Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2020 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de l'admettre au séjour, et l'a obligé à quitter le territoire français sans délai.
Par jugement n° 2004096 lu le 5 août 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 5 septembre 2020 et un mémoire enregistré le 21 mars 2021 (non communiqué), M. E... représenté par Me A... D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement, ainsi que l'arrêté du 16 juillet 2020 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire sans délai et fixation du pays de destination ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa demande de séjour après remise d'une autorisation provisoire de séjour ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement, qui repose sur une procédure non contradictoire, qui ne statue que sur la menace à l'ordre public et qui est insuffisamment motivé, est irrégulier ;
- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions combinées du 2° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'exception d'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions combinées du 2° de l'article L. 311-11 et de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la fixation du pays de renvoi est entachée d'exception d'illégalité de la décision d'éloignement.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a produit aucune observation.
Par lettre du 12 février 2021, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur l'irrecevabilité des conclusions aux fins d'annulation du refus de titre de séjour, nouvelles en appel.
Par mémoire (non communiqué) enregistré le 21 février 2021, en réponse à la communication du moyen d'ordre public, M. E... persiste dans ses conclusions.
L'affaire a été appelée à l'audience publique du 25 mars 2021.
La demande d'aide juridictionnelle de M. E... a été rejetée, par décision du 9 juin 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B..., première conseillère ;
- et les observations de Me A... D..., pour M. E... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant de la République démocratique du Congo, entré selon ses déclarations sur le territoire français en septembre 2010 à l'âge de onze ans, relève appel du jugement lu le 5 août 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 16 juillet 2020 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 2° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'a obligé à quitter le territoire français sans délai.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 611-6-8 du code de justice administrative : " Toute juridiction peut adresser par le moyen de l'application informatique [télérecours] (...), à une partie ou à un mandataire qui y est inscrit, toutes les communications et notifications prévues par le présent livre pour tout dossier. Les parties ou leur mandataire sont réputés avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été ainsi adressé, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai (...) Lorsque le juge est tenu, en application d'une disposition législative ou réglementaire, de statuer dans un délai inférieur ou égal à un mois, la communication ou la notification est réputée reçue dès sa mise à disposition dans l'application ". Aux termes de l'article R. 711-2-1 du même code : " Les parties ou leur mandataire inscrits dans l'application informatique [télérecours] (...) peuvent être convoqués à l'audience par le moyen de cette application ".
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que l'avis d'audience a été régulièrement notifié à l'avocat alors désigné par M. E..., ainsi qu'en atteste l'accusé de réception émis par l'application Télérecours. Cette notification était opposable au nouveau mandataire de justice désigné par l'intéressé, à son initiative, avant l'audience du 5 août 2020. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier, faute de contradictoire et que la procédure suivie aurait méconnu l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.
4. Le jugement attaqué, qui expose les motifs par lesquels sont écartés les moyens invoqués par M. E..., répond aux exigences de l'article L. 9 du code de justice administrative.
5. Enfin, la circonstance que le tribunal ait restreint l'appréciation de la situation de M. E... à la menace que sa présence fait peser sur l'ordre public a trait au fond du litige et est sans effet sur la régularité du jugement.
Sur le fond du litige :
6. Les dispositions alors codifiées à l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant les mesures d'expulsion, le moyen tiré de leur méconnaissance doit être écarté comme inopérant.
7. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 2° A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui justifie par tout moyen avoir résidé habituellement en France avec au moins un de ses parents (...) depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier que M. E..., connu des services de police pour des faits commis entre août 2015 et mai 2020, avait été condamné à une peine de dix mois de prison (dont six avec sursis) qu'il purgeait au moment de l'édiction de la mesure. Compte tenu de la multiplicité et de la gravité de ces faits, sa présence sur le territoire français est constitutive d'une menace pour l'ordre public, au sens des dispositions précitées. Par suite, M. E... n'établit pas être, à la date à laquelle la décision en litige a été prise, en situation de prétendre de plein droit, par application du 2° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la délivrance d'une carte de séjour temporaire.
9. Eu égard à la menace que la présence de M. E... représente pour l'ordre public, le préfet n'a pas, en refusant de le régulariser, porté au droit de ce dernier au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a pris sa décision au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation.
10. L'exception d'illégalité du refus de séjour, ainsi que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions alors codifiées au 2° de l'article L. 313-11, à l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, directement invoqués contre l'obligation de quitter le territoire français, doivent être écartés par les motifs des points 6 à 9.
11. L'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, dirigée contre la fixation du pays de destination, doit être écartée par les motifs du point 10.
12. Il résulte de ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal a rejeté sa demande. Les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 27 mai 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme B..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2021.
N° 20LY02622 2