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21/07/2021 | FRANCE | N°21LY00284

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 21 juillet 2021, 21LY00284


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'établissement public Voies Navigables de France (VNF) a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- de condamner M. E... D..., au titre de l'action publique, au paiement d'une amende de 3 000 euros ;

- d'enjoindre à M. D..., au titre de l'action domaniale, de libérer le domaine public fluvial dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous peine, passé ce délai, de paiement d'une astreinte de 150 euros par jour de retard ;

- de mettre à la charge de M. D... un

e somme de 385,60 euros au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice adm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'établissement public Voies Navigables de France (VNF) a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- de condamner M. E... D..., au titre de l'action publique, au paiement d'une amende de 3 000 euros ;

- d'enjoindre à M. D..., au titre de l'action domaniale, de libérer le domaine public fluvial dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous peine, passé ce délai, de paiement d'une astreinte de 150 euros par jour de retard ;

- de mettre à la charge de M. D... une somme de 385,60 euros au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1901312 du 6 novembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a condamné M. D... à payer une amende de 3 000 euros, lui a enjoint de libérer l'emplacement qu'il occupe au PK 2,1500 de la rive gauche de la Saône sur le territoire de la commune de Lyon sous astreinte de 150 euros par jour de retard, passé un délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement et l'a condamné à verser une somme de 385,60 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal.

Procédure devant la cour

I. Par une requête, enregistrée le 27 janvier 2021, sous le n° 21LY00284, et un mémoire enregistré le 22 juin 2021, M. D..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement susmentionné du 6 novembre 2020 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) à titre subsidiaire, de réduire à de plus justes proportions l'amende prononcée ;

3°) de mettre à la charge de VNF la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'est pas occupant sans droit ni titre du domaine public fluvial dès lors qu'il détient une convention d'occupation de ce domaine du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2021 ;

- l'amende prononcée à son encontre est entachée d'une erreur de droit dès lors que sa situation ne relevait pas des dispositions de l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques mais de l'article L. 2132-26 de ce code ;

- elle est disproportionnée ;

- à tout le moins, l'amende sera ramenée à de plus justes proportions dès lors qu'il n'a pas dégradé le domaine public fluvial et s'est acquitté de la redevance majorée à 100 % qui lui a été appliquée par VNF.

Par un mémoire enregistré le 31 mai 2021, et un mémoire non communiqué enregistré le 25 juin 2021, l'établissement public VNF, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. D... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- il appartenait à M. D..., qui ne démontre pas une omission intentionnelle sur ce point de VNF, de soumettre au tribunal l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public ;

- la présence d'une telle autorisation pour la période du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2021 ne saurait conduire à l'annulation totale du jugement, qui ne fait que tirer les conséquences d'une infraction dont la réalité n'est pas contestée ;

- cette autorisation n'est pas en contradiction avec la contravention de grande voirie constatée en juillet 2018 alors que M. D... est en situation irrégulière depuis le 1er janvier 2017 ;

- l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques s'applique aux faits constitutifs d'une contravention de grande voirie sur le domaine fluvial, lorsque sont en cause des bateaux stationnés sans droit ni titre.

- M. D... ne démontre aucun élément propre à l'exonérer de sa responsabilité pénale ;

- le montant de l'amende est justifié.

II. Par une requête, enregistrée le 27 janvier 2021, sous le n° 21LY00285, et un mémoire enregistré le 22 juin 2021, M. D... demande à la cour, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1901312 du 6 novembre 2020 du tribunal administratif de Lyon et mis à la charge de VNF la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que l'exécution du jugement risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables, en particulier la perte de son emplacement sur les berges du Rhône et le paiement d'une astreinte financière conséquente, et que les moyens qu'il soulève dans la requête au fond sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué.

Par un mémoire enregistré le 8 mars 2021, et un mémoire non communiqué enregistré le 25 juin 2021, l'établissement public VNF, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. D... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir les mêmes moyens que ceux opposés à la requête d'annulation du jugement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code pénal ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C... ;

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;

- les observations de Me B..., pour M. D....

Considérant ce qui suit :

1. Les deux requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. E... D... est propriétaire d'un bateau portant devise " Fort Rêveur ", immatriculé P12384F, stationnant au PK 2,1500 de la rive gauche de la Saône, sur le territoire de la commune de Lyon, face au 11, quai Rambaud, depuis le 14 juillet 2013. Il a bénéficié de conventions d'occupation temporaire du domaine public fluvial conclues avec l'établissement public VNF jusqu'au 31 décembre 2016, malgré l'absence de titre de navigation. Le 30 juin 2017, VNF a mis en demeure M. D... de mettre immédiatement un terme à l'occupation sans autorisation du domaine public fluvial depuis le 1er janvier 2017 soit par la communication de son titre de navigation en cours de validité, soit par la libération et la remise en état des lieux occupés avant le 15 juillet 2017, sous peine de l'engagement à son encontre d'une procédure de contravention de grande voirie. Un procès-verbal établi le 16 juillet 2018 à l'encontre de M. D... a constaté que son bateau " Fort Rêveur " était toujours stationné irrégulièrement dans les conditions ci-dessus précisées. VNF a ensuite saisi le tribunal administratif de Lyon d'une demande tendant à la condamnation de M. E... D..., au titre de l'action publique, au paiement d'une amende de 3 000 euros, à ce qu'il soit enjoint à M. D..., au titre de l'action domaniale, de libérer le domaine public fluvial dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous peine, passé ce délai, de paiement d'une astreinte de 150 euros par jour de retard, et mis à la charge de M. D... une somme de 385,60 euros au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1901312 du 6 novembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a condamné M. D... à payer une amende de 3 000 euros, lui a enjoint de libérer l'emplacement qu'il occupe sans droit ni titre sur la rive gauche de la Saône sur le territoire de la commune de Lyon sous astreinte de 150 euros par jour de retard, passé un délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement, et l'a condamné à verser une somme de 385,60 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal. M. D... relève appel de ce jugement et en demande le sursis à exécution.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'action publique :

3. Aux termes de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l'usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu'en ce cas ils fassent l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public. ". Aux termes de l'article L. 2111-7 du même code : " Le domaine public fluvial naturel est constitué des cours d'eau et lacs appartenant à l'Etat, aux collectivités territoriales ou à leurs groupements, et classés dans leur domaine public fluvial. ". L'article L. 2122-1 de ce code dispose : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous. ". Aux termes de l'article L. 2132-27 du même code : " Les contraventions définies par les textes mentionnés à l'article L. 2132-2, qui sanctionnent les occupants sans titre d'une dépendance du domaine public, se commettent chaque journée et peuvent donner lieu au prononcé d'une amende pour chaque jour où l'occupation est constatée, lorsque cette occupation sans titre compromet l'accès à cette dépendance, son exploitation ou sa sécurité. ". Aux termes de l'article L. 2132-2 du même code : " Les contraventions de grande voirie sont instituées par la loi ou par décret, selon le montant de l'amende encourue, en vue de la répression des manquements aux textes qui ont pour objet, pour les dépendances du domaine public n'appartenant pas à la voirie routière, la protection soit de l'intégrité ou de l'utilisation de ce domaine public, soit d'une servitude administrative mentionnée à l'article L. 2131-1. Elles sont constatées, poursuivies et réprimées par voie administrative. ". Aux termes de l'article L. 2132-9 de ce code : " Les riverains, les mariniers et autres personnes sont tenus de faire enlever les pierres, terres, bois, pieux, débris de bateaux et autres empêchements qui, de leur fait ou du fait de personnes ou de choses à leur charge, se trouveraient sur le domaine public fluvial. Le contrevenant est passible d'une amende de 150 à 12 000 euros, de la confiscation de l'objet constituant l'obstacle et du remboursement des frais d'enlèvement d'office par l'autorité administrative compétente. ". L'article L. 2132-26 prévoit : " Sous réserve des textes spéciaux édictant des amendes d'un montant plus élevé, l'amende prononcée pour les contraventions de grande voirie ne peut excéder le montant prévu par le 5° de l'article 131-13 du code pénal. Dans tous les textes qui prévoient des peines d'amendes d'un montant inférieur ou ne fixent pas le montant de ces peines, le montant maximum des amendes encourues est celui prévu par le 5° de l'article 131-13. Dans tous les textes qui ne prévoient pas d'amende, il est institué une peine d'amende dont le montant maximum est celui prévu par le 5° de l'article 131-13. ". En vertu de l'article 131-13 : " Constituent des contraventions les infractions que la loi punit d'une amende n'excédant pas 3 000 euros. Le montant de l'amende est le suivant : 5° 1 500 euros au plus pour les contraventions de la 5e classe, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit, hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit. ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date du procès-verbal du 16 juillet 2018, M. D... occupait sans droit ni titre un emplacement situé sur le domaine public fluvial au PK 2,1500 de la rive gauche de la Saône, sur le territoire de la commune de Lyon, sa dernière convention d'occupation temporaire du domaine public fluvial conclue avec l'établissement public VNF étant venue à terme le 31 décembre 2016, après qu'il ait été informé, par courrier du 11 avril 2016 qu'il s'agissait de la dernière convention accordée sans titre de navigation et que sans un tel titre, la convention ne sera pas renouvelée au 1er janvier 2017 et une procédure de contravention de grande voirie sera engagée à son encontre. Ce procès-verbal faisant suite à une mise en demeure du 30 juin 2017 restée sans effet. Ce fait est constitutif d'une contravention de grande voirie relevant de l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publique, le stationnement sans autorisation du bateau de l'appelant constituant un empêchement au sens de cet article. La circonstance que l'intéressé ait obtenu une nouvelle convention d'occupation de ce domaine du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2021, soit postérieurement à cette contravention, et celle qu'il ait initié des démarches administratives pour procéder au contrôle technique de son bateau, au demeurant postérieurement au procès-verbal précité, et qu'il se serait heurté à une inertie de la direction départementale des territoires (DDT), sont sans incidence sur la légalité de cette contravention. En infligeant une amende de 3 000 euros, le tribunal n'a pas, compte tenu de la gravité du manquement commis, prononcé une amende excessive. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que l'amende prononcée à son encontre est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation.

En ce qui concerne l'action domaniale :

5. Il ressort des pièces produites en appel que M. D... a obtenu une nouvelle convention d'occupation temporaire du domaine public fluvial pour son bateau " Fort Rêveur " pour l'emplacement qu'il occupe pour une durée de trois années du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2021. Il est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal, statuant sur l'action domaniale, lui a enjoint de libérer cet emplacement qu'il occupait à la date du jugement régulièrement.

Sur le sursis à exécution du jugement :

6. Le présent arrêt statuant sur l'appel présenté contre le jugement n° 1901312 du 6 novembre 2020 du tribunal administratif de Lyon, les conclusions de la requête n° 21LY00285 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont ainsi privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées dans les deux instances :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par M. D... et VNF.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de sursis à exécution de la requête n° 21LY00285.

Article 2 : L'article 2 du jugement n° 1901312 du 6 novembre 2020 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 3 : Les conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans les instances n° 21LY00284 et n° 21LY00285 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et à l'établissement public Voies navigables de France.

Délibéré après l'audience du 1er juillet 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, présidente-assesseure,

M. C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juillet 2021.

2

Nos 21LY00284, 21LY00285


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00284
Date de la décision : 21/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04 Marchés et contrats administratifs. - Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. - Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Christophe RIVIERE
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : CABINET GUITTON-DADON

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-07-21;21ly00284 ?
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