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18/05/2021 | FRANCE | N°19LY03094

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 18 mai 2021, 19LY03094


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 24 juillet 2018 par laquelle le ministre du travail, retirant le rejet implicite du recours hiérarchique présenté par son employeur, la société VFD, a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 16 octobre 2017 ayant refusé l'autorisation de le licencier et a autorisé son licenciement.

Par jugement n° 1806054 lu le 31 mai 2019, le tribunal a annulé la décision du ministre du travail du 24 juillet 2018.
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Par une requête et un mémoire enregistrés le 5 août et le 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 24 juillet 2018 par laquelle le ministre du travail, retirant le rejet implicite du recours hiérarchique présenté par son employeur, la société VFD, a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 16 octobre 2017 ayant refusé l'autorisation de le licencier et a autorisé son licenciement.

Par jugement n° 1806054 lu le 31 mai 2019, le tribunal a annulé la décision du ministre du travail du 24 juillet 2018.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 5 août et le 29 novembre 2019, la société VFD, représentée par Me A..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement en ce qu'il a annulé la décision ministérielle du 24 juillet 2018 et de rejeter la demande présentée au tribunal par M. D... ;

2°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable ;

- la faute commise par M. D... est d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, dès lors qu'il n'a pas respecté les procédures internes à l'entreprise sur les règles de sécurité.

Par mémoires enregistrés les 28 octobre 2019, 22 et 24 janvier 2020 (ces derniers non communiqués), M. D... représenté par Me E..., conclut dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société VFD au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

La requête a été communiquée au ministre du travail qui n'a pas produit d'observations.

Par ordonnance du 2 décembre 2019 la clôture de l'instruction a été fixée au 29 janvier 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Djebiri, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me C..., substituant Me A..., pour la société VFD, ainsi que celles de Me E... pour M. D... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D... a été recruté par la société VFD en qualité de conducteur receveur, investi des mandats de délégué du personnel titulaire, de représentant syndical au comité d'entreprise et de délégué syndical. Le 4 août 2017, l'employeur a saisi l'inspection du travail d'une demande d'autorisation de le licencier pour motif disciplinaire. Par décision du 16 octobre 2017, l'inspecteur du travail a rejeté cette demande aux motifs que les griefs n'étaient pas d'une gravité suffisante. La société VFD a formé un recours hiérarchique implicitement rejeté, le 15 avril 2018. Par décision du 24 juillet 2018, le ministre du travail, retirant ce rejet implicite, a annulé la décision de l'inspecteur du travail et a autorisé le licenciement de M. D... en inversant la qualification de la gravité de la faute. Par jugement du 31 mai 2019, dont la société VFD relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision d'autorisation de licenciement du ministre du 24 juillet 2018.

Sur le fond du litige :

2. En vertu des dispositions des articles L. 2411-1 et suivants du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions de délégué syndical, de délégué du personnel et de membre titulaire élu du comité d'entreprise bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.

3. Le 18 juillet 2017, M. D... après avoir transporté les enfants d'une colonie de vacances à l'occasion d'une sortie à la demi-journée, a au départ de ses passagers, procédé sur place au nettoyage et à l'inspection de fin de service de son véhicule, ce qui l'a amené à réveiller un enfant et à récupérer une pièce de vêtement oubliée par un passager. Puis après avoir conduit et garé son véhicule au dépôt, il a quitté le service en fin d'après-midi en y oubliant un enfant endormi, qui s'est éveillé en pleurs, et a été découvert fortuitement par un autre conducteur d'autocar, vers 18 h 55. S'il ne peut être reproché à M. D... de ne pas avoir respecté la procédure de vérification de son autocar, la matérialité du manque de vigilance est établie ainsi que son caractère fautif.

4. Toutefois, il ressort de l'ensemble de ces circonstances que le manque de vigilance qui a entaché l'inspection de fin de service n'était pas intentionnel ; et la reconnaissance des faits par M. D... démontre qu'il n'a pas perdu le sens des responsabilités exigé d'un conducteur de véhicule de transport en commun et que sa défaillance ne reflète pas sa manière habituelle de servir. Par ailleurs, M. D... qui justifie d'une ancienneté de six ans dans l'entreprise n'a fait l'objet d'aucune sanction. Ainsi, les agissements qui lui sont reprochés ne sont pas d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement et le ministre du travail n'a pu, ainsi que l'a jugé le tribunal, annulé la décision de l'inspecteur du travail sans méconnaître les articles L. 2411-1 et suivants du code du travail.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête d'appel, que la société VFD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du ministre du 24 juillet 2018. Les conclusions de sa requête, doivent, dès lors, être rejetées.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Les conclusions de la société VFD, partie perdante, doivent être rejetées. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à sa charge le versement à M. D... d'une somme de 1 500 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société VFD est rejetée.

Article 2 : La société VFD versera à M. D... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société VFD, au ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et à M. B... D....

Délibéré après l'audience du 29 avril 2021 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mai 2021.

N° 19LY03094 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03094
Date de la décision : 18/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07 Travail et emploi. Licenciements.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : SLUPOWSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-05-18;19ly03094 ?
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