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19/08/2021 | FRANCE | N°19LY03083

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 19 août 2021, 19LY03083


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI Villa Sans Souci a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 16 janvier 2018 par laquelle le maire de Limonest a supprimé l'ensemble du cahier des charges du lotissement " Sans Souci ", ensemble la décision rejetant implicitement son recours gracieux formé le 14 mars 2018.

Par un jugement n° 1805551 du 6 juin 2019, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du maire de Limonest du 16 mars 2018 en tant qu'elle abroge les clauses du cahier des charges du lotis

sement, étrangères aux règles d'urbanisme, dans la même mesure la décision r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI Villa Sans Souci a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 16 janvier 2018 par laquelle le maire de Limonest a supprimé l'ensemble du cahier des charges du lotissement " Sans Souci ", ensemble la décision rejetant implicitement son recours gracieux formé le 14 mars 2018.

Par un jugement n° 1805551 du 6 juin 2019, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du maire de Limonest du 16 mars 2018 en tant qu'elle abroge les clauses du cahier des charges du lotissement, étrangères aux règles d'urbanisme, dans la même mesure la décision rejetant implicitement son recours gracieux formé le 14 mars 2018 et a rejeté le surplus de cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 3 août 2019 et 22 octobre 2020, la société Villa Sans Souci, représentée par Me Jourda, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 juin 2019 ainsi que l'arrêté du 16 janvier 2018 ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Limonest la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier car entaché d'une contradiction de motifs ; les premiers juges ne pouvaient sur le fondement de l'article L. 442-10 du code de l'urbanisme annuler l'arrêté en litige sans admettre son intérêt pour contester cette annulation en tant qu'elle porte sur la suppression des règles d'urbanisme ;

- l'arrêté en litige n'était pas divisible ; le tribunal ne précisant pas quelle est la portée de l'annulation partielle ainsi prononcée, c'est à tort qu'il a estimé qu'elle n'était pas recevable à demander l'annulation de l'arrêté en tant qu'il supprime les règles d'urbanisme contenues dans les documents du lotissement ;

- à supposer que l'arrêté en litige doive être regardé comme constatant la caducité des règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges du lotissement, en application des dispositions de l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme, elle conservait un intérêt à le contester dès lors que la caducité de ces règles n'impacte pas les relations entre colotis ;

- la décision en litige méconnaît l'article L. 442-10 du code de l'urbanisme ; l'ensemble des propriétaires du lotissement " Sans Souci " n'ont pas reçu une information suffisante sur le projet de suppression du cahier des charges et n'ont pas pu faire valoir leurs droits ;

- les dispositions de l'article L. 442-10 du code de l'urbanisme n'autorisent pas le maire à supprimer le cahier des charges du lotissement.

Par un mémoire en défense enregistré 1er septembre 2020, la commune de Limonest, représentée par Me Deygas, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société requérante.

Elle fait valoir que :

- à titre principal, la requête de la société Villa Sans Souci est irrecevable ; en vertu de l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme, les règles d'urbanisme contenues dans les documents du lotissement sont devenues caduques du fait de l'adoption par la commune d'un plan local d'urbanisme ; le jugement ne fait que tirer toutes les conséquences de la caducité de ces règles en déclarant irrecevables les conclusions de la société requérante dirigées contre les parties, divisibles, de l'arrêté qui contiennent des règles d'urbanisme ;

- à titre subsidiaire, à supposer que la société puisse utilement se prévaloir de l'article L. 442-10 du code de l'urbanisme, la majorité qualifiée des propriétaires a exprimé un accord sur un objet précis, en étant parfaitement informée des conséquences concrètes de la procédure ;

- la société requérante ne peut utilement se prévaloir de l'impossibilité d'abroger l'intégralité du cahier des charges du lotissement puisque le jugement a annulé l'arrêté en tant qu'il procédait à l'abrogation des stipulations autres que les règles d'urbanisme.

La clôture de l'instruction a été fixée au 9 novembre 2020, par une ordonnance du 22 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christine Psilakis, première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Jourda pour la SCI Villa Sans Souci et celles de Me Arnaud pour la commune de Limonest ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté en date du 11 août 1936, le préfet du Rhône a approuvé la création du lotissement " Sans souci ", ainsi que le cahier des charges y afférent sur la commune de Limonest. Par un arrêté, en date du 16 janvier 2018, le maire de Limonest a supprimé le cahier des charges du lotissement " Sans Souci " à la demande d'une majorité des propriétaires du lotissement. La SCI Villa Sans Souci relève appel du jugement du 6 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du maire de Limonest du 16 mars 2018 en tant seulement qu'elle abroge les clauses du cahier des charges du lotissement, étrangères aux règles d'urbanisme.

Sur la régularité du jugement :

2. Les premiers juges ont partiellement rejeté la demande de la société requérante comme irrecevable après avoir estimé que l'arrêté, en tant qu'il supprimait les seules clauses réglementaires du cahier des charges, était dépourvu de portée juridique, dès lors que ces clauses étaient caduques depuis le 27 mars 2014.

3. Aux termes de l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Les règles d'urbanisme contenues dans les documents du lotissement, notamment le règlement, le cahier des charges s'il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s'il n'a pas été approuvé, deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu./ De même, lorsqu'une majorité de colotis a demandé le maintien de ces règles, elles cessent de s'appliquer immédiatement si le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu, dès l'entrée en vigueur de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové./ Les dispositions du présent article ne remettent pas en cause les droits et obligations régissant les rapports entre colotis définis dans le cahier des charges du lotissement, ni le mode de gestion des parties communes.(...) ".

4. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les règles d'urbanisme contenues dans les documents approuvés du lotissement " Sans Souci " sont devenues caduques à compter du 1er octobre 2007, date d'entrée en vigueur des dispositions précitées, la commune de Limonest étant dotée depuis le 11 juillet 2005 d'un document d'urbanisme. Toutefois, ces stipulations continuent de régir les rapports entre colotis. Dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal a estimé que la suppression de ces clauses, décidée par l'arrêté en litige, était dépourvue d'effet juridique et qu'il a rejeté pour ce motif comme partiellement irrecevable la demande de la société requérante. Dès lors, le jugement en date du 6 juin 2019 doit être annulé sur ce point.

5. Il y a lieu pour la cour administrative d'appel, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens tirés de l'irrégularité du jugement soulevés, de se prononcer immédiatement sur ces conclusions par voie d'évocation.

Sur la légalité de l'arrêté du 16 janvier 2018 en tant qu'il concerne la suppression des seules clauses réglementaires du cahier des charges :

6. En premier lieu, il ressort de l'attestation notariale de l'étude ayant organisé la consultation des copropriétaires, datée du 15 janvier 2018 que l'objet de la consultation de l'ensemble des copropriétaires a porté sans ambigüité sur la suppression totale du cahier des charges du lotissement. Toutefois, le jugement du tribunal administratif, devenu définitif sur ce point, a annulé l'arrêté du 16 janvier en tant qu'il abroge les clauses du cahier des charges du lotissement, étrangères aux règles d'urbanisme. Dans ces conditions, la société requérante ne peut utilement soutenir que le maire n'était pas compétent pour procéder à l'abrogation totale des règles du lotissement régissant les rapports entre colotis.

7. En second lieu, aux termes de l'article L. 442-10 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable : " Lorsque la moitié des propriétaires détenant ensemble les deux tiers au moins de la superficie d'un lotissement ou les deux tiers des propriétaires détenant au moins la moitié de cette superficie le demandent ou l'acceptent, l'autorité compétente peut prononcer la modification de tout ou partie des documents du lotissement, notamment le règlement, le cahier des charges s'il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s'il n'a pas été approuvé. Cette modification doit être compatible avec la réglementation d'urbanisme applicable. / Le premier alinéa ne concerne pas l'affectation des parties communes des lotissements. ". Il appartient au maire, saisi d'une demande de modification en application de ces dispositions, de veiller à ce que l'accord qui serait exprimé par la majorité qualifiée des propriétaires soit recueilli dans des conditions qui permettent, en tous cas, aux propriétaires directement intéressés par les modifications envisagées, d'en être informés et de faire valoir leurs droits en conséquence.

8. Il ressort de l'attestation notariale de l'étude précitée au point 6 que la suppression du cahier des charges a obtenu un accord exprimé par la majorité qualifiée des propriétaires. La société requérante se borne à soutenir que cet accord a été recueilli dans des conditions ne permettant pas à l'ensemble des copropriétaires de recevoir une information adéquate, et n'apporte aucun commencement de preuve au soutien de cette allégation. Dans ces conditions, le maire de Limonest, qui a d'ailleurs visé cette attestation notariale dans l'arrêté en litige, n'a pas méconnu les dispositions précitées au point 7.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SCI est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a partiellement rejeté sa demande et partant à demander l'annulation dans cette mesure du jugement. Toutefois, ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en litige en tant que le maire procède à la suppression des clauses règlementaires du cahier des charges, lesquelles portent sur les destinations autorisées sur le lotissement, l'obligation de raccordement au réseau d'eau et d'électricité ainsi que celles relatives à la gestion des eaux usées, à l'aspect et la hauteur des clôture en bordure de voie publique, doivent être rejetées.

Sur les frais d'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande la commune de Limonest au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de la SCI Villa Sans Souci, qui n'est pas partie perdante en appel. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a en revanche pas lieu de faire application de ces mêmes dispositions à l'encontre de la commune de Limonest et de mettre à sa charge la somme que la société requérante demande au titre des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 6 juin 2019 du tribunal administratif de Lyon est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la société Villa Sans souci dirigées contre l'arrêté en tant qu'il supprime les seules clauses réglementaires du cahier des charges.

Article 2 : Les conclusions à fin d'annulation présentées par la SCI Villa sans Souci contre l'arrêté en tant qu'il supprime les clauses règlementaires du cahier des charges sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Villa Sans Souci et à la commune de Limonest.

Délibéré après l'audience du 6 juillet 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme Christine Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 août 2021.

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N° 19LY03083


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03083
Date de la décision : 19/08/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02-05 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Légalité interne du permis de construire. - Légalité au regard de la réglementation locale. - Règlements de lotissements.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : JOURDA

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-08-19;19ly03083 ?
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