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15/06/2021 | FRANCE | N°19LY04448

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 15 juin 2021, 19LY04448


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2017 par lequel le maire de La Clusaz a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de l'édification d'un chalet.

Par un jugement n°1701394 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2019, et un mémoire en réplique enregistré le 11 janvier 2021, qui n'a pas été communiqué, M.

A... B..., représenté par la SELARL Doitrand et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2017 par lequel le maire de La Clusaz a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de l'édification d'un chalet.

Par un jugement n°1701394 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2019, et un mémoire en réplique enregistré le 11 janvier 2021, qui n'a pas été communiqué, M. A... B..., représenté par la SELARL Doitrand et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 octobre 2019 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 9 janvier 2017 ;

3°) d'enjoindre au maire de La Clusaz de lui délivrer le permis sollicité dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de La Clusaz la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier, les premiers juges n'ayant pas répondu à l'argument qu'il avait soulevé pour contester la méthode de calcul des droits à construire ;

- c'est à tort que le maire a considéré que le projet méconnaît les dispositions des articles NDr 14 et NDr 15 du règlement du plan d'occupation des sols, dès lors que les droits à construire à acquérir doivent être calculés au regard de la seule partie de parcelle A 4894, sur laquelle le chalet doit être édifié, classé en zone NDr ;

- c'est à tort que le maire a considéré que le projet méconnaît les dispositions de l'article L. 122-9 du code de l'urbanisme, dès lors que le projet ne modifie pas la perception globale du hameau des Frasses dans lequel il doit s'insérer ;

- c'est à tort que le maire a considéré que le projet méconnaît les dispositions de l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme, dès lors que la parcelle n'est affectée à aucun usage agricole et se trouve à proximité de plusieurs habitations ;

- le refus porte une atteinte disproportionnée à son droit de propriété, garanti par les articles 2 et 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi qu'aux principes de sécurité juridique et de confiance légitime.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er décembre 2020, la commune de La Clusaz, représentée par la Selas Adamas Affaires Publiques, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 11 janvier 2021, par une ordonnance en date du 2 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Christine Psilakis, rapporteure publique,

- les observations de Me F... pour M. B... et celles de Me C... pour la commune de La Clusaz ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a déposé, le 1er août 2014, une demande de permis de construire, accompagnée d'une convention de transferts de droits à construire signée le 29 avril 2011, en vue de l'édification d'un chalet d'une surface de plancher de 268 m2, sur un terrain situé au hameau des Frasses, à La Clusaz. Par arrêté du 5 novembre 2014, le maire de La Clusaz a prononcé un sursis à statuer sur la demande de permis de construire. Le 10 novembre 2016, le plan local d'urbanisme de la commune n'ayant pas été adopté pendant la durée du sursis, M. B... a réitéré sa demande. Par arrêté du 9 janvier 2017, le maire de La Clusaz a refusé de lui délivrer le permis de construire sollicité. M. B... relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. B... avait critiqué en première instance le mode de calcul retenu pour déterminer le coefficient d'occupation des sols. Les premiers juges, qui n'ont répondu qu'au moyen relatif à l'opposabilité des dispositions des articles NDr 14 et NDr 15 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de la commune, ont omis de statuer sur ce moyen et ont, ainsi, entaché leur jugement d'une irrégularité. Par suite, le jugement doit être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Grenoble.

Sur la légalité de l'arrêté du 9 janvier 2017 :

4. Pour refuser de délivrer le permis de construire sollicité, le maire de La Clusaz s'est fondé sur le fait que le projet méconnaît les articles NDr 14 et NDr 15 du règlement du plan d'occupation des sols alors applicable, ainsi que les articles L. 122-9 et L. 122-10 du code de l'urbanisme.

5. Aux termes, d'une part, de l'article NDr 14 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de La Clusaz, adopté en 1994 : " Un coefficient d'occupation du sol fixé à 0,08 est affecté aux terrains inscrits dans les secteurs NDe, NDea et NDr ; toutefois la densité des seules constructions admises dans le secteur NDr est limitée. ". Aux termes, d'autre part, de l'article NDr 15 du règlement du même plan relatif au dépassement du COS : " Le dépassement du coefficient d'occupation du sol fixé à l'article 14 est imposé dans le secteur NDr ; dans ce secteur toute opération de construction doit être précédée d'un transfert des possibilités de construction résultant du coefficient d'occupation du sol fixé à l'article précédent et provenant des terrains situés dans le secteur NDe et NDea. En outre, ce transfert doit avoir pour effet de porter le coefficient d'occupation du sol du terrain récepteur à une valeur comprise entre 0,22 et 0,30. L'obligation de transfert de COS est alors fixée à 0,14 minimum. (...) "

6. En premier lieu, la demande de permis de construire sur laquelle s'est prononcé le maire de La Clusaz pour prendre le refus en litige étant consécutive à l'expiration du délai de la décision de sursis à statuer, et non à l'annulation contentieuse de cette décision de sursis à statuer, laquelle est intervenue postérieurement à la décision en litige, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'il y avait lieu pour le maire de faire application des dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme ni, en tout état de cause, et alors que les dispositions des articles NDr 14 et NDr 15 du règlement du plan d'occupation des sols n'ont pas été modifiées pendant cette période, à demander l'annulation pour erreur de droit du refus de permis de construire.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6. / Il en est de même lorsqu'elle est assortie de prescriptions, oppose un sursis à statuer ou comporte une dérogation ou une adaptation mineure aux règles d'urbanisme applicables. ".

8. L'arrêté du 5 novembre 2014 portant sursis à statuer étant antérieur à l'entrée en vigueur de ces dispositions, issues de la loi du 6 août 2015, le moyen tiré de ce que le refus de permis de construire du 9 janvier 2017 contesté comporte de nouveaux motifs en méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.

9. En troisième lieu, le refus de permis de construire étant fondé sur les dispositions de l'article NDr 15 du règlement du POS imposant un transfert des possibilités de construction résultant du coefficient d'occupation des sols dans le secteur NDr, le requérant ne peut utilement soutenir que le refus en litige est fondé sur des dispositions du règlement du POS fixant illégalement un coefficient d'occupation des sols minimal.

10. En quatrième lieu, aux termes, d'autre part, de l'article L. 174-4 du code de l'urbanisme : " Les plans d'occupation des sols maintenus provisoirement en vigueur en application des dispositions du présent chapitre ont les mêmes effets que les plans locaux d'urbanisme ./ Ils sont soumis au régime juridique des plans locaux d'urbanisme défini par le titre V du présent livre./ Les dispositions de l'article L. 123-1 dans leur rédaction antérieure au 15 décembre 2000 leur demeurent applicables. " En vertu du 4° de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction demeurée applicable, le plan d'occupation des sols peut : " fixer pour chaque zone ou partie de zone, en fonction notamment de la capacité des équipements collectifs existants ou en cours de réalisation et de la nature des constructions à édifier, un ou des coefficients d'occupation des sols qui déterminent, éventuellement pour chaque nature de construction, la densité de construction qui est admise ". Aux termes de l'article R. 123-21 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " (...) 2° Le règlement peut (...) : (...) Fixer le ou les coefficients d'occupation des sols de chaque zone ou partie de zone et les conditions dans lesquelles ces coefficients peuvent être éventuellement dépassés en application des articles L. 123-1 et L. 332-1 (...) ". Aux termes de l'article R 123-22 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " 1. Sous réserve de ce qui est dit au 4. ci-dessous, le coefficient d'occupation du sol est le rapport exprimant le nombre de mètres carrés de plancher hors oeuvre susceptibles d'être construits par mètre carré de sol. Pour une même zone ou partie de zone, des coefficients différents peuvent être fixés suivant la nature, la destination et les modalités de l'occupation ou de l'utilisation du sol. / 2. Le coefficient d'occupation du sol s'applique à la superficie du terrain qui fait l'objet de la demande d'autorisation de construire ou de lotir, y compris, le cas échéant, aux terrains classés comme espaces boisés en application de l'article L. 130-1 et aux terrains cédés gratuitement dans les conditions fixées par les articles R. 332-15 et R. 332-16. La surface des bâtiments existants conservés sur le terrain, appréciée comme il est dit à l'article L. 111-5, est déduite des possibilités de construction. / Les emplacements réservés visés à l'article R. 123-18 (II 3) sont déduits de la superficie prise en compte pour le calcul des possibilités de construction. (...) / 3. Le coefficient d'occupation des sols appliqué à la superficie, déterminée comme il est dit ci-dessus au 2., fixe, sous réserve des autres règles du plan d'occupation des sols et des servitudes grevant l'utilisation du sol, une surface maximum de plancher hors oeuvre nette susceptible d'être édifiée qui est calculée selon les règles fixées à l'article R. 112-2 (...) "

11. Il ressort des pièces du dossier que la construction projetée s'implante sur un terrain situé en zone Ndr, secteur sur lequel les dispositions de l'article NDr 15 du règlement du plan d'occupation des sols imposent un transfert de coefficient d'occupation des sols égal à 0,14 minimum du terrain d'assiette de l'opération. M. B... soutient que le dépassement du coefficient d'occupation des sols exigé doit être calculé en tenant compte de la superficie de la seule partie de parcelle cadastrée A n° 4894 classée en zone Ndr, où doit s'implanter le projet. Toutefois, la demande de permis de construire déposée par M. B... portait sur les trois parcelles cadastrées A n°s 4893, 4894 et 4895, les espaces de stationnement étant projetés sur la parcelle 4895 et l'accès au chalet devant se faire par ailleurs par la parcelle 4894. Ainsi, et au regard des règles fixées par les dispositions citées au point précédent de l'article R. 123-22 du code de l'urbanisme applicable au projet, la commune a pu légalement déterminer les conditions de transfert de coefficient d'occupation des sols au regard de la superficie de l'ensemble du terrain faisant l'objet de la demande d'autorisation d'urbanisme, classé en zone NDr, qui forme une seule unité, d'une superficie de 2425 m2. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ce terrain comprenait un chalet existant, dont la surface de plancher à retenir, au titre des règles du coefficient d'occupation des sols, est de 69 m2, selon le dossier de demande. Dans ces conditions, et après application à ce chalet du coefficient d'occupation des sols de 0,08, le terrain d'assiette résiduel est d'une superficie de 1 562,5 m2. En appliquant à cette superficie le transfert de COS fixé à l'article NDr 15 du règlement du plan d'occupation des sols, M. B... devait ainsi justifier d'un transfert des possibilités de construction d'au moins 218,75 m2. Par suite, le maire de La Clusaz était fondé à opposer un refus à la demande de M. B..., qui avait produit une convention n'envisageant un transfert qu'à hauteur de 180,8 m2.

12. Si M. B... conteste les deux autres motifs du refus, il résulte de l'instruction que le maire de La Clusaz aurait pris la même décision en se fondant sur le seul motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article NDr 15 du règlement du plan d'occupation des sols.

13. Enfin, si M. B... fait valoir que la commune de La Clusaz lui avait délivré le 23 mai 2012 un permis de construire pour un projet identique, qu'il n'a pas mis en oeuvre et est devenu caduc, ni son droit de propriété, tel que protégé par la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni le principe de sécurité juridique ne sauraient imposer à une autorité administrative ayant illégalement fait droit à une demande de prendre une décision identique, saisie à nouveau de cette même demande. Par ailleurs, M. B... ne peut utilement se prévaloir du principe de confiance légitime, principe général de droit communautaire, dès lors que sa situation est entièrement régie par des règles de l'ordre juridique interne.

14. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du 9 janvier 2017 du maire de La Clusaz est illégal et à en demander l'annulation.

Sur les frais d'instance :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. B..., partie perdante pour l'essentiel, tendant au remboursement des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de La Clusaz au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 3 octobre 2019 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Grenoble et le surplus des conclusions des parties en appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de La Clusaz.

Délibéré après l'audience du 25 mai 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme E... D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2021.

2

N° 19LY04448


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04448
Date de la décision : 15/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-02-02-15 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Application des règles fixées par les POS ou les PLU. Règles de fond. Dépassement de coefficient d'occupation du sol.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: Mme PSILAKIS
Avocat(s) : SELARL ADALTYS (ADAMAS AFFAIRES PUBLIQUES)

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-15;19ly04448 ?
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