La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/09/2021 | FRANCE | N°19LY02957

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 23 septembre 2021, 19LY02957


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association de formation professionnelle de l'industrie (AFPI) Bourgogne 21 71 a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 2 juillet 2018 par laquelle le préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté a rejeté sa demande tendant au retrait de l'attestation d'exonération de taxe sur la valeur ajoutée délivrée au titre de ses activités de formation professionnelle continue, délivrée le 19 octobre 2010.

Par un jugement n° 1802314 du 28 mai 2019, le tribunal administratif de

Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association de formation professionnelle de l'industrie (AFPI) Bourgogne 21 71 a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 2 juillet 2018 par laquelle le préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté a rejeté sa demande tendant au retrait de l'attestation d'exonération de taxe sur la valeur ajoutée délivrée au titre de ses activités de formation professionnelle continue, délivrée le 19 octobre 2010.

Par un jugement n° 1802314 du 28 mai 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 26 juillet 2019, le 8 et le 12 janvier 2021, l'AFPI Bourgogne 21 71, représentée par la SELAFA CMS Francis Lefebvre, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 2 juillet 2018 du préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté ;

3°) le cas échéant, de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne la question de la conformité à l'article 132, paragraphe 1, sous i), des dispositions des articles 261 et 202 de l'annexe II au code général des impôts en ce qu'elles prévoient que l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux activités de formation professionnelle est globale, sans distinction entre les activités d'intérêt général et les activités répondant à des besoins strictement privés des entreprises relevant de la branche professionnelle ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable ;

- la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où elle met en péril la poursuite de son activité ;

- elle a formé une demande d'exonération partielle de taxe sur la valeur ajoutée, laquelle était irrecevable ; l'administration n'établit pas qu'elle n'aurait pas été destinataire du courrier d'accompagnement du formulaire Cerfa n° 3511, précisant que l'activité pour laquelle l'exonération était demandée ne concernait que les actions de formation en faveur des demandeurs d'emploi ; en tout état de cause, elle avait décrit précisément, dans le formulaire Cerfa lui-même, l'activité pour laquelle elle demandait une exonération de taxe sur la valeur ajoutée ; l'administration s'est méprise sur la portée de sa demande révélant l'absence d'un examen particulier de sa situation ;

- en indiquant que l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée s'applique obligatoirement à l'ensemble des opérations réalisées par le titulaire de l'attestation dans le cadre de la formation professionnelle, l'administration adopte une position qui va à l'encontre de l'article 132,1, i) de la directive TVA tel qu'éclairé par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne ;

- s'il ne fait aucun doute que l'activité réalisée à destination des demandeurs d'emploi relève d'une mission d'intérêt général, tel n'est pas le cas des formations réalisées à destination des entreprises relevant du secteur de la métallurgie ; elle a appliqué strictement sa demande d'exonération partielle lors de l'établissement de ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée et a donc exonéré de taxe sur la valeur ajoutée les seules formations destinées aux demandeurs d'emploi, sans que l'administration fiscale ne s'en étonne.

Par des mémoires, enregistrés le 6 janvier 2020 et le 20 janvier 2021, le ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable dès lors que l'association ne justifie pas de la qualité de son représentant légal pour agir en justice en son nom ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par l'association appelante ne sont pas fondés.

L'AFPI Bourgogne 21 71 a produit un nouveau mémoire le 11 juin 2021, lequel, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lesieux, première conseillère,

- et les conclusions de Mme Vinet, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. L'Association de formation professionnelle de l'industrie (AFPI) Bourgogne 21 71, ayant notamment pour objet l'organisation d'actions de formation professionnelle continue à destination des salariés de ses entreprises membres et des demandeurs d'emploi, relève appel du jugement du 28 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 juillet 2018 du préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté rejetant sa demande de retrait de l'attestation mentionnée au a. du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts dont la détention permet, selon ce texte, l'application de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée qu'il prévoit aux prestations effectuées dans le cadre de la formation professionnelle continue, qui lui a été délivrée le 19 octobre 2010.

2. Le a. du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts exonère de taxe sur la valeur ajoutée les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectuées dans le cadre " de la formation professionnelle continue, telle qu'elle est définie par les dispositions législatives et réglementaires qui la régissent, assurée soit par des personnes morales de droit public, soit par des personnes de droit privé titulaires d'une attestation délivrée par l'autorité administrative compétente reconnaissant qu'elles remplissent les conditions fixées pour exercer leur activité dans le cadre de la formation professionnelle continue ". Le I de l'article 202 A de l'annexe II au code général des impôts, pris pour l'application de ces dispositions, prévoit que, pour obtenir l'attestation mentionnée au a. du 4° du 4 de l'article 261 de ce code, les personnes de droit privé exerçant une activité de formation professionnelle continue autres que les organismes paritaires agréés souscrivent une demande adressée aux services déconcentrés du ministère chargé du travail. L'article 202 B de cette même annexe dispose que : " La délivrance de l'attestation entraîne l'exonération de TVA au jour de la réception de la demande. / L'attestation ne vaut que pour les opérations effectuées dans le cadre de la formation professionnelle continue ou des missions dévolues aux organismes paritaires agréés. Elle s'applique obligatoirement à l'ensemble de ces opérations réalisées par le titulaire de l'attestation ".

3. L'attestation mentionnée au a. du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, qui entraîne reconnaissance du droit au bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée, présente le caractère d'une décision créatrice de droits au profit de son bénéficiaire. Ainsi, en vertu des principes généraux régissant la procédure administrative et, depuis le 1er janvier 2016, des articles L. 242-3 et L. 242-4 du code des relations entre le public et l'administration, l'administration est tenue, lorsque le bénéficiaire de la décision créatrice de droits lui en fait la demande, de procéder, selon le cas, à l'abrogation ou au retrait de cette décision si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait peut intervenir dans le délai de quatre mois suivant son édiction. En dehors de cette hypothèse, 1'administration peut, sans condition de délai, procéder au retrait d'une décision créatrice de droits, qu'elle soit au demeurant légale ou illégale, pour lui substituer une décision plus favorable, lorsque le retrait est sollicité par le bénéficiaire de cette décision et qu'il n'est pas susceptible de porter atteinte aux droits des tiers.

4. L'AFPI Bourgogne 21 71 s'est vu délivrer, le 19 octobre 2010, à sa demande, l'attestation mentionnée au a. du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, laquelle a entraîné la reconnaissance de son droit au bénéfice de 1'exonération de taxe sur la valeur ajoutée pour les opérations effectuées dans le cadre de la formation professionnelle continue. Selon ses déclarations, cette association a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2012 à 2015 au cours de laquelle le vérificateur a constaté que l'association exonérait de la taxe sur la valeur ajoutée les seules formations dispensées aux demandeurs d'emploi et soumettait à la taxe sur la valeur ajoutée les formations dispensées aux salariés de ses entreprises membres. Des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de taxe sur les salaires auraient été mis à sa charge au titre de la période courant de 2012 à 2015. Faisant valoir qu'il n'était pas dans son intérêt de bénéficier d'une exonération de taxe sur la valeur ajoutée s'agissant des actions de formation professionnelle continue à destination des salariés de ses entreprises membres, l'AFPI Bourgogne 21 71 a, par un courrier du 8 juin 2018, sollicité le retrait de l'attestation délivrée le 19 octobre 2010. Le préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté a, par la décision contestée du 2 juillet 2018, rejeté cette demande.

5. En premier lieu, l'AFPI Bourgogne 21 71 soutient que l'attestation qui lui a été délivrée le 19 octobre 2010 est illégale. Elle fait valoir, d'une part, que sa demande de délivrance ne concernait que les opérations effectuées dans le cadre de la formation professionnelle continue des demandeurs d'emploi, que l'administration devait ainsi considérer que sa demande était incomplète et donc irrecevable et qu'elle ne pouvait lui délivrer aucune attestation lui ouvrant droit au bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée. Elle fait valoir, d'autre part, qu'en lui délivrant l'attestation en cause pour toutes les opérations qu'elle effectue dans le cadre de la formation professionnelle continue, et donc y compris pour celles à destination des salariés de ses entreprises membres alors que ces opérations ne relèvent pas d'une activité d'intérêt général, l'administration a fait une interprétation des dispositions du a. du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts et de l'article 202 B de l'annexe II à ce code, contraire à l'article 132, paragraphe 1 sous i) de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, tel qu'interprété par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, en particulier son arrêt du 28 novembre 2013 n° C-319/12. Toutefois, en application des principes rappelés au point 3 du présent arrêt, les illégalité et inconventionnalité ainsi invoquées sont sans incidence sur la légalité de la décision en litige dès lors que l'AFPI n'a pas saisi l'administration d'une demande de retrait de l'attestation litigieuse dans le délai de quatre mois suivant sa délivrance. Les moyens invoqués doivent donc être écartés comme étant inopérants et ce, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel.

6. En second lieu, l'AFPI Bourgogne 21 71 soutient que le préfet de la région Bourgogne Franche-Comté a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de retirer l'attestation mentionnée au a. du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts. Elle fait valoir que cette décision met en péril la poursuite de son activité dans la mesure où elle ne peut pas prétendre à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les dépenses engagées pour la réalisation de formations dans le domaine de la métallurgie et qu'elle est par ailleurs soumise à la taxe sur les salaires en vertu de l'article 231 du code général des impôts. Néanmoins, ainsi qu'elle le soutient d'ailleurs elle-même, la situation qu'elle invoque n'est pas la conséquence de la décision de refus de retrait de l'attestation prise par le préfet mais résulte de l'application de la loi fiscale qui exonère de taxe sur la valeur ajoutée les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées effectuées dans le cadre de la formation professionnelle continue assurée par des personnes de droit privé remplissant les conditions pour exercer cette activité. Il en résulte que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation n'est pas fondé et doit être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que l'AFPI Bourgogne 21 71 n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée y compris ses conclusions présentées au titre des frais du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'AFPI Bourgogne 21 71 est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association de formation professionnelle de l'industrie (AFPI) Bourgogne 21 71 et au ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

Copie en sera adressée pour information au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 2 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

Mme Lesieux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 septembre 2021.

2

N° 19LY02957


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY02957
Date de la décision : 23/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-01-01-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Personnes et activités imposables. - Énumération des personnes et activités.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : CMS FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-09-23;19ly02957 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award