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15/07/2021 | FRANCE | N°21LY00749

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 15 juillet 2021, 21LY00749


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 5 janvier 2021 par lequel le préfet du Rhône a décidé de sa remise aux autorités suédoises, responsables de sa demande d'asile.

Par jugement n° 2100337 du 9 février 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 9 mars 2021, présentée pour M. C..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n°

2100337 du 9 février 2021 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 5 janvier 2021 par lequel le préfet du Rhône a décidé de sa remise aux autorités suédoises, responsables de sa demande d'asile.

Par jugement n° 2100337 du 9 février 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 9 mars 2021, présentée pour M. C..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2100337 du 9 février 2021 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, de réexaminer sa demande d'asile dans un délai de trois jours et de lui délivrer une attestation de demande d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que la décision de transfert méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement.

Par mémoire enregistré le 3 mai 2021, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 modifié par le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Seillet, président assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., de nationalité syrienne, née le 20 juin 1986 à Aleppo (Syrie), entré en France le 21 septembre 2020, selon ses déclarations, avec son épouse et leur fille mineure, a déposé une demande d'asile enregistrée à la préfecture de l'Isère le 6 octobre 2020. Le système Eurodac a révélé qu'il avait été identifié en Suède, où il avait présenté une demande d'asile le 13 novembre 2014. Les autorités suédoises, saisies d'une demande de reprise en charge de M. C... le 30 novembre 2020, ont fait connaître leur accord explicite pour sa réadmission le 9 décembre 2020. Par un arrêté du 5 janvier 2021, le préfet du Rhône a ordonné son transfert aux autorités suédoises, responsables de sa demande d'asile. M. C... relève appel du jugement du 9 février 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du préfet du Rhône du 5 janvier 2021.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. M. C... se prévaut de la présence en France de son épouse, Mme D..., ressortissante syrienne également demanderesse d'asile, et de leur fille, née en 2017, et de leur vie commune stable sur le territoire français. Toutefois, à la date de la décision en litige, l'ensemble du foyer familial n'était présent sur le sol français que depuis moins de quatre mois et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils auraient noué des liens anciens, intenses et stables sur le territoire français en dehors de la cellule familiale, dont aucun membre n'avait vocation à séjourner de manière durable en France, alors qu'il a mentionné lors de son entretien en préfecture que ses parents possédaient la nationalité suédoise. Dans ces circonstances, la décision en litige ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. En second lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ".

5. La faculté laissée à chaque État membre, par le 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

6. M. C... fait valoir que les autorités suédoises ont rejeté sa demande d'asile et qu'en cas de transfert vers la Suède, il sera reconduit en Syrie où il encourt des risques pour sa vie, notamment eu égard à la violence extrême qui sévit dans ce pays. Toutefois, à supposer même que la demande d'asile de M. C... aurait été définitivement rejetée par les autorité suédoises et qu'une décision d'éloignement définitive aurait été prise à son encontre par les autorités suédoises, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne serait pas en mesure de faire valoir devant ces mêmes autorités, responsables de l'examen de sa demande d'asile et qui ont accepté sa reprise en charge, tout élément nouveau relatif à l'évolution de sa situation personnelle et à la situation de conflit qui prévaut en Syrie. Par suite, en s'abstenant de faire application du 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013, le préfet du Rhône n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. M. C... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la décision de transfert a pour objet de le remettre aux autorités suédoises pour un nouvel examen de sa demande d'asile, non pas de l'éloigner à destination de la Syrie via la Suède en exécution d'une obligation de quitter le territoire suédois prise antérieurement.

7. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2021 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme B..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juillet 2021.

1

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N° 21LY00749


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00749
Date de la décision : 15/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-07-15;21ly00749 ?
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