Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :
1°) d'annuler, ensemble, deux décisions du 25 novembre 2016 par lesquelles le directeur général des Hospices civils de Lyon (HCL), dans la première, a fixé la consolidation de son état de santé au 19 mai 2016 " avec retour à l'état antérieur " à son accident de service du 22 mars 2016, et, dans la seconde, l'a placée en congé de maladie ordinaire, rémunéré à demi-traitement, du 25 juin au 19 septembre 2016, ainsi que les deux décisions implicites rejetant ses recours gracieux contre ces deux décisions du 25 novembre 2016 ;
2°) d'enjoindre aux Hospices civils de Lyon de prendre en charge les dépenses de soins exposées après le 19 mai 2016, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, de la placer en congés de maladie de service et de prendre en charge les soins découlant de l'accident de service survenu le 22 mars 2016.
Par un jugement n° 1703438-1703439 du 20 mars 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de Mme A....
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 17 mai 2019, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 20 mars 2019 et les décisions du 25 novembre 2016 par lesquelles le directeur général des Hospices civils de Lyon a fixé la date de consolidation de son accident de service au 19 mai 2016, avec retour à l'état antérieur et la plaçant en congé maladie ordinaire à demi-traitement à compter du 25 juin 2016 ;
2°) d'enjoindre au directeur général des Hospices civils de Lyon de reconnaître l'imputabilité au service de son état de santé au-delà du 19 mai 2016 et de lui accorder le bénéfice des dispositions du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les deux décisions litigieuses sont insuffisamment motivées, en méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Lyon, l'opération de l'épaule dont elle a fait l'objet est en lien direct avec l'accident de service du 22 mars 2016, accident qui a rendu indispensable cette opération qui n'était pas nécessaire par le passé ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Lyon, le moyen invoqué contre le refus de prise en charge de l'intervention chirurgicale, tiré de l'inexactitude concernant la date de consolidation du traumatisme à l'épaule droite, n'était pas inopérant ;
- à supposer même que son état était consolidé le 19 mai 2016, son affection persistait et était imputable au service.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2019, les Hospices civils de Lyon, représentés par la SELARL G... et F..., agissant par Me G..., concluent au rejet de la requête et demandent que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.
Ils soutiennent que les moyens ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 3 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 5 janvier 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi no 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Mme A..., et celles de Me F..., représentant les Hospices civils de Lyon ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., aide-soignante titulaire affectée au service de chirurgie orthopédique de l'Hôpital E. Herriot des Hospices civils de Lyon, a été victime le 22 mars 2016 d'un accident reconnu comme accident de service et ayant justifié un arrêt de travail à compter du 23 mars 2016, en raison d'une affection à l'épaule droite. Le 20 mai 2016, Mme A... a été opérée de cette épaule. Par une décision du 25 novembre 2016 n° 2016-025448, le directeur général des Hospices civils de Lyon a considéré que l'état de santé de Mme A... était consolidé au 19 mai 2016 " avec retour à l'état antérieur ". Par une seconde décision du même jour, n° 2016-025447, il l'a alors placée en congé maladie ordinaire, du 25 juin au 19 septembre 2016 et à demi-traitement. Mme A... relève appel du jugement du 20 mars 2019 du tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa demande d'annulation dirigée contre ces deux décisions du 25 novembre 2016, ainsi que contre les deux décisions implicites de rejet des deux recours gracieux qu'elle avait formés contre elles le 17 janvier 2017.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision du 25 novembre 2016 n° 2016-25447 :
2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; ". L'article L. 211-5 du même code dispose que : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
3. En plaçant Mme A... en congé maladie ordinaire, à demi-traitement pour la période postérieure au 19 mai 2016, le directeur général des Hospices civils de Lyon a implicitement refusé de lui accorder un congé de maladie pris en charge au titre de l'accident de service du 22 mars 2016. Cette décision devait ainsi être motivée en application des dispositions précitées. En se bornant à mentionner l'existence d'un " avis favorable émis par le comité médical départemental ", sans préciser ni la date de cet avis ni à quoi il était favorable, la décision litigieuse n'énonce aucune considération de fait en constituant le fondement. Mme A... est par suite fondée à en demander l'annulation, ainsi que celle du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions sur ce point.
En ce qui concerne la décision du 25 novembre 2016 n° 2016-25448 :
4. Ainsi qu'il a été dit au point 1 du présent arrêt, par la décision n° 2016-25448, le directeur général des Hospices civils de Lyon a, d'une part, fixé la date de consolidation de l'affection résultant de l'accident de service du 22 mars 2016 et, d'autre part, considéré que l'état de santé de Mme A... était revenu à son état antérieur à cette même date. En considérant que Mme A... était revenue à son état de santé antérieur à l'accident de service, le directeur général des Hospices civils de Lyon a implicitement mais nécessairement décidé que l'affection dont continuait de souffrir Mme A..., et qui justifiait son opération, n'était pas imputable au service et a refusé par là-même la prise en charge par l'administration des soins et actes médicaux nécessités par l'état de santé de Mme A... après le 19 mai 2016. Par suite, si la décision fixant la date de consolidation au 19 mai 2016 n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, la décision refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'affection à l'épaule de Mme A... à compter de cette même date devait être motivée en application des dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration.
5. En mentionnant et en s'appropriant respectivement, d'une part, le contenu de l'avis émis par la commission de réforme du 10 novembre 2016, d'autre part, le contenu des conclusions de l'avis rendu par le Dr T*** le 3 août 2016, le directeur général des Hospices civils de Lyon a indiqué avec une précision suffisante les considérations de fait constituant le fondement de la décision litigieuse. Il a également fait état des textes qui en constituent le fondement juridique. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision litigieuse doit dès lors être écarté.
6. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. ". Le droit, prévu par ces dispositions, pour le fonctionnaire de conserver l'intégralité de son traitement et de bénéficier la prise en charge de ses arrêts de maladie et de ses frais médicaux pendant ses congés de maladie est soumis à la condition que la maladie le mettant dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions.
7. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport établi le 3 août 2016 par le Dr T*** ainsi que des indications données par le Dr S*** dans son courriel du 22 février 2019, que si l'accident de service dont a été victime Mme A... le 22 mars 2016 en soulevant une charge, a été à l'origine d'une affection à l'épaule droite, à la coiffe des rotateurs, en lien avec une rupture du sus épineux, elle présentait un état antérieur de type anatomique. Il n'est pas contesté d'une part, que Mme A... souffrait d'une tendinopathie à cette épaule depuis 2012. D'autre part, cet état antérieur a été révélé à la fois par les résultats de l'imagerie par résonnance magnétique réalisée le 12 avril 2016 montrant cette rupture du sus épineux avec involution graisseuse inférieure à 50 % qui signe, selon les indications non contestées du Dr S*** une rupture déjà ancienne. Il résulte également, tant de la radiographie réalisée le 20 avril 2016, que du compte rendu de l'opération chirurgicale réalisée sur Mme A... le 20 mai 2016, que celle-ci présentait un acromion de type 3 (ou " bec acromial ") bien connu, selon les mêmes indications non contestées du Dr S***, pour être un facteur de risque notable de rupture de coiffe. Mme A... ne présente aucun élément médical de nature à contredire l'existence de son état antérieur et à établir que les effets de l'accident de service justifiaient, même de façon non exclusive, des soins, dont, notamment, l'opération chirurgicale, et les arrêts de travail postérieurement au 19 mai 2016. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que les Hospices civils de Lyon ont entaché d'une erreur d'appréciation et d'une erreur de droit la décision par laquelle ils ont constaté le retour à l'état antérieur, et donc l'absence d'imputabilité au service de son affection, pour la période postérieure au 19 mai 2016.
8. Le tribunal administratif de Lyon a, à bon droit, relevé que la fixation de la date de consolidation de l'état de santé a pour objet non de se prononcer sur le lien entre la pathologie et le service, mais de déterminer la date à partir de laquelle les séquelles d'un accident ou d'une maladie ne sont plus susceptibles d'évoluer alors même qu'elles nécessiteraient encore des soins. Il s'ensuit, comme cela a également été jugé à bon droit par les premiers juges, que la fixation de la date de consolidation est par elle-même sans influence sur le droit à la prise en charge de l'affection. Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, Mme A... ne peut utilement se prévaloir d'une erreur, au demeurant non établie, sur la fixation de cette date de consolidation, pour demander l'annulation du refus de prise en charge de son opération chirurgicale et de ses suites, lesquelles comme il a été dit au point précédent, découlent d'une affection liée à un état antérieur à son accident.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué, du tribunal administratif de Lyon qu'en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 25 novembre 2016 n° 2016-25447.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Le code de justice administrative dispose à son article L. 911-1 que : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " et à son article L. 911-2 que : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. / La juridiction peut également prescrire d'office l'intervention de cette nouvelle décision. ".
11. Il résulte de ce qui précède que l'annulation de la décision du 25 novembre 2016 n° 2016-25447 implique seulement que le directeur général des Hospices civils de Lyon réexamine la situation de Mme A... en ce qui concerne son congé de maladie et reprenne une décision.
12. Les conclusions de Mme A... tendant à ce qu'il soit enjoint aux Hospices civils de Lyon de reconnaître l'imputabilité au service de son état de santé au-delà du 19 mai 2016 et de lui accorder le bénéfice des dispositions du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 doivent par suite être rejetées.
13. Il y a lieu de prescrire la mesure de réexamen et de prise de décision susmentionnée dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :
14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La décision n° 2016-025447 du directeur général des Hospices civils de Lyon plaçant Mme A... en congé de maladie ordinaire, du 25 juin au 19 septembre 2016 et à demi-traitement, est annulée.
Article 2 : Le jugement n° 1703438 du tribunal administratif de Lyon du 20 mars 2019 est annulé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.
Article 3 : Il est enjoint aux Hospices civils de Lyon de réexaminer les droits à congé maladie de Mme A... et de prendre une nouvelle décision dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et aux Hospices civils de Lyon.
Délibéré après l'audience du 15 juin 2021 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Pierre Thierry, premier conseiller,
Mme B... E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2021.
No 19LY019044