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24/06/2021 | FRANCE | N°21LY00311

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 24 juin 2021, 21LY00311


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2020 par lequel le préfet de l'Ain a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Ain à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, portant la mention

" vie privée et familiale " ou " salarié ", dans le délai de trente jours à compter de la no...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2020 par lequel le préfet de l'Ain a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Ain à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", dans le délai de trente jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de deux jours à compter de la notification du jugement à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2005349 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 28 janvier 2021, M. E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susmentionné du 31 décembre 2020 du tribunal administratif de Lyon et les décisions précitées du 6 juillet 2020 du préfet de l'Ain ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Ain, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de deux jours à compter de ce même arrêt, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de deux jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa situation n'a pas été précédée d'un examen réel et sérieux par le préfet et le tribunal dès lors qu'il a justifié de la réalité de son parcours professionnel en France et donc d'une expérience professionnelle ancrée dans la durée, de la nécessité de son employeur de l'embaucher au regard des difficultés de recrutement liées aux particularités du métier de bûcheron, d'une formation spécifique pour exercer son emploi, et d'une intégration personnelle en sa qualité de sapeur-pompier volontaire depuis le 18 août 2020 ;

- les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues et une erreur manifeste d'appréciation de sa situation a été commise eu égard aux difficultés de recrutement liées aux contraintes très spécifiques du poste occupé, qui exige une formation spécifique, une capacité physique et une motivation déterminante, ce dont il justifie ;

- les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues et une erreur manifeste d'appréciation de sa situation a été commise eu égard à sa durée de présence et à son intégration en France ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à sa durée de présence et à son intégration professionnelle et sociale en France et au fait qu'il ne représente aucune menace pour l'ordre public, alors même qu'il s'est soustrait à une mesure d'éloignement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2021, le préfet de l'Ain conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... ;

- les observations de Me D..., représentant M. E....

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant brésilien né le 18 octobre 1985, entré en France en octobre 2013 selon ses déclarations, a, par courrier du 25 février 2020 de son conseil, sollicité la délivrance, à titre principal, d'un titre de séjour en qualité de salarié en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à titre subsidiaire, d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des articles L. 313-11, 7° et L. 313-14 du même code. Par un arrêté en date du 6 juillet 2020, dont il a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer l'annulation, le préfet de l'Ain a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par un jugement n° 2005349 du 31 décembre 2020, dont l'intéressé relève appel, ce tribunal a rejeté sa demande.

2. M. E... est entré en France en octobre 2013 à l'âge de 28 ans. Il s'est engagé dans un régiment de la Légion Etrangère basé à Carcassonne et y a servi de 2013 à 2016. Les attestations produites au dossier, qui soulignent notamment ses qualités humaines, son comportement exemplaire, les liens d'amitié qu'il a noués en France, et l'encadrement sportif qu'il effectue auprès d'enfants témoignent de sa réelle intégration sociale particulière, de même que sa pratique sportive où il rencontre un succès certain en compétition. Après avoir exercé en qualité d'ouvrier au sein de l'entreprise " Carrières Lugan Serge " sous contrat à durée déterminée puis à durée indéterminée à temps partiel sur la période du 8 janvier au 22 novembre 2018, il a été engagé en dernier lieu sous contrat à durée indéterminée à temps plein à compter du 27 janvier 2020 en qualité d'aide bucheron au sein de la Sarl Jerifo. Cet employeur, qui souligne sa difficulté à recruter des candidats nationaux ayant les compétences et qualités nécessaires, en particulier la motivation et la capacité physique, pour effectuer des travaux forestiers (abattage, élagage et broyage d'arbres) sur l'ensemble du territoire français, atteste que l'intéressé présente les qualifications et qualités précitées nécessaires pour répondre à ses besoins et poursuivre dans l'entreprise son parcours d'intégration et de formation professionnelle. Dans ces conditions particulières de l'espèce, et alors même que le requérant, qui est célibataire et dont le fils mineur réside dans son pays d'origine, n'a pas exécuté une précédente décision d'éloignement, le préfet de l'Ain, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. E..., a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

3. La décision portant refus de séjour doit donc être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de destination, et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

5. L'annulation prononcée implique d'enjoindre au préfet de l'Ain, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative et de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, de réexaminer la situation de M. E... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour jusqu'au terme de ce réexamen.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au profit de M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2005349 du 31 décembre 2020 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : Les décisions susmentionnées du 6 juillet 2020 du préfet de l'Ain sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Ain de délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour à M. E... et de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, présidente assesseure,

M. B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 juin 2021.

2

N° 21LY00311


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00311
Date de la décision : 24/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Christophe RIVIERE
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : GILLIOEN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-24;21ly00311 ?
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