Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A..., a demandé au tribunal administratif de Dijon :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 novembre 2016 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Saône-et-Loire lui a infligé la sanction de révocation ;
2°) d'enjoindre au SDIS de Saône-et-Loire de le réintégrer dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
3°) subsidiairement, d'enjoindre au SDIS de Saône-et-Loire de reprendre une décision dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1701313 du 7 décembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 15 avril 2019, M. A..., représenté par Me Vermorel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 7 décembre 2018 ;
2°) d'enjoindre au SDIS de Saône-et-Loire de le réintégrer dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
3°) subsidiairement, d'enjoindre au SDIS de Saône-et-Loire de reprendre une décision plus proportionnée dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge du SDIS de Saône-et-Loire une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que son état de santé n'a pas été pris en considération dans l'examen de la proportionnalité de la sanction prononcée à son encontre.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2019, le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Saône-et-Loire représenté par Me Petit :
1°) conclut au rejet de la requête ;
2°) et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête de première instance était tardive ;
- la requête d'appel est insuffisamment motivée ;
- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 12 novembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 19 décembre 2019.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er février 2019.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me Cottignies, représentant le SDIS de Saône-et-Loire ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2016 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Saône-et-Loire lui a infligé la sanction de révocation et d'enjoindre au SDIS de Saône-et-Loire de le réintégrer. Le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de M. A... par un jugement du 7 décembre 2018 dont il relève appel.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. ". Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...) Quatrième groupe : (...) la révocation (...) ". Les dispositions de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à ce que le comportement d'un fonctionnaire en dehors du service puisse constituer une faute de nature à justifier une sanction lorsqu'il a pour effet de perturber le bon déroulement du service ou de jeter le discrédit sur l'administration. De même, l'état mental d'un fonctionnaire ne fait pas obstacle à ce qu'il puisse être regardé au moment des faits qui lui sont reprochés comme responsable de ses actes ni à ce que, par suite, une sanction disciplinaire soit légalement prononcée à son encontre.
3. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
4. Le 19 décembre 2015, M. B... A..., sapeur-pompier professionnel depuis le 1er octobre 1994 et titulaire du grade de sergent-chef, appartenant au SDIS de Saône-et-Loire et qui exerce également les fonctions de sapeur-pompier volontaire à Toulon-sur-Arroux, a provoqué, au volant de son véhicule personnel un accident de la circulation, sur le territoire de cette commune, faisant cinq victimes, dont un décès et quatre blessés graves. Au moment de l'accident, M. A... était en état d'ivresse et roulait à une vitesse excessive. Ayant été reconnu coupable d'homicide involontaire par conducteur de véhicule terrestre à moteur sous l'empire d'un état alcoolique et de conduite d'un véhicule à une vitesse excessive à raison de ces faits, il a été condamné par le tribunal correctionnel de Mâcon, le 17 août 2016, à une peine d'emprisonnement de 36 mois assortie d'un sursis de 18 mois avec mise à l'épreuve. Le conseil de discipline, dans sa séance du 24 novembre 2016, à l'unanimité, a proposé la révocation de M. A.... Le conseil de discipline de recours, dans sa séance du 16 mars 2017 a rejeté la demande de l'intéressé en estimant que la sanction n'était pas disproportionnée. Ces faits, compte tenu de leur extrême gravité et de leur caractère incompatible avec les fonctions de l'agent, sont de nature à justifier une sanction disciplinaire alors même que l'agent n'était pas en service lors de l'accident.
5. M. A..., qui ne conteste pas la matérialité des faits, n'est pas fondé à soutenir que son état de santé n'aurait pas été pris en considération dans l'examen de la proportionnalité de la sanction, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier, notamment, d'une part, de l'attestation de suivi de médecine professionnelle et d'aptitude du 16 janvier 2017, que l'appelant a été pris en charge par la médecine préventive du SDIS de Saône-et-Loire et qu'il a fait l'objet d'un suivi personnalisé important en 2010, 2011 et 2015, d'autre part, de l'attestation de l'expert psychiatre du 10 décembre 2015, que M. A... ne pouvait reprendre une activité opérationnelle tant qu'il demeurait atteint de troubles mentaux et de troubles du comportement liés à l'utilisation de substances à visée psychoactive (alcool). En outre, l'appelant ne produit aucune pièce médicale justifiant qu'il aurait souffert d'un syndrome de stress post-traumatique en lien avec les missions exercées entrainant une dépendance à l'alcool insuffisamment prise en compte par le service.
6. Il ressort également des pièces du dossier que l'état de santé de M. A..., caractérisé par une forte dépendance à l'alcool et un état dépressif, n'était pas de nature à faire obstacle à ce qu'il soit regardé comme responsable de ses actes ni à ce que, en conséquence, une sanction disciplinaire soit légalement prononcée à son encontre. Ensuite, cet accident a causé le décès du fils d'un sapeur-pompier volontaire lui-même collègue et voisin de l'appelant et a blessé gravement plusieurs personnes. Les circonstances de l'accident, et le procès consécutif à ces faits, ont reçu une publicité importante et ont été relatées dans la presse locale, laquelle a fait état de la qualité de sapeur-pompier de M. A... et de fils de sapeur-pompier de la victime. En outre, M. A... qui était en état d'ivresse lors de l'accident, avait fait l'objet le 1er décembre 2015 d'une sanction du deuxième groupe à raison d'un état d'ébriété constaté durant le service en mai 2015. Eu égard à la nature particulière et à la gravité des faits et à leurs conséquences dramatiques, aux fonctions du requérant, à l'atteinte portée à la réputation du service départemental d'incendie et de secours de Saône-et-Loire qui est chargé d'une mission particulière de protection de la population et dont l'efficacité repose sur le respect de règles de comportement et de discipline, et de l'atteinte portée à l'honneur et à la considération du corps, l'autorité disciplinaire n'a pas pris, en l'espèce, une sanction disproportionnée en décidant de révoquer M. A....
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du SDIS de Saône-et-Loire, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. A.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le paiement des frais exposés par le SDIS de Saône-et-Loire au titre de ces mêmes dispositions.
DECIDE:
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du SDIS de Saône-et-Loire présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au SDIS de Saône-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2021, à laquelle siégeaient :
Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 novembre 2021.
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N° 19LY01451