Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 12 mai 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2003862 du 6 novembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 4 décembre 2020, Mme B..., représentée par Me Gelot (SELARL SKOV), avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 6 novembre 2020 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 12 mai 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiante " dans le délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- cette décision méconnaît l'article L. 313-7 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation, au vu des motifs médicaux justifiant l'absence de progression de ses études et la cohérence de son changement d'orientation ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est insuffisamment motivée en droit ;
- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par une ordonnance du 8 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 mai 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 6 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 12 mai 2020 refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiante, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord (...) ". Aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " I. La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant " (...). II. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte mentionnée au I est accordée de plein droit : (...) 4° A l'étranger titulaire du baccalauréat français préparé dans un établissement relevant de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger ou titulaire d'un diplôme équivalent et ayant suivi pendant au moins trois ans une scolarité dans un établissement français de l'étranger (...) ".
3. Si Mme B... se prévaut du 4° du II de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en faisant valoir qu'elle est titulaire d'un baccalauréat français délivré par un établissement relevant de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, ces dispositions ne sont toutefois applicables qu'aux ressortissants étrangers sollicitant, pour la première fois, un titre de séjour en qualité d'étudiant, sans faire obstacle à ce que le renouvellement du titre ainsi obtenu soit subordonné à la justification, par le demandeur, de la réalité et du sérieux de ses études. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit, par suite, être écarté.
4. En deuxième lieu, comme indiqué ci-dessus le renouvellement de la carte de séjour temporaire délivrée à un étranger pour permettre le suivi d'un enseignement en France est subordonné, notamment, à la justification par le demandeur de la réalité et du sérieux de ses études.
5. Si Mme B... soutient que le préfet du Rhône s'est mépris sur la réalité et le sérieux de ses études, eu égard aux motifs médicaux justifiant leur absence de progression et à la cohérence de son changement d'orientation, elle a ainsi entendu reprendre en appel le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans apporter d'éléments nouveaux à son appui. Il y a lieu de l'écarter par adoption de motifs retenus par le tribunal administratif de Lyon.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".
7. Mme B..., ressortissante marocaine née en 1999, est entrée au mois d'août 2017 en France, afin d'y poursuivre des études, sous couvert d'un titre de séjour ne lui donnant pas vocation à s'y établir durablement. A la date de la décision en litige, elle résidait ainsi depuis moins de trois ans sur le territoire français, où, célibataire et dépourvue de charges de famille, elle ne dispose d'aucune attache familiale, à défaut de démontrer tant la présence de son frère en France, à l'égard duquel elle ne produit aucune pièce, que la réalité de la relation de concubinage qu'elle prétend entretenir avec un ressortissant portugais, dont seule la carte d'identité est produite. A l'inverse, il est constant qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 18 ans et s'est régulièrement rendue depuis son entrée en France et où demeurent, à tout le moins, ses parents. Dans ces circonstances, et nonobstant les études qu'elle a débutées en France, Mme B... n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Rhône a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations précitées.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, contrairement à ce que prétend Mme B..., l'arrêté du 12 mai 2020 vise le 3° du I de L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui constitue la base légale de l'obligation de quitter le territoire français en litige. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation, en droit, de cette mesure d'éloignement manque en fait et doit être écarté.
9. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme B... n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de ce refus de titre doit être écarté.
10. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux précédemment mentionnés, Mme B..., qui n'a pas développé d'autres arguments, n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
11. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
12. En se bornant à produire des feuilles de soin, dépourvues de toutes précisions, et un certificat délivré par un médecin généraliste le 1er juillet 2020 mentionnant différentes consultations entre avril et décembre 2018 pour des difficultés respiratoires et rénales, Mme B... n'établit nullement que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par ailleurs, elle ne prétend pas qu'elle ne pourrait être prise en charge en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
13. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
14. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 31 août 2021, où siégeaient :
M. Gilles Fédi, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 septembre 2021.
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N°20LY03559