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07/10/2021 | FRANCE | N°21LY00716

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 07 octobre 2021, 21LY00716


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 27 août 2020 par lequel le préfet de Saône-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai avec interdiction de retour pendant deux ans et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2002660 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 mars 2021, M. B..., représenté par Me Bouflija,

demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 27 août 2020 par lequel le préfet de Saône-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai avec interdiction de retour pendant deux ans et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2002660 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 mars 2021, M. B..., représenté par Me Bouflija, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

M. B... soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation ;

- le préfet ne l'a pas informé de son droit à recevoir connaissance et communication des éléments sur lesquels se fonde la décision préfectorale en méconnaissance de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il peut se prévaloir d'un droit au séjour en application de l'article 11 de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Mali sur la circulation et le séjour des personnes, du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 313-14 du même code ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision d'interdiction de retour pendant une durée de deux ans est insuffisamment motivée.

Le préfet de Saône-et-Loire, auquel la requête a été régulièrement communiquée, n'a pas produit d'observations.

Par décision du 7 avril 2021, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Mali sur la circulation et le séjour des personnes signée à Bamako le 26 septembre 1994 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Duguit-Larcher, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né le 10 février 1999 au Mali, est, selon ses déclarations, entré en France le 4 octobre 2015. Il a été placé auprès des services d'aide sociale à l'enfance puis sous tutelle de l'État jusqu'au 10 février 2017, date de sa majorité. Un titre de séjour, en qualité d'étudiant lui a été délivré, valable du 16 mai 2018 au 30 septembre 2018 et dont il a demandé, en août 2018 le renouvellement sous le statut de salarié. Cette demande a été rejetée par arrêté du préfet de Saône-et-Loire du 7 janvier 2019 portant refus de titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, contre lequel M. B... a formé un recours gracieux le 4 mars 2019. Le 2 mai 2019, il a refusé d'embarquer dans un vol à destination du Mali. Le 10 février 2020, il a présenté une nouvelle demande de titre de séjour portant la mention " salarié ". Par arrêté du 27 août 2020, le préfet de Saône-et-Loire lui en a refusé la délivrance, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour avant deux ans. Par un jugement du 4 février 2021 dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation des décisions d'éloignement, refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 11 de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Mali sur la circulation et le séjour des personnes : " Après trois années de résidence régulière et non interrompue, les nationaux de chacune des Parties contractantes établis sur le territoire de l'autre Partie, peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans, dans les conditions prévues par la législation de l'Etat d'accueil. (...) ". Ces stipulations ne prescrivent pas l'attribution de plein droit d'un titre de séjour. Par ailleurs, M. B... n'a pas présenté la demande dont il conteste le rejet sur ce fondement et le préfet n'a pas examiné, dans l'arrêté litigieux, la possibilité de délivrer un titre de séjour à M. B... sur ce fondement. Par suite, M. B... ne peut pas utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français.

3. En deuxième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313 2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. (...) ".

4. M. B... fait valoir qu'il est arrivé à l'âge de 16 ans en France, qu'il a été pris en charge par les services d'aide sociale à l'enfance puis placé sous tutelle de l'Etat, qu'il a pu poursuivre des études jusqu'à l'obtention d'un certificat d'aptitude professionnel " installateur sanitaire " sous couvert d'un titre de séjour en qualité d'étudiant, qu'il a exercé un emploi en contrat à durée indéterminée dans la restauration rapide, qu'il a dû quitter du fait du refus de renouvellement de son titre de séjour et qu'il a noué en France des liens forts. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui a vécu jusqu'à l'âge de 16 ans au Mali, s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français après avoir refusé d'exécuter une précédente mesure d'éloignement édictée en 2019. S'il a fait preuve d'une certaine volonté d'intégration, notamment dans le cadre de sa formation, il n'a pas mis à profit cette formation et souhaite désormais se réorienter dans le secteur de la boucherie. Il ne justifie pas, ainsi, à la date de la décision en litige, d'une intégration professionnelle particulière. S'il fait état des liens qu'il a créés en France, et notamment avec une ressortissante française qui a manifesté sa volonté de l'adopter, il est célibataire et sans charge de famille et n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Mali où résident ses parents. Il n'apparaît pas, dès lors, qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour et qu'en décidant de l'éloigner, le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par rapport au but poursuivi par ces mesures. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir, à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, qu'elle méconnaitrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle aurait été prise alors qu'il disposait d'un droit au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet n'a pas plus commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313 10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...). ".

6. Dès lors qu'il ressort des termes de l'arrêté en litige que le préfet, bien que n'étant pas saisi d'une demande en ce sens, a examiné la possibilité de régulariser la situation de M. B... en lui délivrant un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile M. B... peut se prévaloir, à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du refus de délivrance d'un titre de séjour, de la méconnaissance de ces dispositions. Toutefois, les éléments dont M. B... fait état, rappelés au point 4, ne constituent pas des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour au titre de ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il remplissait les conditions pour obtenir un titre de séjour sur ce fondement, interdisant qu'il puisse être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français, doit être écarté.

7. En dernier lieu, pour le surplus, M. B... reprend en appel, sans les assortir d'aucune précision supplémentaire ni d'aucun élément pertinent par rapport à l'argumentation déjà développée en première instance, les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée, que le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation, que le préfet ne l'a pas informé de son droit à recevoir connaissance et communication des éléments sur lesquels se fonde la décision préfectorale en méconnaissance de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que la décision d'interdiction de retour pendant une durée de deux ans est insuffisamment motivée. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs justement retenus par les premiers juges.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Sa demande doit, par suite, être rejetée en toutes ses conclusions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 16 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, présidente assesseure,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 octobre 2021.

5

N° 21LY00716


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00716
Date de la décision : 07/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : BOUFLIJA BASMA

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-10-07;21ly00716 ?
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