Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme G... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 1er août 2018 par laquelle la ministre du travail a retiré la décision implicite du rejet de recours hiérarchique, a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 7 décembre 2017 et a autorisé son licenciement.
Par jugement n° 1807188 lu le 17 octobre 2019, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 16 décembre 2019, Mme A..., représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et d'annuler la décision susmentionnée ;
2°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision attaquée n'est pas motivée ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation sur la motivation de la décision de l'inspectrice du travail ayant conduit à son annulation par la ministre ;
- la décision attaquée est entachée d'erreur d'appréciation de la réalité du motif économique au niveau du groupe ; la réalité de ce motif n'est pas établie ; la demande d'autorisation de licenciement repose sur une faute de la société et une légèreté blâmable ;
- son employeur n'a pas satisfait à son obligation de reclassement ; les offres de reclassement qui lui ont été faites ne sont ni sérieuses, ni précises, ni loyales ;
- il existe un lien entre la demande d'autorisation de licenciement et ses mandats.
Par mémoire enregistré le 14 février 2020, la société Citizen Call, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Par mémoire enregistré le 12 novembre 2020, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Par ordonnance du 13 novembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 décembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D..., première conseillère ;
- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
- les observations de Me F..., substituant Me E..., pour Mme A..., ainsi que celles de Me C... substituant Me B... pour la société Citizen Call ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., téléconseillère, employée à Villeurbanne en contrat à durée indéterminée depuis le 10 janvier 2000, par la société Citizen Call qui exerce une activité de centre d'appels répartie sur trois sites à Villeurbanne, Nantes et Mérignac, était investie du mandat de membre du comité d'entreprise. Par décision du 7 décembre 2017, l'inspectrice du travail a refusé d'autoriser son licenciement pour motif économique en raison d'une fraude à la loi, d'un lien avec le mandat et de l'absence de recherche sérieuse de reclassement. Par décision du 1er août 2018, la ministre du travail après avoir retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique et annulé la décision de l'inspectrice du travail du 7 décembre 2017 pour défaut de défaut motivation, a autorisé le licenciement. Mme A... relève appel du jugement du 17 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cette décision ministérielle autorisant son licenciement.
2. En vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise. L'autorité administrative ne peut légalement faire droit à une telle demande d'autorisation de licenciement que si l'ensemble de ces exigences sont remplies. Par suite, lorsqu'il est saisi par l'employeur d'un recours hiérarchique contre une décision d'un inspecteur du travail qui a estimé que plusieurs de ces exigences n'étaient pas remplies et qui s'est, par suite, fondé sur plusieurs motifs faisant, chacun, légalement obstacle à ce que le licenciement soit autorisé, le ministre ne peut annuler cette décision que si elle est entachée d'illégalité externe, ou bien si aucun des motifs retenus par l'inspecteur du travail n'est fondé. Ce n'est que si ces conditions sont réunies qu'il peut se prononcer de nouveau sur la demande d'autorisation de licenciement compte tenu des circonstances de droit et de fait à la date à laquelle il prend sa propre décision.
3. Aux termes des articles R. 2421-5 et R. 2421-12 du code du travail : " La décision de l'inspecteur est motivée ". Au sens de ces dispositions, la motivation s'entend de l'exposé des motifs qui déterminent l'autorité compétente à se prononcer en un sens déterminé, sans égard à la légalité de ces motifs. Or, la décision du 7 décembre 2017 énonce les considérations sur lesquelles l'inspectrice s'est fondée pour rejeter la demande de l'entreprise, à savoir l'absence de validité du motif de licenciement, la fraude à la loi qui entacherait l'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi dont l'employeur invoque la mise en oeuvre, le lien entre la demande de licenciement et les mandats exercés, ainsi que l'absence de recherche de reclassement. Les motifs qui ont déterminé l'inspectrice du travail à rejeter la demande ayant été énoncés, la décision répondait aux exigences des articles R. 2421-5 et R. 2421-12 et la ministre n'a pu légalement la regarder comme insuffisamment motivée en censurant, au fond, l'analyse de la situation économique de l'employeur et en se dispensant ainsi de censurer chacun des motifs de refus de l'autorisation de licenciement.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, d'une part, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 1er août 2018 par laquelle la ministre du travail après avoir retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique et annulé la décision de l'inspectrice du travail du 7 décembre 2017 a autorisé son licenciement, d'autre part, que la décision du 1er août 2018 et le jugement du 17 octobre 2019 doivent être annulés.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à Mme A... d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A... qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés à l'occasion du présent litige par la société Citizen Call.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1807188 lu le 17 octobre 2019 du tribunal administratif de Lyon et la décision du 1er août 2018 par laquelle la ministre du travail après avoir retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique et annulé la décision de l'inspectrice du travail du 7 décembre 2017 a autorisé son licenciement, sont annulés.
Article 2 : L'État versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... A..., à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et à la société Citizen Call.
Délibéré après l'audience du 24 juin 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juillet 2021.
N° 19LY04629 2