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18/11/2021 | FRANCE | N°19LY04800

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 18 novembre 2021, 19LY04800


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme M... L..., Mme H... I..., M. J... F..., M. B... D..., M. C... K..., Mme N... O... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 16 aout 2018 par lesquelles la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, après avoir retiré ses décisions implicites rejetant le recours hiérarchique de la société BCBG Max Azria Group SAS contre les décisions du 23 janvier 2018 de l'inspecteur du travail refusant d'autoriser leur licenciement, a annul

é ces décisions de l'inspecteur du travail et autorisé leur licenciemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme M... L..., Mme H... I..., M. J... F..., M. B... D..., M. C... K..., Mme N... O... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 16 aout 2018 par lesquelles la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, après avoir retiré ses décisions implicites rejetant le recours hiérarchique de la société BCBG Max Azria Group SAS contre les décisions du 23 janvier 2018 de l'inspecteur du travail refusant d'autoriser leur licenciement, a annulé ces décisions de l'inspecteur du travail et autorisé leur licenciement pour motif économique, et M. E... G... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 16 novembre 2018 par laquelle la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, après avoir retiré sa décision implicite rejetant le recours hiérarchique de la société BCBG Max Azria Group SAS contre la décision du 15 mai 2018 de l'inspecteur du travail refusant d'autoriser son licenciement, a annulé cette décision de l'inspecteur du travail et a autorisé son licenciement pour motif économique.

Par jugement nos 1806576, 1806563, 1806564, 1806574, 1806575, 1806577 et 1900271 du 4 novembre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 30 décembre 2019, présentée pour Mme M... L... et autres, il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement nos 1806576, 1806563, 1806564, 1806574, 1806575, 1806577 et 1900271 du 4 novembre 2019 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les décisions en litige sont insuffisamment motivées, en ce qu'elles ne visent pas les textes applicables au licenciement pour motif économique sur le fondement desquels l'inspection du travail doit contrôler la régularité de la rupture du contrat de travail dont l'autorisation est sollicitée ;

- c'est à tort que l'administration a autorisé leurs licenciements qui reposent sur des offres de reclassement insuffisantes, dès lors que l'employeur n'a recherché les possibilités de reclassement ni parmi les sociétés avec lesquelles la société BCBG Max Azria Group SAS avait une relation capitalistique, ni avec les sociétés entrant dans le groupe de reclassement du fait du caractère particulièrement étroit de leur relation avec l'entreprise liquidée ;

- le lien éventuel entre les licenciements et leurs mandats n'a fait l'objet d'aucune vérification.

La ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion a produit un mémoire, enregistré le 6 octobre 2020, qui n'a pas été communiqué.

Par ordonnance du 16 septembre 2020 la clôture de l'instruction a été fixée au 30 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Seillet, président assesseur ;

- et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La société BCBG Max Azria Group SAS, qui avait pour activité la vente de prêt-à-porter féminin et employait alors cent trente et un salariés, a été placée, dans un premier temps, en redressement judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Romans-sur-Isère du 8 mars 2017. Dans un second temps, le redressement judiciaire de la société BCBG Max Azria Group SAS a été converti en liquidation judiciaire par un jugement du 16 octobre 2017 du même tribunal de commerce, qui a autorisé la poursuite de son activité jusqu'au 31 octobre 2017. Par une décision du 13 novembre 2017, dont la légalité a été contestée tant devant le tribunal administratif de Grenoble que devant la cour, qui a rejeté le recours formé par des salariés de cette société par un arrêt du 31 août 2018, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) d'Auvergne-Rhône-Alpes a homologué le document élaboré par la société BCBG Max Azria Group SAS, fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de cette société. Le liquidateur a, à la suite de cette homologation, saisi l'inspection du travail, par des lettres des 24 novembre 2017 et 15 mars 2018, aux fins d'autoriser le licenciement pour motif économique de Mme I..., M. A... F..., M. D..., M. K..., Mme O... et M. G..., salariés protégés. Par des décisions du 23 janvier 2018, l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement de Mme L..., Mme I..., M. K..., M. D..., M. A... F... et Mme O... et il a également refusé d'autoriser le licenciement de M. G... par une décision du 15 mai 2018. Suite aux recours hiérarchiques présentés par le liquidateur judiciaire, la ministre du travail a, par des décisions des 16 aout et 16 novembre 2018, retiré ses décisions implicites rejetant les recours hiérarchiques de la société BCBG Max Azria Group SAS contre ces décisions de l'inspecteur du travail, a annulé lesdites décisions et autorisé le licenciement des salariés pour motif économique. Mme L... et autres relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes d'annulation de ces décisions par lesquelles la ministre chargée du travail a autorisé leurs licenciements.

2. En vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou leur appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation économique de l'entreprise ou des entreprises du même groupe œuvrant dans le même secteur d'activité justifie le licenciement du salarié en tenant compte notamment de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié.

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 2422-1 du code du travail : " Le ministre chargé du travail peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur (...) ". Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) ". Les décisions contestées des 16 aout et 16 novembre 2018 de la ministre chargée du travail visent les articles L. 2411-1 et suivants du code du travail et, après avoir indiqué les motifs pour lesquels la ministre a estimé que l'inspecteur avait commis une illégalité en se fondant sur le motif retenu pour refuser les autorisations sollicitées, elles se prononcent tant sur les éléments qui l'ont conduite à considérer que le motif économique était établi, en relevant la liquidation judiciaire prononcée par le tribunal de commerce, que sur l'absence de lien entre les demandes d'autorisation de licenciement et les mandats détenus par les salariés. En motivant ainsi ses décisions, la ministre chargée du travail n'a pas méconnu l'obligation de motivation à laquelle elle était légalement tenue et le moyen tiré du défaut de motivation doit dès lors être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 1233-4 du code du travail, dans sa version applicable au litige : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. "

5. Il résulte des dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail que, pour apprécier si l'employeur ou le liquidateur judiciaire a satisfait à son obligation en matière de reclassement, l'autorité administrative saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique d'un salarié protégé doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel. Toutefois, lorsque le licenciement projeté est inclus dans un licenciement collectif qui requiert l'élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi, lequel comprend, en application de l'article L. 1233-61 du code du travail, un plan de reclassement, et que ce plan est adopté par un document unilatéral, l'autorité administrative, si elle doit s'assurer de l'existence, à la date à laquelle elle statue sur cette demande, d'une décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi, à défaut de laquelle l'autorisation de licenciement ne peut légalement être accordée, ne peut ni apprécier la validité du plan de sauvegarde de l'emploi ni, plus généralement, procéder aux contrôles mentionnés à l'article L. 1233-57-3 du code du travail qui n'incombent qu'au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi compétemment saisi de la demande d'homologation du plan. Il ne lui appartient pas davantage, dans cette hypothèse, de remettre en cause le périmètre du groupe de reclassement qui a été déterminé par le plan de sauvegarde de l'emploi pour apprécier s'il a été procédé à une recherche sérieuse de reclassement du salarié protégé.

6. D'une part, ainsi qu'il a été dit au point 1, les licenciements projetés étaient inclus dans un licenciement collectif qui avait requis l'élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi, lequel comprenait, en application de l'article L. 1233-61 du code du travail, un plan de reclassement et ce plan avait été adopté par un document unilatéral homologué par une décision du 13 novembre 2017 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) d'Auvergne-Rhône-Alpes. Il n'appartenait pas, dès lors, à l'autorité administrative saisie des demandes d'autorisation de licenciement pour motif économique des salariés protégés, de remettre en cause le périmètre du groupe de reclassement qui avait été déterminé par le plan de sauvegarde de l'emploi pour apprécier s'il avait été procédé à une recherche sérieuse de reclassement des salariés protégés.

7. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier, et n'est au demeurant pas sérieusement soutenu, que d'autres entreprises du groupe dont fait partie la société BCBG Max Azria Group SAS auraient disposé d'emplois disponibles situés sur le territoire national ni que d'autres sociétés étaient comprises dans le périmètre du groupe de reclassement qui avait été déterminé par le plan de sauvegarde de l'emploi. Dès lors, en constatant que le liquidateur de cette société, dont la liquidation, prononcée par un jugement du tribunal de commerce de Romans-sur-Isère du 16 octobre 2017, prévoyait le licenciement pour motif économique de tous les salariés, n'était soumis à aucune obligation de recherche de reclassement sur le territoire national, l'autorité administrative n'a pas méconnu son obligation de s'assurer que le liquidateur judiciaire avait procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement des salariés.

8. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que les demandes d'autorisation de licenciement, alors qu'ainsi qu'il a été dit la liquidation judiciaire, prononcée par un jugement du tribunal de commerce de Romans-sur-Isère du 16 octobre 2017, prévoyait le licenciement pour motif économique de tous les salariés, soient fondées non sur les motifs économiques invoqués mais sur des motifs tirés de l'appartenance syndicale des intéressés ou de l'exercice par eux des mandats qui leur étaient confiés et il en ressort que l'autorité administrative a procédé au contrôle qui lui incombait sur ce point.

9. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés à l'occasion du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme L... et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme M... L..., première dénommée, pour l'ensemble des requérants, en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et au liquidateur judiciaire.

Délibéré après l'audience du 21 octobre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 novembre 2021.

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N° 19LY04800


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04800
Date de la décision : 18/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07 Travail et emploi. - Licenciements.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : SCP NOUVEL RILOV SANTULLI

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-11-18;19ly04800 ?
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