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12/10/2021 | FRANCE | N°20LY00036

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 12 octobre 2021, 20LY00036


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 février 2017 par lequel la maire de Combovin a, d'une part, retiré le permis de construire qui lui avait été délivré le 11 juillet 2013 en vue de la réhabilitation et de l'aménagement de bâtiments, et a refusé de lui délivrer le permis de construire.

Par ordonnance du 6 avril 2019, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administra

tive, transmis au tribunal administratif de Lyon la requête.

Par un jugement n° 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 février 2017 par lequel la maire de Combovin a, d'une part, retiré le permis de construire qui lui avait été délivré le 11 juillet 2013 en vue de la réhabilitation et de l'aménagement de bâtiments, et a refusé de lui délivrer le permis de construire.

Par ordonnance du 6 avril 2019, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, transmis au tribunal administratif de Lyon la requête.

Par un jugement n° 1722241 du 31 octobre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 janvier 2020, un mémoire complémentaire enregistré le 10 juin 2020, et un mémoire en réplique enregistré le 8 juin 2021, Mme B... A..., représentée par la SELARL CDMF Affaires Publiques, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 octobre 2019 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 22 février 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Combovin la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté comme irrecevable le moyen tiré de ce que l'arrêté a été pris en méconnaissance de la procédure contradictoire ;

- l'arrêté de retrait a été pris en méconnaissance de la procédure contradictoire prévue à l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors qu'elle n'a pas été mise à même de prendre connaissance des pièces sur lesquelles la commune s'est fondée ;

- la commune ne justifie pas du caractère frauduleux du permis de construire délivré en 2013 ; ainsi que l'ont estimé les premiers juges, la falsification des limites parcellaires sur les plans de demande n'est pas démontrée ; l'absence de saisine des gestionnaires des réseaux ne peut lui être imputée, alors au demeurant qu'un simple raccordement suffisait ; les liens entre le maire et la pétitionnaire ne sauraient pas, non plus, établir l'existence d'une manœuvre frauduleuse ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les informations portées dans la notice sur l'existence d'un bâtiment ancien n'étaient pas erronées ; les informations fournies permettaient au service instructeur de porter une appréciation sur ce point ;

- le projet, qui porte sur une extension mesurée de la construction existante, était autorisé en zone NA du plan d'occupation des sols, de sorte que la maire ne pouvait refuser de délivrer le permis de construire ;

- le refus de permis de construire ne peut être fondé sur les dispositions de l'article NA 14 du règlement du plan d'occupation des sols (POS), ces dispositions n'étant plus opposables en vertu de la loi du 24 mars 2014 ; en tout état de cause, le permis pouvait être autorisé sur ce point au bénéfice d'une adaptation mineure.

Par des mémoires en défense enregistrés les 6 mai 2021 et 9 juillet 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la commune de Combovin, représentée par Me Loiseau, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 600 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé ;

- il y a lieu, le cas échéant, de substituer aux motifs initiaux, le motif selon lequel le permis initial était entaché de fraude au regard de l'application des dispositions de l'article NA 14 du règlement du POS, ou le motif selon lequel le permis est entaché de fraude au regard des dispositions de l'article NA 7 du règlement du POS.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 9 juillet 2021, par une ordonnance en date du 9 juin 2021.

La commune de Combovin a produit un mémoire enregistré le 9 septembre 2021, après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Poncin pour Mme A... et celles de Me Loiseau pour la commune de Combovin ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 11 juillet 2013, le maire de Combovin a délivré à Mme A... un permis de construire pour des travaux de réhabilitation de bâtiments situés sur les parcelles cadastrées section B n° 369, 370 et 371, au lieu-dit les Durons. Par arrêté du 22 février 2017, la maire de la commune a retiré ce permis au motif qu'il avait été obtenu par fraude. Mme A... relève appel du jugement du 31 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 22 février 2017 :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'après avoir rappelé la procédure suivie par la commune pour procéder au retrait du permis de construire, Mme A... n'avait soulevé, dans sa demande introductive de première instance, que des moyens de légalité interne. Ainsi que l'ont estimé les premiers juges, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure contradictoire, qu'elle avait soulevé après l'expiration des délais de recours, par mémoire enregistré le 9 avril 2018, relevait d'une cause juridique distincte des moyens initialement soulevés. Par suite, il y a lieu de faire droit à la fin de non-recevoir opposée en défense et d'écarter ce moyen comme irrecevable.

3. En second lieu, un permis de construire ne peut faire l'objet d'un retrait, une fois devenu définitif, qu'au vu d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date à laquelle il a été délivré. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme.

4. Pour retirer le permis de construire délivré à Mme A..., la maire de Combovin a estimé que le projet empiète sur des terrains appartenant à la commune, ce que masquait le plan de masse de la demande, que les travaux litigieux tendaient en fait à conforter des bâtiments très récemment édifiés sans autorisation d'urbanisme, et non à aménager des bâtiments anciens, que les travaux nécessitaient une extension du réseau électrique, et, enfin, que la demande avait été présentée par la compagne de l'ancien maire, ce qui faisait obstacle à ce que ce dernier délivrât le permis. Les premiers juges ont estimé que seul le motif tiré de ce que les travaux avaient pour objet de conforter une construction édifiée sans permis était de nature à justifier le retrait pour fraude du permis de construire.

5. D'une part, en vertu des articles NA 1 et NA 2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune, ne sont autorisés dans la zone, outre les constructions à usage agricole précaire et les constructions et installations liées aux réseaux, que " l'aménagement et l'extension mesurée des constructions existantes ".

6. D'autre part, lorsqu'une construction a été édifiée sans autorisation en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de présenter une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble du bâtiment. De même, lorsqu'une construction a été édifiée sans respecter la déclaration préalable déposée ou le permis de construire obtenu ou a fait l'objet de transformations sans les autorisations d'urbanisme requises, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de présenter une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé.

7. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des photographies produites par la requérante elle-même, que l'état du bâtiment initial tel que décrit dans la demande de permis de construire de 2013 ne correspondait pas à celui constaté quelques années plus tôt. Ainsi, elle avait entrepris sur les bâtiments situés sur les parcelles cadastrées section B n° 369, 370 et 371 des travaux sans autorisation d'urbanisme. Si le bâtiment situé sur les parcelles 369 et 370, dont le permis de construire autorise notamment la surélévation de 60 centimètres, était un ancien bâtiment agricole assez délabré mais ayant conservé ses murs et sa toiture, ne subsistait en revanche s'agissant des constructions situées sur la parcelle 371, que la partie basse de murs. A supposer même que, comme le soutient Mme A..., le projet litigieux avait pour objet de reconstruire à l'identique un ancien bâtiment présent sur la parcelle, alors pourtant qu'il ressort des témoignages qu'elle produit qu'il s'agissait d'un ancien travail à ferrer les bœufs entouré de murs, les travaux menés par la requérante ne peuvent être regardés comme de simples travaux de réhabilitation de ce bâtiment, qui était en ruine. Dans ces conditions, il ressort des pièces du dossier d'une part que la demande de Mme A... ne portait pas sur l'ensemble des transformations apportées sur les constructions, d'autre part que les travaux en litige ne peuvent être regardés comme des travaux d'aménagement de bâtiments existants, et qu'ils étaient ainsi interdits en zone NC. Si Mme A... soutient en appel que les travaux menés sur la parcelle B n° 371, qui ont eu pour objet d'aménager un local d'une surface de plancher de 31,5 m2 en rez-de-chaussée, surmonté d'une terrasse, doivent être regardés comme des travaux d'extension des bâtiments existants sur les parcelles voisines, il ressort toutefois des pièces du dossier que les travaux entrepris avaient également pour objet de réhabiliter ce bâtiment en en modifiant la destination et en le surélevant de 60 centimètres, permettant l'aménagement d'un étage. Dans ces conditions, et alors que la surface de plancher du bâtiment situé sur les parcelles 369 et 370 après travaux, n'est que de 71,5 m2, l'ensemble des travaux menés par Mme A... sur ces trois parcelles ne peut pas non plus être regardé, compte tenu de leur importance, comme ayant eu pour objet une extension mesurée des constructions existantes.

8. Alors que la demande de Mme A... ne faisait pas état de ces travaux réalisés sans autorisation, et qu'elle présentait comme l'état initial du bâtiment celui résultant de ces travaux non autorisés, le permis de construire présenté à tort comme portant sur la réhabilitation de bâtiments anciens sans création de surface de plancher, a été obtenu par des manœuvres de la pétitionnaire visant intentionnellement à tromper le service instructeur sur la nature des travaux menés sur le bâtiment. Par suite, la maire de Combovin était fondée à estimer, pour le motif retenu par les premiers juges, que le permis de construire délivré en 2013 avait été obtenu par fraude et à en décider le retrait.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Combovin, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la commune de Combovin.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée

Article 2 : Mme A... versera à la commune de Combovin la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Combovin.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2021.

4

N° 20LY00036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00036
Date de la décision : 12/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-04-05 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Régime d'utilisation du permis. - Retrait du permis.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : LOISEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-10-12;20ly00036 ?
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