Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 26 mai 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2004982 du 29 octobre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 8 février 2021, M. B..., représenté par Me Drahy, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 26 mai 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " vie privée et familiale ", ou subsidiairement, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; à titre infiniment subsidiaire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant le réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. B... soutient que :
- la décision de refus de séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière, à défaut pour le préfet de justifier de la compétence des médecins du collège de l'Office français de l'immigration et de ce que cet avis a été précédé du rapport médical d'un médecin ;
- elle méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie d'exception d'illégalité du refus de séjour ;
- la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie d'exception d'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.
En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 décembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Pruvost, président ;
Considérant ce qui suit :
1. M. D... B..., de nationalité centrafricaine né en 1983, est entré en France en novembre 2015 selon ses déclarations. Sa demande de protection internationale a été rejetée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile le 4 juillet 2019. Sur demande de sa part présentée le 13 juillet 2018, il a été muni d'une carte de séjour temporaire en raison de son état de santé, valable du 28 décembre 2018 au 27 décembre 2019. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 26 mai 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de renouveler ce titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt jours et a fixé le pays de destination.
Sur le refus de renouvellement de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". L'article R. 313-22 de ce code prévoit que " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ".
3. Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical, conformément au modèle figurant à l'annexe B du présent arrêté ". Son article 6 indique que " Au vu du rapport médical (...) un collège de médecins (...) émet un avis (...) précisant: / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. (...) Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
4. Il résulte de l'ensemble des dispositions précitées que l'avis médical destiné à éclairer la décision du préfet, saisi d'une demande de titre en raison de l'état de santé du demandeur, doit être lui-même pris au vu d'un rapport médical spécialement établi par un autre médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, auquel il incombe d'instruire le dossier et à qui le collège de médecins pourra, en tant que de besoin, demander toute précision complémentaire utile à son appréciation. La régularité de l'avis émis, et par suite de la décision préfectorale, est dès lors normalement subordonnée à ce que cet avis ait pu être rendu après que le dossier a été régulièrement instruit par le rapporteur et éclairé par son rapport.
5. Contrairement à ce que soutient M. B..., la mention, sur l'avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de ce qu'il a été rendu au vu du rapport établi par le Dr A..., et l'indication par le préfet de ce que ce rapport a été établi le 3 janvier 2020, permettent de considérer que cet avis a bien été rendu et communiqué au collège avant que ce dernier émette lui-même son avis, sauf preuve du contraire non rapportée par M. B.... En effet, ni la circonstance que la première partie de l'avis du collège de médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne soit pas renseignée, ni le fait que le préfet n'a pas produit l'avis émis par le Dr A..., auquel il n'a d'ailleurs pas accès, le respect du secret médical qui est dû à M. B... faisant obstacle à une communication de cet avis au préfet, ne permettent d'en déduire le contraire.
6. Par ailleurs, aux termes de l'annexe I à la décision du 18 novembre 2019 portant désignation au collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, les Dr C..., Bourgeois et Ricatte étaient compétents pour émettre l'avis du 23 janvier 2020 qu'ils ont tous trois signé. Le moyen tiré de ce qu'ils n'avaient pas compétence pour rendre l'avis en cause manque donc en fait.
7. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé conforme à ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à faire obstacle à son éloignement. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
8. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande dont il était saisi, le préfet du Rhône s'est approprié le sens de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 23 janvier 2010 selon lequel l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque. Il résulte de l'instruction que M. B... a subi plusieurs interventions chirurgicales depuis son arrivée en France comportant la pose de prothèses de hanche et de genou gauche en 2016, une arthrodèse de la cheville gauche en novembre 2019 et une ostéosynthèse de fracture tibiale gauche en avril 2020. S'il résulte du certificat médical et des ordonnances produits qu'il souffre de douleurs neuropathiques post-traumatiques et post-chirurgicales, ces éléments n'invalident pas l'avis du collègue de médecins de l'OFII selon lequel un défaut de traitement ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé. La seule circonstance que M. B... a fait des démarches auprès de la maison départementale des personnes handicapées, dont les résultats ne sont au demeurant pas connus, ne permet pas davantage d'invalider ce constat. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de renouveler son titre de séjour, le préfet a méconnu le 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. A l'appui de ses conclusions dirigées contre le refus de renouvellement de son titre de séjour, M. B... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance, tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste commise dans l'appréciation des conséquences de la décision sur le séjour sur sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif.
Sur l'obligation de quitter le territoire et la décision fixant le pays de destination :
10. A l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire et la décision désignant le pays de destination, M. B... reprend en appel les moyens, qu'il avait invoqués en première instance, tirés de l'annulation de ces décisions par voie d'exception de l'illégalité du refus de séjour. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif.
11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 21 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme Lesieux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 octobre 2021.
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N° 21LY00404