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30/06/2021 | FRANCE | N°19LY03104

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 30 juin 2021, 19LY03104


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

I°) sous le n° 1708227 :

1°) de condamner le centre communal d'action sociale (CCAS) de Champagne-au-Mont-d'Or à lui verser la somme de 107 440 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 avril 2017, en réparation des préjudices causés par les fautes commises dans la gestion de sa carrière ;

2°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge du CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or au titre de l'article L. 761-1

du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

II°) sous ...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

I°) sous le n° 1708227 :

1°) de condamner le centre communal d'action sociale (CCAS) de Champagne-au-Mont-d'Or à lui verser la somme de 107 440 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 avril 2017, en réparation des préjudices causés par les fautes commises dans la gestion de sa carrière ;

2°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge du CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

II°) sous le n° 1801400 :

1°) de condamner le CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or à lui verser la somme de 4 740 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 novembre 2017, en réparation de la perte de ses droits à pension du fait des fautes commises dans la gestion de sa carrière ;

2°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge du CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement nos 1708227, 1801400 du 6 mars 2019, le tribunal administratif de Lyon a joint ces demandes et a condamné le CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or à verser à Mme A... une somme de 3 740 euros, augmentée des intérêts au taux légal, à compter du 27 avril 2017 sur la somme de 2 000 euros et à compter du 16 novembre 2017 sur la somme de 1 740 euros, outre 1 200 euros à verser au conseil de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 août 2019 et un mémoire enregistré le 29 octobre 2020, Mme A..., représentée par Me Jourda, avocat, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 mars 2019 en ce qu'il limite la condamnation du CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or à la somme de 3 740 euros ;

2°) de porter à 70 000 euros le montant de l'indemnité due, augmentés des intérêts au taux légal à compter du 27 avril 2017 ;

3°) de mettre à la charge du CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or le paiement à son avocat d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient qu'en limitant à 2 000 euros l'indemnité accordée au titre du préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence, le tribunal administratif a inexactement évalué ces préjudices, eu égard à la situation de précarité dans laquelle elle s'est trouvée et à la perte de chance de retrouver un emploi à plein traitement engendrée par l'absence de toute recherche de reclassement par son employeur à compter du mois de juin 2012.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 26 mai 2020 et le 18 décembre 2020, le CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or, représenté par Me E... (G...-E...-H... et Tissot), avocat, conclut au rejet de la requête.

Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une décision du 12 juin 2019, Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par ordonnance du 11 décembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 ;

- le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... F...,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations de Me Jourda, avocat, représentant Mme A..., et de Me D... représentant le CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., agent social titulaire au sein du CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or, a été placée en congé de longue maladie du 5 novembre 2009 au 5 novembre 2012. A l'issue de ce congé, elle a été placée en disponibilité d'office dans l'attente d'un reclassement, du 5 novembre 2012 au 4 novembre 2016, date à laquelle elle a été admise à la retraite pour invalidité. Estimant que son placement en disponibilité d'office a été irrégulièrement prolongé et pendant une durée excessive, et suite au rejet de ses demandes indemnitaires préalables, Mme A... a demandé la condamnation du CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or à l'indemniser des préjudices causés par les fautes commises dans la gestion de son dossier. Elle relève appel du jugement du 13 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a limité la condamnation du CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or à une somme de 3 740 euros, afin que celle-ci soit portée à 70 000 euros.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article 19 du décret du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l'intégration : " La mise en disponibilité peut être prononcée d'office à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus au premier alinéa du 2°, au premier alinéa du 3° et au 4° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues aux articles 81 à 86 de la loi du 26 janvier 1984. La durée de la disponibilité prononcée en vertu du premier alinéa du présent article ne peut excéder une année. Elle peut être renouvelée deux fois pour une durée égale. Si le fonctionnaire n'a pu, durant cette période, bénéficier d'un reclassement, il est, à l'expiration de cette durée, soit réintégré dans son administration s'il est physiquement apte à reprendre ses fonctions dans les conditions prévues à l'article 26, soit, en cas d'inaptitude définitive à l'exercice des fonctions, admis à la retraite ou, s'il n'a pas droit à pension, licencié. Toutefois, si, à l'expiration de la troisième année de disponibilité, le fonctionnaire est inapte à reprendre son service, mais s'il résulte d'un avis du comité médical qu'il doit normalement pouvoir reprendre ses fonctions ou faire l'objet d'un reclassement avant l'expiration d'une nouvelle année, la disponibilité peut faire l'objet d'un troisième renouvellement ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dans sa rédaction alors applicable : " Afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, les employeurs visés à l'article 2 prennent, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 323-3 du code du travail d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer et d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée, sous réserve que les charges consécutives à la mise en œuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, notamment compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l'employeur ".

4. Pour condamner le CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or, les premiers juges ont retenu que celui-ci avait commis des illégalités et des négligences fautives dans la gestion de la carrière de Mme A..., en s'étant abstenu de procéder à des recherches effectives de reclassement de l'intéressée tout au long de son placement en disponibilité d'office et de prendre des décisions de gestion concernant sa position statutaire pendant plus de deux ans, provoquant notamment un retard d'au moins un an dans son placement à la retraite pour invalidité.

5. Toutefois, en premier lieu et contrairement à ce que prétend Mme A..., il ne résulte pas des dispositions précitées de l'article 6 sexies du statut de la fonction publique que la qualité de travailleur handicapé, dont l'intéressée bénéficiait depuis 2010, aurait eu une incidence sur l'obligation pesant sur son employeur de procéder à des recherches effectives d'un reclassement au cours de son placement en disponibilité d'office. Si Mme A... prétend que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les fautes imputables au CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or l'ont privée d'une chance de retrouver un emploi à plein traitement, il résulte de l'instruction que son employeur ne disposant que d'emplois d'agents sociaux, il ne pouvait lui proposer un emploi compatible avec son état de santé au sein de ses effectifs. Par ailleurs, les démarches entreprises auprès de la commune, comme auprès du centre de gestion, se sont révélées infructueuses, à défaut de postes vacants ou de postes compatibles avec ses compétences, ainsi qu'il résulte des courriers datés du 5 juin 2012, du 16 décembre 2014 et du 7 janvier 2016. Si Mme A... prétend que certains emplois au sein de la commune, notamment de la cantine ou du centre aéré, auraient dû lui être proposés, elle n'apporte, en tout état de cause, aucun commencement de preuve de la vacance de tels emplois, ni ne démontre que son état de santé, prohibant la manutention et le port de charges lourdes, était compatible avec de tels emplois. A cet égard, elle ne saurait utilement se prévaloir de précédentes expériences en tant qu'agent d'entretien ou agent spécialisé des écoles maternelles, ces emplois ayant été exercés avant la constatation de son inaptitude. Enfin, il résulte de l'instruction qu'à la suite du vœu exprimé par Mme A... dans son courrier du 3 juillet 2012 de s'orienter vers la filière administrative, le CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or lui a proposé de suivre une formation à cette fin, à laquelle elle n'a toutefois pas été admise à défaut de satisfaire les prérequis. Si elle invoque une autre formation possible, elle n'apporte aucune précision sur celle-ci, notamment sur sa finalité. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait été privée d'une chance sérieuse de retrouver un emploi à plein traitement en raison de la méconnaissance par le CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or de son obligation de procéder à des recherches effectives d'un reclassement entre 2013 et 2016.

6. En second lieu, sur le plan financier, les fautes retenues n'ont eu pour effet, comme l'ont indiqué les premiers juges sans être contredits en appel, de priver Mme A... que de 1 740 euros en retardant d'un an son placement à la retraite et la perception d'une pension, sans la priver d'autres traitements. En outre, elle ne démontre nullement qu'elle remplissait l'ensemble des conditions pour bénéficier des aides ou des revenus de remplacement qu'elle a pu solliciter, ni, par suite, que les refus qui ont été opposés à ses demandes seraient directement liés aux incertitudes relatives à sa position statutaire entre 2013 et 2016. Par suite, elle ne démontre pas que la précarité financière dans laquelle elle s'est trouvée serait directement liée aux fautes retenues par les premiers juges. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'en limitant à 2 000 euros l'indemnisation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'elle a subis, les premiers juges ont inexactement évalué ces préjudices.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a limité le montant de la condamnation du CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or à 3 740 euros.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme A....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au CCAS de Champagne-au-Mont-d'Or.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2021, où siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme B... F..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2021.

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N° 19LY03104


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03104
Date de la décision : 30/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : JOURDA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-30;19ly03104 ?
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