Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler le certificat d'urbanisme du 6 juillet 2017 par lequel le maire d'Apremont a déclaré non réalisable l'opération de réaménagement d'une grange qu'il projetait.
Par une ordonnance n° 430232 du 6 avril 2019, le président de la section du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, transmis la demande au tribunal administratif de Lyon.
Par un jugement n° 1725083 du 19 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision, a enjoint au maire d'Apremont de délivrer à M. A... un certificat d'urbanisme positif dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, et a mis à la charge de la commune d'Apremont la somme de 1 400 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 20 février 2020, et des mémoires en réplique enregistrés les 26 mars 2021 et 11 juillet 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la commune d'Apremont, représentée par Me Cognat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 décembre 2019 ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande de M. A... ;
3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le maire ne pouvait fonder sa décision sur les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, compte tenu de la nécessité de travaux d'extension du réseau électrique, et de ce que la commune n'entendait pas les prendre en charge ces travaux ;
- le pétitionnaire transforme progressivement, sans autorisation, le bâtiment agricole en habitation ; sa demande tend à faire valider ce changement de destination et présente un caractère frauduleux.
Par des mémoires en défense enregistrés les 15 juillet 2020 et 7 juin 2021, M. B... A..., représenté par la SELARL CDMF Affaires Publiques, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.
La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 12 juillet 2021, par une ordonnance du 10 juin 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- les observations de Me Cognat pour la commune d'Apremont et celles de Me Punzano, substituant Me Fiat, pour M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a sollicité un certificat d'urbanisme portant sur l'aménagement d'une grange dans son volume existant sans changement de destination avec raccordement aux réseaux d'eau potable et d'électricité. Par décision du 6 juillet 2017, le maire d'Apremont a déclaré l'opération non réalisable. La commune d'Apremont relève appel du jugement du 19 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision, et a enjoint à son maire de délivrer à M. A... un certificat d'urbanisme positif dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés. / Lorsqu'un projet fait l'objet d'une déclaration préalable, l'autorité compétente doit s'opposer à sa réalisation lorsque les conditions mentionnées au premier alinéa ne sont pas réunies. / (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un permis de construire doit être refusé ou un certificat d'urbanisme négatif doit être délivré lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, lorsque l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.
3. D'autre part, en vertu des dispositions de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme, les bénéficiaires d'autorisations de construire peuvent être tenus de réaliser et de financer les équipements propres à l'opération autorisée mentionnés à l'article L. 332-15, aux termes duquel : " L'autorité qui délivre l'autorisation de construire (...) exige, en tant que de besoin, du bénéficiaire de celle-ci la réalisation et le financement de tous travaux nécessaires à la viabilité et à l'équipement de la construction (...), notamment en ce qui concerne (...) l'alimentation en (...) électricité (...) / Les obligations imposées par l'alinéa ci-dessus s'étendent au branchement des équipements propres à l'opération sur les équipements publics qui existent au droit du terrain sur lequel ils sont implantés et notamment aux opérations réalisées à cet effet en empruntant des voies privées ou en usant de servitudes. / Toutefois, en ce qui concerne le réseau électrique, le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition est redevable de la part de la contribution prévue au troisième alinéa du II de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, correspondant au branchement et à la fraction de l'extension du réseau située sur le terrain d'assiette de l'opération, au sens de cette même loi et des textes pris pour son application. / L'autorisation peut également, avec l'accord du demandeur et dans les conditions définies par l'autorité organisatrice du service public de l'eau ou de l'électricité, prévoir un raccordement aux réseaux d'eau ou d'électricité empruntant, en tout ou partie, des voies ou emprises publiques, sous réserve que ce raccordement n'excède pas cent mètres et que les réseaux correspondants, dimensionnés pour correspondre exclusivement aux besoins du projet, ne soient pas destinés à desservir d'autres constructions existantes ou futures. (...) ".
4. Pour déclarer l'opération non réalisable, le maire d'Apremont s'est fondé sur l'avis émis le 29 juillet 2016 par la société ERDF, selon lequel la distance entre le réseau existant et la parcelle ne permet pas un raccordement au réseau public de distribution d'électricité par un simple branchement. Il ressort toutefois des plans produits au dossier que la distance séparant le poste électrique du Pleney et le point le plus proche du terrain d'assiette, le long de la route, est d'une centaine de mètres. M. A..., qui produit un avis antérieur de l'exploitant contradictoire avec celui rendu le 29 juillet 2016, a finalement fait réaliser les travaux en 2020, et, selon le courrier d'Enedis et la facture qu'il joint, les travaux en cause relevaient d'un simple branchement et ne nécessitaient pas d'extension du réseau électrique. Par ailleurs, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la capacité du réseau était insuffisante et que des travaux de renforcement étaient nécessaires pour assurer la desserte de cette construction individuelle. Par suite, et alors que les dispositions de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme autorisaient M. A... à prendre en charge financièrement les travaux nécessaires, le maire d'Apremont ne pouvait se fonder sur les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme pour déclarer l'opération projetée non réalisable.
5. La commune d'Apremont a fait également valoir devant le tribunal administratif que M. A... entend en réalité transformer en maison d'habitation cette ancienne grange et que la demande, présentée comme portant sur des travaux d'aménagement d'une grange sans changement de destination, reposait ainsi sur une fraude. Elle produit des photographies réalisées postérieurement à la demande, en 2019 et 2021, qui ne permettent toutefois pas d'appréhender l'état du bâtiment avant la demande de certificat d'urbanisme, et sa destination. Par ailleurs, le certificat d'urbanisme litigieux a pour seul effet de cristalliser les règles d'urbanisme applicables au pétitionnaire, et n'a pu avoir pour objet ou pour effet d'autoriser les travaux entrepris par la suite par l'intéressé. Dans ces conditions, et s'il est possible, compte tenu du constat produit par la commune, que M. A... ait pu procéder à des travaux non autorisés ayant pour objet de modifier la destination du bâtiment, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présentation du certificat d'urbanisme aurait eu pour but d'obtenir une décision indue et qu'elle reposait ainsi sur une fraude du demandeur. C'est par suite à bon droit que les premiers juges ont écarté la demande de substitution de motif présentée par la commune d'Apremont.
6. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Apremont n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 6 juillet 2017 de son maire.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la commune d'Apremont, partie perdante, tendant au remboursement des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... au titre des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Apremont est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Apremont et à M. B... A....
Copie en sera adressée à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Délibéré après l'audience du 7 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
Mme Christine Psilakis, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.
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N° 20LY00688