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29/06/2021 | FRANCE | N°20LY02599

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 29 juin 2021, 20LY02599


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme R... C... et autres ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés des 18 octobre 2018 et 11 février 2020 par lesquels le maire de Chambéry a délivré à la SNC COGEDIM Savoies Léman un permis de construire un immeuble d'habitation de 48 logements locatifs sociaux et un permis de construire modificatif, ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1902571 du 7 juillet 2020, le tribunal administratif de Grenoble a fait droi

t à cette demande.

Procédure devant la cour

I- Par une requête, enregistrée le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme R... C... et autres ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés des 18 octobre 2018 et 11 février 2020 par lesquels le maire de Chambéry a délivré à la SNC COGEDIM Savoies Léman un permis de construire un immeuble d'habitation de 48 logements locatifs sociaux et un permis de construire modificatif, ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1902571 du 7 juillet 2020, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour

I- Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2020 sous le n° 20LY02599, et un mémoire en réplique, enregistré le 22 avril 2021, lequel n'a pas été communiqué, la SNC COGEDIM Savoies Léman, représentée par la SELAS LEGA-CITE, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 juillet 2020 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par Mme C... et autres devant ce tribunal ;

3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge solidaire des demandeurs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le projet, situé à moins de 500 mètres d'une gare, pouvait bénéficier de la dérogation prévue par l'article L. 151-35 du code de l'urbanisme contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges ;

- le nombre d'arceaux exigés par l'article U 12 du règlement du PLU est respecté compte tenu de la surface de vente du local établissement recevant du public de 150 m² ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu que le projet nécessitait la délivrance préalable d'un permis d'aménager, dès lors que les parcelles concernées, qui sont séparées par la voie constituée par le Faubourg Nézin, forment plusieurs unités foncières distinctes ;

- c'est également à tort que le tribunal a retenu que le projet constituait un ensemble immobilier unique devant faire l'objet d'un seul permis de construire ;

- à titre subsidiaire, l'ensemble des illégalités relevées par le tribunal peuvent être régularisées ; l'annulation totale du permis de construire était injustifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2021, Mme E... M... et autres, représentés par Me I..., concluent au rejet de la requête et demandent qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la SNC COGEDIM Savoies Léman en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils justifient de leur intérêt pour agir ;

- eu égard au lien fonctionnel existant entre les deux bâtiments au regard des règles d'urbanisme, un permis unique portant à la fois sur le bâtiment A et sur le bâtiment B devait être déposé comme l'a retenu le tribunal ; une instruction commune ne saurait pallier le fait que le permis de construire ne garantit pas le respect de l'article UAC 12 ; en tout état de cause, le permis de construire modificatif est irrégulier en ce qu'il supprime le local-vélo affecté au bâtiment B, local nécessaire à sa régularité ;

- le local d'activité a une surface de vente de 220 m² nécessitant ainsi quatre arceaux à proximité de l'entrée du local ; le permis de construire modificatif ne régularise ainsi pas le permis de construire initial quant à la violation de l'article U 12 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ;

- le projet n'est pas situé à moins de 500 mètres de l'entrée de la gare, de sorte qu'il ne saurait bénéficier de la dérogation prévue à l'article 12 des dispositions générales du règlement du PLU reprenant celles des articles L. 151-34 et L. 151-35 du code de l'urbanisme ; en conséquence, le projet doit prévoir 48 places de stationnement affectées aux logements et 5 affectées aux commerces ;

- la division des ilots 1 et 2 en 4 lots A, B, C et D destinés à recevoir plusieurs bâtiments devait faire l'objet d'un permis d'aménager, dès lors que le projet prévoit une voie commune à plusieurs lots et plusieurs équipements communs ;

- le dossier de permis de construire est incomplet faute d'étude d'impact ou de décision de l'autorité environnementale dispensant le projet d'évaluation environnementale en méconnaissance de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ; la décision de l'autorité environnementale produite dans le cadre du permis de construire modificatif a été rendue sur la base d'un projet différent ; le plan de masse n'indique pas les modalités de raccordement aux réseaux publics en méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme ; le dossier ne comprend pas d'autorisation du gestionnaire du domaine public en méconnaissance de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme ;

- il n'est avancé aucune impossibilité technique de réaliser les places de stationnement sur le terrain d'assiette, qui doit être appréciée à l'échelle du lotissement, ou dans l'environnement immédiat pour justifier l'application de l'alinéa 2 de l'article L. 151-33 du code de l'urbanisme ; la promesse ne saurait être regardée comme une concession à long terme ; seules les concessions dans les parcs publics sont autorisées ; le permis de construire afférent à la réalisation du parking Ravet n'est pas définitif puisqu'il fait l'objet d'un recours ; il est excipé de l'illégalité de ce permis de construire ;

- le projet méconnaît l'article U4 du règlement du PLU puisqu'il n'est pas prévu de raccordement du bâtiment A au réseau d'eau potable ; le projet ne prévoit aucun dispositif d'infiltration des eaux pluviales ; leur rejet dans le réseau unitaire n'est autorisé que s'il est inévitable ; la capacité de rejet dans le réseau unitaire a déjà été épuisée par les précédentes autorisations d'urbanisme du lotissement ;

- le projet méconnaît l'article U 11 du règlement du PLU s'agissant des aires de stockage des conteneurs de collecte des déchets ménagers puisqu'il est prévu un équipement commun aux bâtiments C et D qui ne font pas l'objet du permis de construire attaqué ;

- la prescription contenue dans le permis de construire prévoyant que des échantillons de matériaux doivent être présentés sur site à l'architecte des bâtiments de France est illégale ;

- le projet porte atteinte aux lieux avoisinants en méconnaissance des articles UAC 1 du règlement du PLU et R. 111-27 du code de l'urbanisme ;

- le projet porte atteinte à la sécurité publique et procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- le permis de construire modificatif est entaché de fraude.

La clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 22 avril 2021, par une ordonnance du 1er avril 2021.

Par un courrier du 25 mai 2021, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible de retenir les moyens tirés de la méconnaissance des articles U 4, U 12, UAC 1 du règlement du plan local d'urbanisme et R. 111-27 du code de l'urbanisme, et de faire application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Mme E... M... et autres, représentés par Me I..., ont présenté un mémoire en observations, enregistré le 2 juin 2021.

Ils font valoir que la légalité d'une mesure de régularisation portant atteinte à la conception générale du projet devrait être examinée en tant que telle, et au regard du classement en zone UE A du règlement du PLUi.

II- Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2020 sous le n° 20LY02610, un mémoire complémentaire enregistré le 26 mars 2021 et un mémoire en réplique, enregistré le 22 avril 2021, lequel n'a pas été communiqué, la commune de Chambéry, représentée par la SELAS Adamas Affaires publiques, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 juillet 2020 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par Mme C... et autres devant ce tribunal ;

3°) de mettre une somme de 4 000 euros à la charge solidaire des demandeurs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le projet, situé à moins de 500 mètres d'une gare, pouvait bénéficier de la dérogation prévue par l'article L. 151-35 du code de l'urbanisme contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu la surface commerciale totale autorisée pour calculer le nombre d'arceaux exigés par l'article U 12, qui vise la surface de vente ; elle est de 150 m², de sorte que 3 arceaux seulement étaient nécessaires ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu que le projet nécessitait la délivrance préalable d'un permis d'aménager, dès lors que les parcelles concernées sont séparées par le Faubourg Nézin, qui constitue une voie publique et sépare le lot A des autres lots qui ont pu faire l'objet d'une déclaration préalable ; les places de stationnement relatives à l'espace commercial ne sont pas des équipements communs au bâtiment B ;

- c'est également à tort que le tribunal a retenu que le projet constituait un ensemble immobilier unique devant faire l'objet d'un seul permis de construire ; les deux immeubles sont situés sur deux terrains non contigus puisque séparés par une voie appartenant au domaine public ; ils sont indépendants physiquement et fonctionnellement ; les permis de construire ont été instruits de manière concomitante par la commune ;

- l'ensemble des illégalités relevées par le tribunal est susceptible de régularisation ; l'annulation totale du permis de construire était injustifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2021, Mme E... M... et autres, représentés par Me I..., et un mémoire enregistré le 22 avril 2021 lequel n'a pas été communiqué, concluent au rejet de la requête et demandent qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de Chambéry en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir les mêmes moyens que dans l'instance n° 20LY02599.

La clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 22 avril 2021, par une ordonnance du 1er avril 2021.

Par un courrier du 25 mai 2021, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible de retenir les moyens tirés de la méconnaissance des articles U 4, U 12, UAC 1 du règlement du plan local d'urbanisme et R. 111-27 du code de l'urbanisme, et de faire application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Mme E... M... et autres, représentés par Me I..., ont présenté un mémoire en observations, enregistré le 2 juin 2021.

Ils font valoir que la légalité d'une mesure de régularisation portant atteinte à la conception générale du projet devrait être examinée en tant que telle, et au regard du classement en zone UE A du règlement du PLUi.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme P... O..., première conseillère ;

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;

- les observations de Me H... pour la SNC COGEDIM Savoies Léman, celles de Me T..., substituant Me F..., pour la commune de Chambéry, ainsi que celles de Me I... pour Mme M... et autres ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 18 octobre 2018 le maire de Chambéry a délivré à la société COGEDIM Savoies Léman un permis de construire pour la réalisation d'un immeuble d'habitation de 48 logements locatifs sociaux. Par un arrêté du 11 février 2020, ce maire a délivré à la même société un permis de construire modificatif en vue de diminuer la profondeur des balcons sur le Faubourg Nézin et d'ajouter trois arceaux pour le stationnement des deux roues. Par un jugement du 7 juillet 2020, le tribunal administratif de Grenoble, sur demande de Mme R... C... et autres, a annulé ces permis de construire ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux. La société COGEDIM Savoies Léman et la commune de Chambéry relèvent appel de ce jugement.

2. Les deux requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé des moyens d'annulation retenus par les premiers juges :

En ce qui concerne la nécessité de déposer un permis d'aménager :

3. Aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme: " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique (...). ". Au nombre des dispositions, dont l'autorité qui délivre le permis de construire doit en vertu de ce texte assurer le respect, figurent celles qui concernent les lotissements. Il suit de là qu'un permis de construire ne peut être légalement délivré pour une construction à édifier sur un terrain compris dans un lotissement non autorisé ou autorisé dans des conditions irrégulières.

4. Aux termes de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme : " Constitue un lotissement la division en propriété ou en jouissance d'une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis. ". Aux termes de l'article R. 421-19 du même code : " Doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager : a) Les lotissements : -qui prévoient la création ou l'aménagement de voies, d'espaces ou d'équipements communs à plusieurs lots destinés à être bâtis et propres au lotissement. Les équipements pris en compte sont les équipements dont la réalisation est à la charge du lotisseur (...) ".

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 8 novembre 2016, le maire de Chambéry a accordé une déclaration préalable de division pour la création d'un lotissement de deux lots, un lot 1 d'une superficie de 1 977 m², et un lot 2 d'une superficie de 6 530 m². Le permis de construire en litige autorise la construction d'un bâtiment A de 48 logements locatifs sociaux en R+ 10 sur ce lot n° 1, sur lequel est également prévue la construction, de l'autre côté du Faubourg Nezin, d'un bâtiment B de logements collectifs en R+ 7 de 62 logements, et qui a fait l'objet d'un permis de construire accordé le 6 août 2018, devenu définitif. Il ressort également des pièces du dossier que sur le second lot, a été autorisée la construction de deux bâtiments C et de deux bâtiments D par un permis de construire du 20 février 2017. C'est à tort que le jugement attaqué a retenu, sans tenir compte de cette déclaration préalable de division, dont la légalité n'est pas discutée par les parties, que les lots A, B, C et D constitueraient une vaste unité foncière d'un seul tenant. En outre, les parcelles concernées, qui sont séparées par le Faubourg Nézin qui constitue une voie publique, forment plusieurs unités foncières distinctes.

6. D'autre part, la circonstance que le bâtiment A aura la jouissance des places de stationnement nécessaires à l'espace commercial dans le bâtiment B ne suffit pas à caractériser un espace commun au sens des dispositions précitées de l'article R. 421-19 du code de l'urbanisme. Il en est de même des circonstances que le local vélo du bâtiment B, au demeurant supprimé par le permis de construire modificatif, se situait initialement en sous-sol du bâtiment A et qu'un bassin de rétention des eaux pluviales situé sur le terrain d'assiette des bâtiments C et D est destiné à recevoir les eaux pluviales des bâtiments A et B. L'accès au bâtiment B résulte d'une servitude de passage sur le terrain d'assiette des bâtiments C et D qui ne constitue donc pas une voie commune à plusieurs lots, contrairement à ce que soutiennent les intimés. Il ne ressort pas des pièces du dossier que des équipements à la charge du lotisseur seraient communs aux différents lots, en particulier en ce qui concerne les réseaux. Enfin, si le permis de construire initial envisageait l'utilisation des conteneurs de déchets des bâtiments C et D, le permis de construire modificatif a prévu l'aménagement d'un local sur le terrain d'assiette du projet, de sorte que les intimés ne sont pas fondés à invoquer un équipement commun à ce titre.

7. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le jugement attaqué a retenu que le maire de Chambéry ne pouvait légalement délivrer les permis de construire en litige sans délivrance préalable d'un permis d'aménager.

En ce qui concerne la nécessité de déposer un permis unique portant à la fois sur le bâtiment A et sur le bâtiment B :

8. Si une construction constituée de plusieurs éléments formant, en raison des liens physiques ou fonctionnels entre eux, un ensemble immobilier unique, doit en principe faire l'objet d'un seul permis de construire, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que, lorsque l'ampleur et la complexité du projet le justifient, notamment en cas d'intervention de plusieurs maîtres d'ouvrage, les éléments de la construction ayant une vocation fonctionnelle autonome puissent faire l'objet de permis distincts, sous réserve que l'autorité administrative ait vérifié, par une appréciation globale, que le respect des règles et la protection des intérêts généraux que garantirait un permis unique sont assurés par l'ensemble des permis délivrés.

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 que les bâtiments A et B présentent entre eux des liens fonctionnels pour l'application des règles d'urbanisme, en particulier celle relative au stationnement. Toutefois, l'ampleur et la complexité du projet permettait en l'espèce la délivrance de permis de construire distincts, dont les plans et les notices présentaient l'ensemble des aménagements de ces deux bâtiments simultanément. Dans ces conditions, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il ne ressort pas des pièces du dossier que, du fait du dépôt de deux demandes, le maire de Chambéry et les services consultés n'auraient pas été en mesure de porter une appréciation globale sur le respect des règles et la protection des intérêts généraux dont ils ont la charge.

En ce qui concerne la violation de l'article U 12 du règlement du plan local d'urbanisme :

S'agissant de l'insuffisance de places de stationnement pour les logements du bâtiment A :

10. Aux termes de l'article UAC 12 du règlement du PLU : " Afin d'assurer en dehors des voies publiques et de desserte, le stationnement des véhicules automobiles correspondant aux besoins des constructions, il est exigé : Pour les constructions à usage d'habitation : Une place de stationnement par studio et un minimum de 1,3 place par logement de plus d'une pièce. Un minimum de 50 % de l'ensemble des places de stationnement doit être couvert. Pour les constructions à usage de commerces : Une place de stationnement pour 40 m² de surface de plancher ". Aux termes de l'article 12 des dispositions générales du PLU, reprenant les principes fixés par l'article L. 151-35 du code de l'urbanisme : " Il ne peut être exigé la réalisation de plus d'une aire de stationnement par logement lors de la construction de logements locatifs financés avec un prêt aidé par l'Etat (....) si ces derniers sont situés à moins de cinq cents mètres d'une gare ou d'une station de transport public guidé ou de transport collectif en site propre et que la qualité de la desserte le permet, ne nombre d'aires de stationnement exigible par logement ne peut dépasser 0,5, nonobstant toute disposition du plan local d'urbanisme (...) ".

11. Il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit, d'une part, que les places de stationnement nécessaires au local d'activité seront réalisées dans le bâtiment B, d'autre part, que les 48 logements locatifs financés par un prêt aidé de l'Etat nécessitent la réalisation de 24 places de stationnement, soit 0,5 par logement, lesquelles se situeront dans le parc de stationnement Ravet.

12. En l'absence de dispositions législatives ou réglementaires applicables au calcul de la distance de 500 mètres précédemment mentionnée, elle doit s'entendre comme la distance en ligne droite, et non par un trajet à pied comme le prétendent les intimés, séparant le projet immobilier, et non le parc de stationnement Ravet comme l'ont retenu les premiers juges, de la gare ou station de transport en question.

13. La commune justifie en appel sans être sérieusement contestée que le projet se situe à moins de 500 mètres de l'entrée de la gare. Les intimés qui ne peuvent utilement invoquer à cet égard les conditions générales de circulation dans le secteur et la difficulté d'y stationner, n'établissent pas que la qualité de la desserte de cette gare ne permettrait pas l'application des dispositions de l'article L. 151-35 du code de l'urbanisme. Ces dispositions, reprises par l'article 12 des dispositions générales du PLU ainsi qu'il a été dit, fixent seulement des normes de stationnement sans constituer une règle d'exception qui devrait être spécialement motivée comme le prétendent les intimés.

14. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le jugement attaqué a retenu la méconnaissance des dispositions de l'article UAC 12 du règlement du PLU prévoyant pour les logements une place de stationnement par studio et un minimum de 1,3 place par logement de plus d'une pièce, lesquelles ne pouvaient être opposées au projet.

S'agissant de l'insuffisance du nombre d'arceaux pour les deux roues :

15. Aux termes des dispositions relatives aux deux-roues non motorisés de l'article UAC1 12 du règlement du PLU : " Les constructions à destination (...) de commerce (...) devront disposer de places (arceaux) destinées aux visiteurs, aux clients et au public (...) Commerce : 1 arceau pour 50 m² de surface de vente à proximité de l'entrée. L'exigence réglementaire est plafonnée à 20 arceaux ".

16. Si le formulaire Cerfa de demande ainsi que le plan de masse mentionnent un local de 220 m² de surface commerciale, il ressort de la notice de demande de permis de construire modificatif que le projet modifié comporte trois arceaux à proximité de l'entrée de local selon l'hypothèse d'une surface de vente de 150 m² afin de satisfaire à l'exigence du PLU. Dès lors qu'un permis de construire n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournies par le pétitionnaire, les requérantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a retenu la méconnaissance des dispositions citées au point précédent.

17. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les intimés, en première instance ou en appel.

Sur les autres moyens de Mme E... M... et autres :

En ce qui concerne l'incomplétude du dossier de demande :

S'agissant de l'absence d'étude d'impact :

18. D'une part, l'article R. 122-2 du code de l'environnement ne soumet les travaux, constructions et opérations d'aménagement à un examen au cas par cas afin de déterminer s'ils doivent donner lieu à une étude d'impact que lorsqu'ils comportent une surface de plancher fixée dans le tableau annexé, comprise entre 10 000 m² et 40 000 m².

19. D'autre part, pour l'application de ces dispositions et pour déterminer s'il y a lieu de joindre une étude d'impact au dossier de demande, peut être pris en compte le projet de construction existant sur une parcelle adjacente au terrain d'assiette du projet pour lequel le permis de construire est sollicité s'il existe entre eux des liens de nature à caractériser le fractionnement d'un projet unique. En revanche, la circonstance que plusieurs projets s'inscrivent dans le projet d'urbanisation de la zone est indifférente.

20. Il résulte de ce qui vient d'être dit que les intimés ne sauraient utilement se prévaloir de la circonstance que le projet s'inscrit dans le cadre d'une vaste opération d'aménagement pour revendiquer la prise en compte de la surface de plancher des bâtiments C et D autorisés par le permis de construire du 20 février 2017 et soutenir que le seuil de 10 000 m² serait largement dépassé. Il ressort des pièces du dossier que le projet en litige, même en prenant en compte la surface de plancher cumulée des bâtiments A et B, compte tenu des liens existant entre les deux bâtiments, reste en deçà de ce seuil. Il résulte de ce qui précède que les intimés ne sont pas fondés à soutenir que l'autorité environnementale, laquelle avait en tout état de cause déjà dispensé en 2016 le projet " Portes de Mérande " d'une étude d'impact dans le cadre d'un examen au cas par cas, aurait dû être saisie à nouveau préalablement à la délivrance du permis de construire en litige.

S'agissant du plan de masse :

21. Les insuffisances du plan de masse du permis initial ayant été régularisées par le permis modificatif, lequel comporte un plan de principe des réseaux, Mme E... M... et autres ne peuvent plus utilement soutenir que le permis de construire du 18 octobre 2018 n'indique pas les modalités de raccordement aux réseaux en méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme.

S'agissant de l'absence d'autorisation du gestionnaire du domaine public :

22. D'une part, le permis de construire modificatif comporte l'autorisation du gestionnaire du domaine public pour la régularisation de servitudes relatives aux dépassés de toitures et de balcons surplombant la voie publique et la création d'un escalier sur le domaine public.

23. D'autre part, par une délibération du 20 septembre 2018, le conseil municipal a décidé, après enquête publique, le déclassement du domaine public de l'espace vert et de la liaison piétonne situés avenue du Docteur Desfrançois-Faubourg Nézin. Cette décision de déclassement portant par elle-même désaffectation, les intimés ne peuvent utilement se borner à soutenir que cet espace vert n'avait pas cessé d'être affecté à l'usage du public.

En ce qui concerne la violation de l'article U4 du règlement du plan local d'urbanisme :

S'agissant de l'absence de raccordement au réseau d'eau potable :

24. Il résulte du plan principe des réseaux produit à l'appui du permis de construire modificatif que le moyen selon lequel le bâtiment A ne serait pas raccordé au réseau d'eau potable manque en fait.

S'agissant des eaux pluviales :

25. L'article U 4 du règlement du PLU pose le principe de l'infiltration ou la rétention sur l'unité foncière et précise que " dans le cas d'un rejet inévitable au collecteur unitaire public, un dispositif d'écrêtement avec une limitation du débit de rejet sera demandé (10 l/s/ha) ".

26. Il ressort des pièces du dossier que le projet vient se raccorder sur le branchement en attente du bâtiment B, dont le permis de construire accordé le 6 août 2018 autorise déjà un débit de sortie de 10 litres par seconde. Compte tenu de la superficie de 1 977 m² du lot 1, qui doit supporter les bâtiments A et B ainsi qu'il a été dit au point 5, la capacité de rejet dans le réseau unitaire est déjà épuisée par ce seul permis de construire comme le soutiennent les intimés. Le dossier de permis de construire modificatif, qui fait état d'un débit de sortie de 8,1 litres par seconde, sans qu'une telle mention ne résulte d'une erreur matérielle comme le prétendent les requérantes, aggrave la méconnaissance par le permis de construire initial des dispositions citées au point précédent. La société COGEDIM Savoies Léman et la commune de Chambéry ne peuvent, à cet égard, utilement revendiquer le bénéfice de l'avis favorable du service des eaux de D... Chambéry Agglomération et des prescriptions qu'il contient, reprises dans le permis de construire en litige, et qui ne sont pas conformes au PLU.

En ce qui concerne la violation de l'article U 11 du règlement du plan local d'urbanisme :

27. Ainsi qu'il a été dit au point 6, les intimés ne sont pas fondés à soutenir que le projet comporterait un équipement commun pour la collecte des déchets ménagers, dès lors que le permis de construire modificatif prévoit sur le terrain d'assiette du projet un local spécifique à ce titre, qui satisfait à l'exigence du règlement du PLU de prévoir pour les logements collectifs des aires de stockage pour les conteneurs. Il n'est pas établi que le Faubourg Nézin, s'il est prévu qu'il soit réservé aux piétons, ne serait pas accessible ponctuellement aux véhicules, en particulier ceux d'enlèvement des ordures ménagères.

En ce qui concerne la violation de l'article U 12 du règlement du plan local d'urbanisme :

S'agissant de l'impossibilité de réaliser les places de stationnement sur le terrain d'assiette :

28. Aux termes du 1. de l'article U 12 des dispositions communes aux zones urbaines du règlement du PLU : " Lorsque le pétitionnaire ne peut satisfaire lui-même aux obligations imposées en matière de réalisation d'aires de stationnement, il peut être tenu quitte de ses obligations pour les places qu'il ne peut réaliser lui-même sur le terrain d'assiette ou dans son environnement immédiat, soit en justifiant de l'obtention d'une concession à long terme dans un parc public de stationnement existant ou en cours de réalisation, soit en justifiant de l'acquisition de places dans un parc privé de stationnement existant ou en cours de réalisation. / Lorsqu'une aire de stationnement a été prise en compte dans le cadre d'une concession à long terme ou d'un parc privé de stationnement, au titre des obligations visées à l'alinéa précédent, elle ne peut plus être prise en compte, en tout ou en partie, à l'occasion d'une nouvelle autorisation ".

29. D'une part, il résulte des dispositions précitées, qui reprennent celles de l'article L. 151-33 du code de l'urbanisme, anciennement L. 123-1-12 du code de l'urbanisme, qu'un constructeur ne peut être admis à se soustraire aux obligations imposées par le PLU en matière de réalisation d'aires de stationnement en obtenant une concession à long terme dans un parc de stationnement que lorsqu'existe une impossibilité technique de réaliser les aires de stationnement correspondant aux prescriptions du PLU. Dans ces conditions, la circonstance que le futur Parking Ravet se trouve dans l'environnement immédiat du projet ne dispense pas, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le pétitionnaire, qui n'est pas en mesure de satisfaire lui-même aux obligations imposées par le PLU, de justifier d'une impossibilité technique de réaliser les places de stationnement sur le terrain d'assiette du projet. Il ressort d'ailleurs des pièces du dossier que le permis de construire modificatif a eu notamment pour objet d'apporter une telle justification.

30. La notice du dossier de permis de construire modificatif précise qu'une " canalisation existante d'eau usées de diamètre 500 qui sera rénovée sans déplacement par les services publics traverse la parcelle et coupe en deux parties le niveau sous le rez-de-chausée, rendant impossible le fonctionnement d'un parc de stationnement " et fait état de " la présence de rochers sur environ 40% de la surface de ce niveau coté boulevard et avenue rend techniquement impossible de creuser cette zone, sachant que la proximité de la voie ferrée limite les travaux qui présenteraient un risque de stabilité ". Le dossier de permis de construire modificatif comporte une attestation du maître d'oeuvre confirmant la présence de rocher à fleur du terrain, obligeant à utiliser un brise roche hydraulique puissant, ce qui n'est pas autorisé par la SNCF au vu de la proximité des voies. Toutefois, en se prévalant de l'impossibilité de réaliser un sous-sol sous le bâtiment A en raison de la nature du sol sur une partie seulement du terrain d'assiette du projet, la société pétitionnaire n'établit pas une impossibilité technique de réaliser les places de stationnement requises en surface sur le terrain d'assiette ou dans son environnement immédiat.

En ce qui concerne la légalité de la prescription de l'arrêté de permis de construire :

31. Le permis de construire en litige renvoie au respect des prescriptions de l'architecte des bâtiments de France et précise que " des échantillons des matériaux seront à présenter à l'architecte des bâtiments de France notamment enduits/matériaux garde-corps ". Cette prescription est suffisamment précise et porte sur une modification mineure du projet. Elle n'est dès lors pas illégale.

En ce qui concerne l'atteinte à la sécurité publique :

32. Les intimés ne peuvent utilement invoquer les conditions générales de circulation sur le secteur pour contester la légalité du permis de construire en litige et soutenir qu'il procéderait d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne l'atteinte aux lieux avoisinants :

33. Parmi les occupations et utilisations du sol interdites en vertu de l'article UAC 1 du règlement du PLU, figurent " les constructions qui par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, ne respectent pas le caractère de la zone tel que défini ci-dessus ou sont de nature à porter atteinte soit au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales, soit à la salubrité ou à la sécurité publique ".

34. Il ressort des pièces du dossier que l'environnement immédiat du projet comprend d'autres immeubles de grande hauteur et présente, malgré quelques éléments remarquables, dont l'immeuble des requérants labélisé patrimoine du 20ème siècle, des caractéristiques architecturales disparates. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet, qui a reçu l'avis favorable de l'architecte des bâtiments de France, procéderait du seul fait de la hauteur de l'immeuble projeté en R+ 10 ou de son architecture, d'une inexacte application des dispositions citées au point précédent, qui posent des exigences qui ne sont pas moindres que celles de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne la fraude entachant le permis de construire modificatif :

35. S'il prévoit la suppression du local-vélo affecté au bâtiment B, le permis de construire modificatif ne revêt pas un caractère frauduleux dès lors qu'il ressort de la notice de demande de ce permis que ce local initialement prévu dans le bâtiment A et transformé en caves sera aménagé dans le bâtiment B.

Sur l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

36. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire (...) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer (...) jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation (...) ".

37. Les vices relevés aux points 26 et 30 sont susceptibles d'être régularisés. Par suite, il y a lieu, de surseoir à statuer et de fixer à la SNC COGEDIM Savoies Léman un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt aux fins de justifier d'une mesure de régularisation du permis de construire en litige.

38. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Chambéry et la SNC COGEDIM Savoies Léman sont seulement fondées à demander qu'il soit fait application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour permettre la régularisation des vices entachant le permis de construire du 18 octobre 2018.

D E C I D E :

Article 1er : En application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, il est sursis à statuer sur les requêtes de la commune de Chambéry et de la SNC COGEDIM Savoies Léman jusqu'à l'expiration du délai de six mois fixé au point 37.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC COGEDIM Savoies Léman, à la commune de Chambéry, à M. L... G..., en sa qualité de représentant unique des intimés, et à M. A... Q..., M. S... B..., Mme J... N... et M. K... D....

Délibéré après l'audience du 8 juin 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme P... O..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2021.

2

N° 20LY02599 - 20LY02610


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02599
Date de la décision : 29/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : LEGA-CITE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-29;20ly02599 ?
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