste d'appréciation, alors que les condamnations dont il a fait l'objet sont anciennes, de sorte qu'il n'existe pas de menace grave et actuelle de trouble à l'ordre public.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2021, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés sont infondés.

Par une décision du 3 février 2021, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle de M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 2011 pris pour son application ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ;

- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant tunisien né en 1975, relève appel du jugement du 15 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Drôme du 7 août 2019 retirant la carte de résident de 10 ans valable du 3 octobre 2012 au 2 octobre 2022 dont il était titulaire et lui délivrant une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Les dispositions de l'article R. 414-3 du code de justice administrative organisent la transmission par voie électronique des pièces jointes à la requête à partir de leur inventaire détaillé et font obligation à son auteur de les transmettre soit en un fichier unique, chacune d'entre elles devant alors être répertoriée par un signet la désignant, soit en les distinguant chacune par un fichier désigné, l'intitulé des signets ou des fichiers devant être conforme à l'inventaire qui accompagne la requête.

3. La demande de première instance de M. B..., déposée par le biais d'un avocat inscrit dans l'application informatique " Télérecours ", était accompagnée de quatre pièces jointes identifiées individuellement par un signet sous un numéro d'ordre correspondant à l'inventaire des pièces jointes qui les répertoriait par numéro en les désignant nominativement avec précision.

4. Il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par le préfet de la Drôme doit être écartée.

Sur la légalité de l'arrêté du 7 août 2019 :

5. Il résulte des stipulations de l'article 11 de l'accord franco-tunisien que les points non traités par cet accord relèvent de la législation de chacun des deux Etats. Ni l'article 10 ni aucune autre stipulation de cet accord ne traite du cas de retrait de la carte de résident.

6. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué que la décision litigieuse a été prise au visa de l'article L. 314-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui s'il dispose que " La carte de résident peut être refusée à tout étranger dont la présence constitue une menace pour l'ordre public. " ne permet pas de retirer une telle carte. Si le détenteur d'une carte de résident peut voir son titre retiré s'il fait l'objet d'une mesure d'expulsion, dès lors que les conditions de celle-ci sont réunies, ni l'accord franco-tunisien ainsi qu'il a été dit au point précédent, ni aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile traitant des points non traités par l'accord, ne permet de retirer une carte de résident à son détenteur au motif qu'il constitue une menace pour l'ordre public. Il résulte de ce qui précède que, comme le soutient M. B..., la décision de retrait de sa carte de résident est entachée d'une erreur de droit et doit être annulée.

7. Il résulte de ce qui précède, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, sans qu'il soit besoin d'en examiner la régularité, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".

9. L'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Drôme restitue sa carte de résident au requérant. Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du présent arrêt.

Sur les frais d'instance :

10. La demande d'aide juridictionnelle de M. B... ayant été rejetée, son conseil ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. M. B... ayant demandé le paiement des frais exposés et non compris dans les dépens en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à ce dernier de la somme de 1 500 euros sur ce fondement.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 décembre 2020 et l'arrêté du préfet de la Drôme du 7 août 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Drôme de restituer à M. B... sa carte de résident dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 2 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 novembre 2021.

4

N° 20LY03831


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03831
Date de la décision : 18/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CLEMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-11-18;20ly03831 ?
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