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14/10/2021 | FRANCE | N°19LY02918

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 14 octobre 2021, 19LY02918


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Prestig Immo et M. A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler, d'une part, la décision du 3 avril 2017 par laquelle la commission permanente de la Métropole de Lyon a approuvé la cession d'un bâtiment de bureaux situé au 32 rue Sainte-Hélène à la SCI Bureaux Sainth ou à toute personne morale désignée par elle, ensemble le rejet de leur recours gracieux et, d'autre part, l'acte de signer le contrat de vente.

Par un jugement n° 1706965 du 29 mai 2019, le tribunal a re

jeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 25 ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Prestig Immo et M. A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler, d'une part, la décision du 3 avril 2017 par laquelle la commission permanente de la Métropole de Lyon a approuvé la cession d'un bâtiment de bureaux situé au 32 rue Sainte-Hélène à la SCI Bureaux Sainth ou à toute personne morale désignée par elle, ensemble le rejet de leur recours gracieux et, d'autre part, l'acte de signer le contrat de vente.

Par un jugement n° 1706965 du 29 mai 2019, le tribunal a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 25 juillet 2019, la société Prestig Immo et M. A..., représentés par Me Tête, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 3 avril 2017, le rejet de leur recours gracieux et l'acte de signer ;

3°) de mettre à la charge de la Métropole de Lyon la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement, qui n'a pas répondu à tous les moyens qui étaient soulevés, est insuffisamment motivé ;

- leur demande présentée devant le tribunal était recevable ;

- les conseillers communautaires qui ont approuvé la délibération n'ont pas été correctement informés de l'objet de la vente et de l'identité de l'acheteur ;

- la Métropole de Lyon n'a pas respecté les modalités de son plan de cession de son domaine qui prévoit, d'une part, une concertation avec la commune et, d'autre part, une adjudication ou une vente interactive ;

- le prix de cession qui a été accordé est bien inférieur à la valeur du bien, l'évaluation faite par le service des domaines, dont le montant n'est pas justifié, étant manifestement erroné et l'expertise produite en défense pas probante alors que les cessions intervenues sur le marché démontrent la sous-évaluation du bien ;

- la vente à un prix anormalement bas méconnaît le principe d'interdiction des aides économiques dans le cadre du droit de l'Union européenne.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2019, la Métropole de Lyon, représentée par Me Granjon, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge des requérants une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande de la société Prestig Immo et de M. A... n'était pas recevable, à défaut d'intérêt à agir des requérants à l'encontre de ces décisions ;

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par courrier en date du 17 septembre 2021, les parties ont été informées de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office.

Par un mémoire enregistré le 21 septembre 2021 et un mémoire enregistré le 23 septembre 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la société Prestig Immo et M. A... concluent aux mêmes fins que leur requête, par les mêmes moyens et ont présenté leurs observations sur le courrier du 17 septembre 2021.

Ils soutiennent que l'acte de signer le contrat est détachable du contrat.

Par un mémoire enregistré le 22 septembre 2021, la Métropole de Lyon conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens et a présenté ses observations sur le courrier du 17 septembre 2021.

Elle soutient que la signature n'est pas détachable du contrat de droit privé.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 septembre 2021, la SCI Bureaux Sainth, représentée par Me Doitrand, conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir qu'elle s'associe aux moyens soulevés par la Métropole de Lyon sur l'irrecevabilité de la requête et soutient que les moyens présentés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher,

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,

- et les observations de Me Tête pour la société Prestig Immo et M. A..., celles de de Me Debliquis pour la Métropole de Lyon et celles de Me Doitrand pour la SCI Bureaux Sainth.

Considérant ce qui suit :

1. La commission permanente de la Métropole de Lyon a approuvé la cession d'un bâtiment de bureaux situé au 32 rue Sainte-Hélène à Lyon à la SCI Bureaux Sainth ou à toute personne morale désignée par elle, par une décision du 3 avril 2017. La société Prestig Immo et M. A... ont formé un recours gracieux contre cette décision qui a été rejeté. Ils ont alors demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler cette décision du 3 avril 2017, ensemble le rejet de leur recours gracieux et l'acte de signer le contrat de vente. Ils relèvent appel du jugement du 29 mai 2019 par lequel le tribunal a rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Devant le tribunal, dans leur mémoire produit le 10 mai 2019 juste avant la clôture d'instruction, les requérants ont soutenu que les décisions litigieuses étaient illégales à raison de la méconnaissance par la Métropole de Lyon de la procédure prévue par la décision de la commission permanente du 12 octobre 2015 n° CP-2015-0477 qui impose que toute cession des biens appartenant à la Métropole de Lyon soit précédée d'une concertation avec les communes concernées. Le tribunal a omis de répondre à ce moyen qui n'était pas inopérant. Par suite, le jugement est irrégulier et doit, par suite, être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société Prestig Immo et M. A... devant le tribunal administratif de Lyon.

Sur la légalité des décisions litigieuses :

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'intérêt à agir des demandeurs

4. En premier lieu, il ressort des termes de la délibération ayant approuvé la cession de l'immeuble en litige en avril 2017 que les membres du conseil communautaire ont été informés de ce que la société par action simplifiée (SAS) C... Initiative, dont les bureaux étaient voisins de cet immeuble, était intéressée par l'acquisition de ce bien afin d'étendre ses bureaux et que cette cession serait réalisée au profit de la SCI Sainth. Aucune mention portée dans la délibération n'était de nature à induire en erreur les conseillers communautaires sur les activités exercées par la société C... Initiative, et sur le bénéficiaire direct de la cession, la SCI Sainth, SCI détenue par les membres de la famille C..., qui devait mettre à disposition de la société C... Initiative ces locaux. Les mentions portées dans le rejet du recours gracieux adressé aux requérants, selon lesquelles la cession permettrait à un groupe d'étendre son siège social et à la Métropole d'ancrer sur son territoire un acteur économique important qui participe à son rayonnement national, voire international ne révèlent pas plus que l'information donnée aux conseillers communautaires aurait été erronée et qu'une confusion aurait été volontairement entretenue entre les activités de logistique et transport routier de la société C..., cédées depuis 2005 à la société XPO Logistics, et les nouvelles activités de la société mère du groupe développées depuis cette cession.

5. En deuxième lieu, le plan de cession de la Métropole de Lyon, approuvé par la commission permanente du 15 octobre 2015, prévoit, en fonction de la typologie du bien à céder et de la volonté de la Métropole de maitriser la destination future du bien, différentes modalités de cession. Les cessions peuvent être pratiquées en régie par la Métropole soit par consultation d'opérateurs, soit de gré à gré, notamment en cas de remembrement. Dans ce cas, ces cessions se font en pleine association et en concertation avec les communes concernées. Les cessions peuvent également être externalisées dans le cadre de la charte départementale des notaires de la Métropole, la cession étant alors réalisée soit par adjudication, soit par vente interactive. Ces deux dernières modalités sont utilisées " en complément des cessions pratiquées jusqu'alors par la Métropole (consultations d'opérateurs ou gré à gré) ". Dans ces conditions, et alors qu'il n'apparait pas que la cession de l'immeuble en litige n'entrait pas dans le champ des cessions pouvant être réalisées de gré à gré et que la concertation avec la ville de Lyon n'aurait pas eu lieu, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la Métropole, qui n'était pas tenue de mettre son bien aux enchères, ni même de justifier les raisons pour lesquelles elle s'est abstenue de procéder à une mise aux enchères, aurait méconnu les modalités du plan de cession qu'elle s'était fixée.

6. En troisième lieu, la délibération litigieuse n'entre pas dans le champ des décisions qui doivent, en application du code des relations entre le public et l'administration être motivées. Par suite, le moyen tiré de ce que cette délibération serait insuffisamment motivée doit être écarté.

7. En quatrième lieu, le bâtiment, d'une superficie de 835,20 m², a été cédé au prix de 1 650 000 euros, conformément à l'estimation faite par le service du domaine sur la valeur vénale du bien le 15 novembre 2016. Cette valeur vénale a été déterminée selon la méthode par comparaison, en prenant en compte, sur la base des surfaces établies par un géomètre expert en novembre 2014, les caractéristiques de cet immeuble de bureau et son état général, le bien étant destiné à être vendu en l'état en dehors de toute opération de démolition reconstruction. Si, ainsi que l'indique le rapport du service des domaines, le bien jouit d'une très bonne situation, d'une bonne desserte et d'un style architectural mélangeant l'ancien et le moderne, il présente les contraintes d'une architecture ancienne et ne dispose pas de facilités de stationnement. L'expertise diligentée par la Métropole sur la valeur vénale du bien, qui n'est pas critiquée sur ce point par les requérants, indique que " les locaux n'ont pas un bon rendement surface des bureaux / parties communes, en effet, les parties communes représentent environ 30 % de la surface totale contre environ 10 % pour des bureaux classiques ". D'après le service des domaines, l'analyse du marché immobilier local fait ressortir des prix de cession de locaux professionnels variant de 800 à 2 977 euros par m2, avec un prix moyen de 2 031 euros par m2, ce qui correspond approximativement au prix retenu pour cette cession. Ces données produites par le service des domaines sont corroborées par le prix de cession de trois séries de locaux de bureaux à rénover dont les ventes sont intervenues entre octobre 2015 et juin 2017 pour des surfaces de 305 à 728 m2 dans les premier et second arrondissements de Lyon pour des montants compris entre 1 898 et 2 115 euros par m2. Si les requérants font valoir, en invoquant certaines données extraites du site etalab.fr, que des cessions de locaux industriels, commerciaux ou assimilés sont intervenus dans la même section cadastrale que l'immeuble litigieux à des prix beaucoup plus importants, les surfaces de ces locaux, dont les autres caractéristiques ne sont pas précisées, sont sans commune mesure avec celle du bien cédé. Les autres cessions dont se prévalent les requérants, qui concernent majoritairement des immeubles de logement, ne sont pas pertinentes. Dans ces conditions, et alors que l'erreur portée sur l'avis des domaines sur l'état d'indivision du bien avant sa cession est sans incidence sur l'évaluation qui en a été faite et que, contrairement à ce que font valoir les requérants, la valeur du bien a été réévaluée, à la hausse, par le service entre 2014 et 2016, il n'apparait pas que le bien aurait été cédé à un prix inférieur à sa valeur vénale.

8. En cinquième lieu, eu égard à ce qui vient d'être indiqué, la cession litigieuse ne constitue pas une aide illégale à une personne privée et ne méconnaît pas le principe de l'interdiction des aides économiques dans le cadre du droit communautaire.

9. En dernier lieu, les requérants ne peuvent pas utilement se prévaloir, à l'appui de leurs conclusions dirigées contre la décision approuvant la cession du bâtiment, du bien-fondé de la décision de déménagement de la maison de l'environnement et des conditions dans lesquelles ce déménagement s'est déroulé. En toute état de cause, ils n'établissement pas, par les pièces qu'ils produisent, que la décision de déménagement aurait été prise pour permettre la cession de la parcelle.

10. Il résulte de ce qui précède que la société Prestig Immo et M. A... ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision du 3 avril 2017 par laquelle la commission permanente de la Métropole de Lyon a approuvé la cession d'un bâtiment de bureaux situé au 32 rue Sainte-Hélène à la SCI Bureaux Sainth ou à toute personne morale désignée par elle, ensemble le rejet de leur recours gracieux et l'acte de signer le contrat de vente. Leur requête doit être rejetée en toutes ses conclusions. Il y a lieu en revanche, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative du code de justice administrative, de mettre à leur charge la somme de 2 000 euros à verser à la Métropole de Lyon.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1706965 du 29 mai 2019 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Prestig Immo et M. A... devant le tribunal et le surplus de leurs conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : La société Prestig Immo et M. A... verseront à la Métropole de Lyon une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Prestig Immo et M. A..., à la Métropole de Lyon et à la SCI Bureaux Sainth.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, présidente assesseure,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2021.

6

N° 19LY02918


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY02918
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Contrôle de la légalité des actes des autorités locales - Publicité et entrée en vigueur.

Collectivités territoriales - Commune - Organisation de la commune - Organes de la commune - Conseil municipal - Délibérations.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SELARL ADALTYS (ADAMAS AFFAIRES PUBLIQUES)

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-10-14;19ly02918 ?
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