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21/10/2021 | FRANCE | N°21LY00632

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 21 octobre 2021, 21LY00632


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2020 par lequel le préfet de l'Yonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2002099 du 19 janvier 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 25 février 2021, Mme C..., représent

ée par Me Fiumé, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2020 par lequel le préfet de l'Yonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2002099 du 19 janvier 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 25 février 2021, Mme C..., représentée par Me Fiumé, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

- la décision méconnait le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet a commis une erreur de droit en examinant sa situation au regard de la prise en charge de l'enfant par son père qui n'est pas demandeur d'un titre de séjour ;

- la décision méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision sera annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- la décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :

- la décision sera annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision sera annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire, enregistré le 22 août 2021, le préfet de l'Yonne, représenté par Me Claisse, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Caraës ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Selon ses déclarations, Mme A... C..., ressortissante congolaise née le 29 avril 1986, est entrée en France pour la dernière fois le 30 octobre 2016 sous couvert d'un visa de court séjour. Le 20 août 2019, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 8 juillet 2020, le préfet de l'Yonne a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme C... relève appel du jugement du 19 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Lorsque le préfet recherche d'office si l'étranger peut bénéficier d'un titre de séjour sur un ou plusieurs autres fondements possibles, l'intéressé peut se prévaloir à l'encontre de la décision de rejet de sa demande de titre de séjour de la méconnaissance des dispositions au regard desquelles le préfet a également fait porter son examen.

3. Si Mme C... a sollicité son admission au séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Yonne a également procédé à l'examen de sa demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code précité. Il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet de l'Yonne ne s'est pas uniquement fondée sur l'absence de justification de la durée de son séjour en France pour rejeter sa demande mais également sur le fait que l'intéressée, qui n'est pas isolée dans son pays d'origine où résident sa mère et son frère, ne justifie ni de la réalité, de l'intensité et de la stabilité de ses liens privés et familiaux ni de son insertion professionnelle en France et qu'elle n'établit pas que le père déclaré de son enfant de nationalité française contribue à l'entretien et à l'éducation de celui-ci. Il ressort des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était fondé uniquement sur ces motifs. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Yonne était tenu de l'inviter à produire des justificatifs de sa présence en France depuis novembre 2016 doit être écarté.

4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable aux demandes de titres déposées à compter du 1er mars 2019, " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ; ".

5. Il résulte des dispositions du IV de l'article 71 de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 que le second alinéa du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile tel qu'il résulte des dispositions du I de l'article 55 de ladite loi, entrée en vigueur le 1er mars 2019, s'applique à la demande de Mme C... présentée le 20 août 2019.

6. Il résulte de ces dispositions que la délivrance d'un titre de séjour est subordonnée à ce que l'auteur de la reconnaissance, lorsqu'il n'est pas le postulant au séjour, contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant. Il ressort des pièces du dossier que la requérante est la mère d'une enfant, née le 2 novembre 2016, qui a été reconnue le 4 novembre 2016 par M. B... de nationalité française. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Yonne a commis une erreur de droit en exigeant qu'elle établisse que le père de l'enfant français, auteur de la reconnaissance, contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil.

7. Si le père de l'enfant, ainsi que la tante de Mme C..., attestent en des termes très généraux qu'il s'occupe de sa fille, ces attestations imprécises ne suffisent pas à démontrer la réalité d'une contribution effective et personnelle de M. B... à l'entretien et l'éducation de son enfant. Par suite, la décision n'a pas méconnu le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de la requérante.

8. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable, " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; ".

9. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... déclare être entrée en France le 30 octobre 2016. Elle n'établit ni l'ancienneté ni l'intensité ou la stabilité des liens qui l'uniraient avec le père de son enfant ni que ce dernier participe à son entretien et son éducation. Mme C... n'est pas dépourvue d'attaches familiales en République démocratique du Congo où résident sa mère et son frère. Par ailleurs, elle ne justifie d'aucune insertion particulière en France. Dans ces conditions, en refusant de délivrer un titre de séjour à Mme Mme C..., le préfet de l'Yonne n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de la requérante.

10. Mme C... fait valoir que son état de santé ainsi que celui de sa fille nécessitent une prise en charge médicale indisponible dans son pays d'origine. Si un certificat médical du 6 juin 2018 indique que l'état de santé de l'enfant de la requérante doit être suivi régulièrement jusqu'à ses sept ans en raison de sa grande prématurité, il n'est pas établi que les soins nécessaires ne seraient pas disponibles en République démocratique du Congo. S'agissant de l'état de santé de Mme C..., qui n'a pas présenté de demande de titre de séjour le fondement de son état de santé, un certificat médical du 14 mars 2019 indique qu'elle présente une maladie hématologique nécessitant un suivi régulier et rapproché dans un milieu hospitalier spécialisé et un nouveau certificat médical du pôle cancérologie du centre hospitalier d'Argenteuil du 29 octobre 2020, postérieur à la décision critiquée, précise que " l'hémopathie dont elle souffre est bien de nature cancéreuse et nécessite une prise en charge spécialisée en France (...). Il est clair que, en termes de morbidité et mortalité, une prise en charge dans son pays d'origine représenterait une perte de chance ". Toutefois, à la date de la décision critiquée, il n'est pas établi que la requérante ne pouvait pas bénéficier du traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine.

11. Eu égard à ce qui a été dit aux points 8 et 9, le préfet de l'Yonne n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que Mme C... ne justifiait pas de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

12. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 11 que Mme C... n'est pas fondée à exciper, à l'encontre de la décision en litige, de l'illégalité du refus de titre de séjour.

13. Le moyen tiré de ce que la décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant en raison de l'état de santé de son enfant doit être écarté pour le motif exposé au point 10 du présent arrêt.

Sur la légalité de la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :

14. Il résulte de ce qui a été dit aux points 11 et 12 que Mme C... n'est pas fondée à exciper, à l'encontre de la décision en litige, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

15. Il résulte de ce qui a été dit aux points 11 et 12 que Mme C... n'est pas fondée à exciper, à l'encontre de la décision en litige, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles à fin de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Evrard, présidente assesseure,

Mme Caraës, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2021.

2

N° 21LY00632


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00632
Date de la décision : 21/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : FIUMÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-10-21;21ly00632 ?
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