Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période courant du mois de janvier 2011 au mois de novembre 2013, ainsi que des pénalités afférentes.
Par un jugement n°1706442 du 22 janvier 2019, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, déchargé M. B... des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période courant du 1er jour du mois de l'année 2011 au cours duquel son chiffre d'affaires a dépassé le seuil de 34 600 euros au 1er jour du mois de l'année 2011 au cours duquel son chiffre d'affaires a dépassé le seuil de 89 600 euros, et des pénalités correspondantes, et dans un article 2, rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 24 mars 2019, M. B..., représenté par Me A..., doit être regardé comme demandant à la cour :
1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du 22 janvier 2019 et de prononcer la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée restant à sa charge pour la période courant de janvier 2011 à novembre 2013 ;
2°) de prononcer la restitution des sommes déjà versées assorties des intérêts moratoires ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la proposition de rectification du 11 juin 2014 méconnaît l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ;
- il est fondé à se prévaloir du BOI-CF-IOR-50-20 n° 120 ;
- l'administration, dans le cadre de son droit de communication, s'est limitée à demander aux établissements bancaires les relevés bancaires sans pour autant solliciter les copies des remises de chèques ou les ordres de virements afin de déterminer si les crédits portés sur ses comptes pouvaient relever de ses recettes professionnelles ; un tel procédé est déloyal ;
- la méthode utilisée par le service pour reconstituer le chiffre d'affaires, se contentant de comptabiliser en recettes des sommes créditées sur ses comptes bancaires, est excessivement sommaire ; l'administration n'établit pas que les crédits apparaissant sur les relevés de comptes bancaires correspondent à des recettes professionnelles ni même qu'elles seraient rattachables aux exercices en litige conformément au fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée et de la détermination du bénéfice imposable en matière de travaux immobiliers ;
- il est en droit de bénéficier de l'abattement de 71 % sur le chiffre d'affaires prévu dans le cadre des microentreprises pour tenir compte des frais et charges impliqués par son activité de maçon et le taux de 50% de charges retenu par le service est insuffisant ;
- l'administration lui a, à tort, refusé la déduction de toute taxe sur la valeur ajoutée alors qu'il a nécessairement payé de la taxe sur la valeur ajoutée auprès de ses fournisseurs.
Par un mémoire, enregistré le 9 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C..., première conseillère,
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., qui exerce une activité de travaux en maçonnerie sous le statut d'auto-entrepreneur depuis le 8 mars 2011, a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2011 et 2012 et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période courant du mois de janvier 2011 au mois de novembre 2013. M. B... relève appel de l'article 2 du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces suppléments et rappels.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si M. B... soutient que le tribunal aurait omis de statuer sur " des moyens soulevés " dans sa requête, il n'identifie précisément aucun moyen auquel le tribunal n'aurait pas répondu ne mettant pas ainsi la Cour en mesure d'apprécier le bien-fondé de son moyen. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué ne peut qu'être écarté.
Sur la procédure d'imposition :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. Cette notification est interruptive de prescription. (...) Les dispositions du présent article ne sont pas applicables dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 67 ". Le deuxième alinéa de l'article L. 67 du livre des procédures fiscales vise notamment le cas où le contrôle fiscal n'a pu avoir lieu du fait du contribuable.
4. Lorsque les bases de l'imposition d'un contribuable ont été évaluées d'office à la suite de son opposition au contrôle fiscal, le législateur a entendu priver l'intéressé, qui s'est de lui-même placé en dehors des règles applicables à la procédure d'imposition, des garanties dont bénéficient les contribuables, qu'ils soient imposés selon la procédure contradictoire ou selon une procédure d'imposition d'office, et notamment de celles tenant à l'obligation qui pèse sur le service d'adresser une proposition de rectification régulièrement motivée ou d'informer l'intéressé de la teneur et de l'origine des renseignements qu'il a pu recueillir par l'exercice de son droit de communication et qu'il a utilisés pour arrêter les bases de l'imposition.
5. Il résulte de l'instruction qu'un procès-verbal pour opposition à contrôle fiscal a été établi le 26 mars 2014 par l'administration fiscale. Celle-ci a mis en œuvre les procédures d'évaluation d'office des bénéfices commerciaux réalisés par M. B... pour les années 2011 et 2012 en vertu de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales et de taxation d'office pour la taxe sur la valeur ajoutée non déclarée correspondant à son activité en vertu du 3° de l'article L. 66 du même livre en l'absence de dépôt par l'intéressé dans les délais légaux des déclarations CA 12 pour la période vérifiée. En application des principes susvisés, l'administration n'était pas tenue de porter à la connaissance de M. B... les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination. Par suite, si l'administration a néanmoins procédé à l'établissement et à l'envoi d'une proposition de rectification, le moyen tiré de ce que cette proposition serait insuffisamment motivée est inopérant. Au demeurant, et en tout état de cause, il ressort des termes même de la proposition de rectification qui a été adressée le 11 juin 2014 à M. B... en application de ces procédures que celle-ci mentionne les impôts concernés, les périodes et les bases d'imposition retenues. Elle précise que, faute pour le contribuable d'avoir présenté une comptabilité, les recettes ont été reconstituées à partir des encaissements constatés sur les comptes bancaires obtenus dans le cadre du droit de communication auprès des établissements bancaires. L'administration, par souci de réalisme économique et malgré l'absence de justificatif, a retenu un abattement de 50% du chiffre d'affaires hors taxes au titre des charges. En outre, la proposition de rectification en litige indique que l'ensemble des encaissements a été soumis à la taxe sur la valeur ajoutée et qu'aucune taxe déductible n'a été retenue en l'absence de facture transmise. Enfin, figurent en annexe à cette proposition des tableaux récapitulant l'ensemble des encaissements pris en compte. La proposition de rectification adressée à M. B... satisfait ainsi aux exigences de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales.
6. En deuxième lieu, le droit de communication reconnu à l'administration fiscale par les articles L. 81 à L. 96 du livre des procédures fiscales, notamment auprès des entreprises industrielles ou commerciales ou des membres de certaines professions non commerciales, a seulement pour objet de permettre au service, pour l'établissement et le contrôle de l'assiette d'un contribuable, de demander à un tiers ou, éventuellement au contribuable lui-même, sur place ou par correspondance, de manière ponctuelle, des renseignements disponibles sans que cela nécessite d'investigations particulières, ou dans les mêmes conditions, de prendre connaissance, et le cas échéant, copie de certains documents existants qui se rapportent à l'activité professionnelle de la personne auprès de laquelle ce droit est exercé. Contrairement à ce que soutient M. B..., le fait pour l'administration d'avoir uniquement demandé aux établissements bancaires, dans le cadre de son droit de communication, les relevés bancaires et non les copies des remises de chèques ou les ordres de virements correspondant aux crédits portés sur ces relevés ne saurait caractériser une irrégularité dans l'exercice de ce droit de communication ni constituer un procédé déloyal.
7. En dernier lieu, l'appelant ne saurait se prévaloir de la doctrine administrative référencée BOI-CF-IOR-50-20 n°120 dès lors que, relative à la procédure d'imposition, elle n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
Sur le bien-fondé des impositions restant en litige :
8. En application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, et M. B... ne contestant pas la régularité de la procédure d'évaluation d'office dont il fait l'objet en vertu de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales ni de la procédure de taxation d'office suivie sur le fondement du 3°) de l'article L. 66 du même livre, il supporte la charge de prouver l'exagération des impositions mises à sa charge.
9. A partir du moment où l'administration a reconstitué les ventes sans facture d'un exercice, elle ne peut se refuser de déduire le montant des achats, également sans facture, des marchandises ainsi vendues. A défaut de facture, il lui appartient d'évaluer, à l'aide de tous les éléments dont elle peut disposer, le montant de ces achats.
10. D'une part, ainsi qu'il a été rappelé, la proposition de rectification du 11 juin 2014 expose la méthode d'évaluation des résultats fondée sur le montant des encaissements figurant sur les relevés des comptes bancaires de M. B... obtenus dans le cadre du droit de communication exercé auprès de plusieurs établissements bancaires et considérés comme des recettes professionnelles pour lesquelles l'administration a admis, dans un souci de réalisme économique, en l'absence de justificatifs de charge et de déclaration de résultats déposées pour les années vérifiées, un montant de charges égal à 50% hors taxes. Il résulte de l'instruction que l'administration n'a procédé ainsi que parce qu'elle ne disposait d'aucun document comptable ni de factures afférentes à l'activité exercée en raison de la situation d'opposition à contrôle fiscal. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la méthode employée par l'administration serait radicalement viciée ou excessivement sommaire. En outre, contrairement à ce qu'il soutient, il lui appartient, en vertu de l'article L. 193 précité, d'apporter des éléments de nature à justifier que les encaissements apparaissant sur ses comptes bancaires et restant en litige ne constitueraient pas des recettes professionnelles, ou que certains encaissements professionnels ne se rattacheraient pas aux années en litige ou encore que le service aurait inexactement apprécié le fait générateur des créances en matière de taxe sur la valeur ajoutée.
11. En l'espèce, il est constant que les chiffres d'affaires reconstitués par le service, après acceptation partielle de deux des réclamations présentées par M. B..., s'élèvent à 109 568 euros pour l'année 2011 et 167 086 euros pour l'année 2012, dépassant ainsi le seuil de 81 500 euros applicable à l'activité mixte exercée par l'appelant de vente et de prestations de services et prévu à l'article 50-0 du code général des impôts. Il s'en suit que l'intéressé n'est pas fondé à se prévaloir de ces dispositions pour revendiquer un abattement de 71% au titre des charges induites par son activité. En outre, il n'apporte aucun élément de nature à démontrer que le taux de 50% de charges retenu par le service serait insuffisant.
12. D'autre part, M. B... soutient que l'administration lui a refusé la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il a nécessairement payée auprès de ses fournisseurs. En l'espèce, et à partir du moment où l'administration a reconstitué les recettes réalisées par M. B... à partir des encaissements constatés sur ses comptes bancaires et ce sans factures et a admis un montant de charges au titre de l'activité exercée, elle ne peut se refuser de déduire la taxe sur la valeur ajoutée grevant les achats nécessairement effectués par M. B... pour l'exercice de cette activité pour la seule raison que ce dernier n'est pas en mesure de présenter des factures. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que la méthode retenue par le service est, s'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, excessivement sommaire et à demander la décharge du surplus des rappels de taxe mis à sa charge au titre de la période vérifiée.
13. Il résulte de ce qui précède que M. B... est uniquement fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période courant de janvier 2011 à novembre 2013. Les conclusions qu'il présente à fin de décharge des suppléments d'impôt sur le revenu mis à sa charge pour les années 2011 et 2012 doivent être rejetées.
Sur les conclusions tendant à la restitution des sommes versées assorties des intérêts moratoires :
14. Les intérêts moratoires prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, sont, en vertu de l'article R. 208-1 de ce code, " payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts ". Il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable et l'appelant au sujet des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont le présent arrêt prononce la décharge et des intérêts moratoires correspondants. Dès lors, les conclusions de M. B... tendant au remboursement des sommes versées assorties d'intérêts moratoires ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
15. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : M. B... est déchargé du surplus des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période courant du mois de janvier 2011 au mois de novembre 2013.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : L'article 2 du jugement n°1706442 du 22 janvier 2019 du tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 10 juin 2021 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme C..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er juillet 2021.
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N° 19LY01125