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13/10/2021 | FRANCE | N°19LY04674

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 13 octobre 2021, 19LY04674


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI l'Etang du Battoir, M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) avant dire droit, d'ordonner une expertise ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2018 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a classé le barrage de l'étang du Battoir en classe C au titre de l'article R. 214-112 du code de l'environnement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les frais d'expertise ainsi qu'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de

justice administrative.

Par un jugement n° 1900407 du 31 octobre 2019, le tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI l'Etang du Battoir, M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) avant dire droit, d'ordonner une expertise ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2018 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a classé le barrage de l'étang du Battoir en classe C au titre de l'article R. 214-112 du code de l'environnement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les frais d'expertise ainsi qu'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1900407 du 31 octobre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 20 décembre 2019 et deux mémoires enregistrés le 13 février 2020 et le 7 mai 2021, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la SCI l'Etang du Battoir, M. A... B... et Mme C... B..., représentés par Me Aldigier, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 31 octobre 2019 ;

2°) d'ordonner, avant-dire droit, la réalisation d'une expertise ;

3°) d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2018 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a classé le barrage de l'étang du Battoir en classe C au titre de l'article R. 214-112 du code de l'environnement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé, à défaut de répondre au moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision en litige fondé sur les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ;

- la réalisation d'une expertise est nécessaire pour déterminer si le volume retenu par le barrage est supérieur à 0,05 million de mètres cubes ;

- la décision en litige a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière, le mandat des membres du CODERST ayant pris fin préalablement à la consultation de ce conseil ;

- la décision en litige a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière, les membres du CODERST n'ayant pas été convoqués en temps utiles et n'ayant pas préalablement disposé de l'ensemble des éléments nécessaires à l'examen de l'affaire ;

- la décision en litige méconnaît l'article R. 214-112 du code de l'environnement, les conditions tenant au volume retenu et à la présence d'habitations à moins de 400 mètres faisant défaut.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er avril 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 2 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 3 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 17 mars 2017 précisant les modalités de détermination de la hauteur et du volume des barrages et ouvrages assimilés aux fins du classement de ces ouvrages en application de l'article R. 214-112 du code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Giorsetti, avocate, représentant la SCI l'Etang du Battoir et autres ;

Une note en délibéré a été présentée pour la SCI l'Etang du Battoir et autres le 29 septembre 2021 et n'a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI l'Etang du Battoir, accompagnée de ses gérants, relève appel du jugement du 31 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à l'annulation, au besoin après réalisation d'une expertise, de l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 7 décembre 2018 classant en catégorie C, au titre de l'article R. 214-112 du code de l'environnement, le barrage de l'étang du Battoir dont elle est propriétaire sur le territoire de la commune de La Motte-Ternant.

Sur la régularité du jugement :

2. Si la SCI l'Etang du Battoir et autres reprochent aux premiers juges de ne pas avoir suffisamment motivé leur jugement quant au moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision en litige, il ressort des écritures de première instance qu'ils n'avaient pas expressément invoqué la méconnaissance de la loi du 11 juillet 1979 à l'appui de ce moyen. Par suite, ils ne sauraient reprocher au tribunal administratif, qui n'était pas tenu de rechercher dans les décisions juridictionnelles citées à l'appui de ce moyen le fondement de celui-ci, de ne pas avoir répondu sur le fondement des dispositions de cette loi. Par suite, en écartant ce moyen sur le fondement du seul article R. 214-114 du code de l'environnement, le jugement attaqué est suffisamment motivé.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, contrairement à ce que prétendent la SCI l'Etang du Battoir et autres, le préfet de la Côte-d'Or n'a nullement indiqué, dans son courrier du 29 janvier 2020, ne pas être en mesure d'établir la convocation en temps utiles des membres du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST), en se bornant à préciser que les convocations, adressées respectivement le 7 novembre 2017 et le 5 novembre 2018, pour les séances prévues le 21 novembre 2017 et le 20 novembre 2018, l'ont été par voie électronique, ainsi que le permettent les dispositions de l'article R. 133-5 du code des relations entre le public et l'administration. Les membres du conseil ont ainsi disposé d'un délai suffisant avant les séances. Par suite, le moyen tiré de l'absence de convocation régulière des membres de ce conseil doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que le dossier du barrage de l'étang du Battoir a été examiné une première fois par le CODERST lors de sa séance du 21 novembre 2017, au cours de laquelle étaient présents M. et Mme B..., cette dernière ayant été entendue, et qu'il a été décidé de surseoir à statuer sur ce dossier pour permettre l'examen des éléments apportés en séance. Une nouvelle séance s'est ainsi tenue le 20 novembre 2018. Les dispositions de l'article R. 133-8 du code des relations entre le public et l'administration n'exigent nullement que l'ensemble des documents produits par la SCI l'Etang du Battoir et ses gérants ait été transmis aux membres du CODERST préalablement aux séances au cours desquelles ils ont examiné ce dossier. Dans ces conditions, les requérants, qui avaient reçu le projet d'arrêté relatif à cet ouvrage préalablement à ces séances, ne sont pas fondés à soutenir qu'ils n'ont pas été mis à même de présenter leurs observations, ni que les membres du CODERST n'auraient pas disposé d'une information suffisante. Les moyens tirés de la méconnaissance des articles R. 133-8 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ne peuvent donc qu'être écartés.

5. En troisième lieu, contrairement à ce que prétendent la SCI l'Etang du Battoir et autres, la composition du CODERST avait été régulièrement fixée préalablement à sa séance du 20 novembre 2018, par arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 17 septembre 2018. Par suite, le moyen tiré de ce que le mandat des membres de ce conseil avait alors pris fin manque en fait et doit être écarté.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 214-112 du code de l'environnement, relèvent de la classe C des barrages de retenue et ouvrages assimilés, les " a) Ouvrage non classé en A ou B et pour lequel H = 5 et H2 x V0,5 = 20 / b) Ouvrage pour lequel les conditions prévues au a ne sont pas satisfaites mais qui répond aux conditions cumulatives ci-après : i) H ) 2 ; ii) V ) 0,05 ; iii) Il existe une ou plusieurs habitations à l'aval du barrage, jusqu'à une distance par rapport à celui-ci de 400 mètres (...) ". Ce même article précise que : " on entend par : " H ", la hauteur de l'ouvrage exprimée en mètres et définie comme la plus grande hauteur mesurée verticalement entre le sommet de l'ouvrage et le terrain naturel à l'aplomb de ce sommet ; " V ", le volume retenu exprimé en millions de mètres cubes et défini comme le volume qui est retenu par le barrage à la cote de retenue normale. Dans le cas des digues de canaux, le volume considéré est celui du bief entre deux écluses ou deux ouvrages vannés (...) ". Selon l'article 4 de l'arrêté du 17 mars 2017 précisant les modalités de détermination de la hauteur et du volume des barrages et ouvrages assimilés aux fins du classement de ces ouvrages en application de l'article R. 214-112 du code de l'environnement : " I. - Le volume retenu par le barrage, au sens du paramètre désigné par " V " dans l'article R. 214-112 susvisé, est le volume retenu (y compris les éventuels dépôts naturels ou non) par le barrage à la cote de retenue normale correspondant au niveau maximum normal d'exploitation hors crue en supposant un plan d'eau horizontal (...) ".

7. D'une part, pour classer le barrage de l'étang du Battoir, le préfet de la Côte-d'Or a estimé qu'il relevait du b) de la classe C, en retenant un volume retenu de 50 667 mètres cubes, correspondant au produit de la hauteur d'eau maximale atteinte au droit du barrage, fixée à 4 mètres, de la surface du plan d'eau de 30 160 m2 et d'un coefficient, variant selon la forme de la cuvette et fixé en l'espèce à 0,42. Pour contester le volume ainsi retenu, les requérants se prévalent d'une évaluation réalisée à leur demande par un géomètre, concluant à un volume retenu avoisinant 35 000 mètres cubes. Toutefois, comme le prévoit l'article 4 de l'arrêté du 17 mars 2017 précédemment rappelé, le volume à retenir, et, par suite, la hauteur d'eau maximale, doivent intégrer la totalité des sédiments déposés en fond d'étang. Le géomètre-expert mandaté par les requérants a lui-même indiqué, dans un courrier électronique du 22 novembre 2017, que, les relevés topographiques qu'il a pratiqués mesurant seulement le niveau du fond apparent, ils ne permettaient pas de prendre en compte l'épaisseur des sédiments. Les requérants n'établissent nullement qu'ainsi qu'ils le prétendent, une grande partie des sédiments, notamment les plus fins, aurait néanmoins été prise en compte dans cette évaluation. Ainsi, ils ne peuvent se prévaloir de la " côte basse de la vanne de fond " qu'ils fixent à 362,29 NGF, celle-ci étant la côte de la surface de la couche sédimentaire relevée par ce géomètre, et ne peuvent donc soutenir que la hauteur d'eau maximale se limiterait à 2,79 mètres. Pour cette même raison, ils ne peuvent utilement se prévaloir de la méthode alternative dite de la " cubature entre deux états de terrain " utilisée par ce même géomètre-expert, celle-ci n'incluant pas le volume de la couche sédimentaire. Enfin, s'ils dénoncent comme excessivement sommaire la profondeur de 4 mètres retenue par le préfet, ils n'étayent nullement cette affirmation, notamment par des considérations topographiques propres à l'étang du Battoir, et ne démontrent pas que cette profondeur aurait été, à tort, mesurée au sommet de l'ouvrage. S'agissant de la surface du plan d'eau, si les requérants contestent la côte du niveau normal d'exploitation retenue par le préfet, ils indiquent eux-mêmes que la différence résultant de cette éventuelle erreur est négligeable. Enfin, s'agissant du coefficient de 0,42, ils ne contestent pas qu'ainsi que l'a relevé le CODERST lors de sa séance du 20 novembre 2018, sa pertinence est corroborée par les modélisations proposées par le géomètre, à hauteur comparable. Ainsi, le moyen tiré de l'inexactitude du volume retenu pris en compte par le préfet de la Côte-d'Or doit être écarté.

8. D'autre part, en visant toute habitation située à moins de 400 mètres à l'aval du barrage, il ne résulte nullement des dispositions précitées qu'en soient exclues les habitations dont le terrain d'assiette se situerait à un niveau supérieur à celui du pied du barrage. A cet égard, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir du guide méthodologique établi par les services du ministère en charge de l'environnement, lequel est dépourvu de caractère contraignant et, au demeurant, ne prévoit pas nécessairement une exclusion de l'ensemble des habitations ainsi évoquées. L'habitation de M. et Mme B... relève donc des habitations visées par le iii) du b) de la classe C définie par l'article R. 214-112 du code de l'environnement. Il en est de même de l'autre construction, située à 400 mètres en aval du barrage, les photographies produites ne suffisant pas à remettre en cause son caractère d'habitation. Ainsi, la SCI l'Etang du Battoir et autres ne sont pas fondés à soutenir que la condition résultant du iii) du b) de la classe C fixée par l'article R. 214-112 du code de l'environnement ferait défaut.

9. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article R. 214-112 du code de l'environnement doivent donc être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin pour la cour d'ordonner la réalisation d'une expertise, que la SCI l'Etang du Battoir et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la SCI l'Etang du Battoir et autres.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI l'Etang du Battoir et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI l'Etang du Battoir, à M. A... B..., à Mme C... B... et à la ministre de la transition écologique.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2021.

2

N° 19LY04674


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04674
Date de la décision : 13/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

27-02-01-02 Eaux. - Ouvrages. - Établissement des ouvrages. - Retenues d'eau.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : ALDIGIER

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-10-13;19ly04674 ?
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