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23/09/2021 | FRANCE | N°21LY00803

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 23 septembre 2021, 21LY00803


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2007526 du 12 février 2021, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 mars 2021, M. B..., représenté par Me Robin, dema

nde à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2020 du préfe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2007526 du 12 février 2021, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 mars 2021, M. B..., représenté par Me Robin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2020 du préfet du Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour mention " vie privée et familiale " ou " salarié " ou " auto entrepreneur " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à payer à son conseil, au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.

M. B... soutient que :

- le préfet, qui n'a pas confronté la promesse d'embauche du 5 juin 2017 à son expérience dans le secteur du bâtiment, a insuffisamment motivé le refus de délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas procédé à un examen complet de sa situation ;

- le préfet a commis une erreur de droit en lui opposant les critères de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'il avait demandé à bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 de ce même code ;

- le préfet a commis une erreur de droit en refusant de régulariser sa situation sans faire état de son expérience dans le secteur du bâtiment et des perspectives dont il disposait dans ce secteur en tension, au regard de sa promesse d'embauche ;

- le refus de titre de séjour méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il justifie de motifs exceptionnels et de considérations humanitaires qui auraient dû conduire le préfet à l'admettre au séjour en France, de sorte que le refus du préfet de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ;

- le préfet, qui s'est abstenu de préciser que les précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre n'ont pu être exécutées, n'a pas procédé à un examen complet de sa situation ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire ;

- elle méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet s'est à tort estimé lié par les décisions rendues en matière d'asile.

Le préfet du Rhône, auquel la requête a été communiquée, n'a pas présenté d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher,

- et les observations de Me Beligon pour M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant bosnien né le 26 janvier 1986, déclare être entré irrégulièrement en France en juin 2005, pour y solliciter l'asile. Sa demande a été rejetée en dernier lieu par la Commission de recours des réfugiés le 31 octobre 2006. Il a en conséquence été invité à quitter le territoire français le 29 novembre 2006. Il a ensuite fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière le 25 avril 2007, puis d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français le 28 juillet 2008, puis d'une obligation de quitter le territoire français le 20 avril 2012, respectivement confirmés par des jugements du tribunal administratif de Lyon du 3 mai 2007, s'agissant de la décision de 2007, et du 24 avril 2012, s'agissant de la décision de 2012. Il a sollicité, le 9 août 2017, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un jugement du 12 février 2021, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 11 septembre 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

Sur la décision portant refus de séjour :

2. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de la demande de titre de séjour présentée par M. B..., que celui-ci a présenté, à titre principal une demande de titre portant la mention " vie privée et familiale " et, à titre subsidiaire, une demande de titre portant la mention " salarié " sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour justifier sa demande sur ce dernier fondement, M. B..., qui n'a fait état ni d'une qualification ou d'une expérience particulière, ni de la détention de diplômes, a simplement indiqué qu'il disposait d'une promesse d'embauche du 5 juin 2017 en qualité de carreleur au sein de la société SBM. Pour refuser de régulariser sa situation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet, qui a fait mention dans sa décision de la nature de l'emploi pour lequel M. B... disposait d'une promesse d'embauche et de l'expérience dont il disposait dans ce secteur compte tenu de l'activité qu'il a exercée dans le BTP entre mars 2014 et mai 2017 sous couvert d'une association dont il était le dirigeant, s'est fondé sur le fait que les éléments dont M. B... se prévalait à l'appui de sa demande de titre de séjour ne constituaient pas des motifs exceptionnels d'admission au séjour. En procédant de la sorte, le préfet du Rhône a suffisamment motivé le refus de délivrance du titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation de M. B.... Il n'a pas davantage commis d'erreur de droit au regard des éléments, rappelés au point 2, qu'il devait prendre en considération pour refuser de délivrer un titre de séjour sur ce fondement dès lors que M. B... n'avait pas fait état dans sa demande de titre de séjour d'autres éléments sur sa qualification, son expérience et ses éventuels diplômes.

4. Il ne ressort pas des termes de la décision litigieuse que le préfet, qui a par ailleurs examiné comme il le pouvait, si les conditions pour obtenir le cas échéant un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile étaient réunies, aurait, comme le soutient le requérant commis l'erreur de droit consistant à opposer, pour la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les conditions prévues pour obtenir un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du même code.

5. Si la durée de séjour en France de M. B... n'est pas contestée, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a fait l'objet de plusieurs mesures d'éloignement qu'il n'a pas exécutées. La circonstance que le préfet n'a pas pu les exécuter d'office ne saurait justifier qu'il se soit maintenu sur le territoire français alors que rien ne faisait obstacle à ce qu'il les exécute de son propre chef. M. B... est célibataire et sans charge de famille. Il n'est pas dépourvu d'attaches en Bosnie où réside notamment sa mère. Malgré la durée de son séjour en France, il ne justifie pas y avoir noué de relations d'une particulière intensité, les quelques témoignages qu'il a produits étant peu circonstanciés. Dans ces conditions, et alors même qu'il a exercé une activité professionnelle en France à son propre compte entre 2014 et 2017 dans le domaine du BTP et disposait d'une promesse d'embauche en qualité de carreleur, le refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, doivent, dès lors, être écartés.

6. Les éléments dont M. B... se prévaut qui ont été mentionnés au point précédent ne sauraient être regardés comme des motifs exceptionnels ou des circonstances humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que le requérant ne fait état d'aucun diplôme ou qualification particuliers et se borne à renvoyer aux activités qu'il aurait exercées dans le domaine du BTP sans toutefois justifier avec précision de la nature de l'activité qu'il a exercée en France. Le préfet du Rhône n'a ainsi pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de régulariser, à titre exceptionnel, la situation de M. B... par la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ".

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. M. B... reprend en appel, sans l'assortir de nouvelles précisions, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français serait insuffisamment motivée. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs du jugement.

8. La circonstance que le préfet n'a pas précisé que les précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre n'ont pas pu être exécutées d'office ne saurait démontrer que le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation.

9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle doivent être écartés.

Sur la décision fixant le pays de destination :

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.

11. Pour le surplus, M. B... reprend en appel, sans les assortir d'une critique utile du jugement, les moyens tirés de ce que le préfet s'est à tort estimé lié par les décisions rendues en matière d'asile et que la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu, par adoption des motifs du jugement, d'écarter ces moyens.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par suite, sa demande doit être rejetée en toute ses conclusions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 2 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, présidente assesseure,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 septembre 2021.

2

N° 21LY00803


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00803
Date de la décision : 23/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-01 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. - Légalité externe.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SCP ROBIN VERNET

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-09-23;21ly00803 ?
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