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13/04/2021 | FRANCE | N°20LY02962

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 13 avril 2021, 20LY02962


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 7 mai 2020 par lequel le préfet de la Savoie a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné et lui a interdit de circuler sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2003420 du 18 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

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r une requête, enregistrée le 15 octobre 2020, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 7 mai 2020 par lequel le préfet de la Savoie a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné et lui a interdit de circuler sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2003420 du 18 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 15 octobre 2020, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 septembre 2020 ainsi que l'arrêté du 7 mai 2020 du préfet de la Savoie, en tant qu'il porte interdiction de circulation sur le territoire français pendant une durée de trois ans ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente ;

- la circonstance que le préfet de la Savoie n'ait pas indiqué au tribunal administratif de Grenoble qu'il a fait l'objet d'un placement en rétention administrative par arrêté du 13 mai 2020 entache d'irrégularité la procédure suivie par le préfet ;

- la décision lui interdisant la circulation sur le territoire français pendant trois années méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le préfet de la Savoie, à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F..., première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant roumain né le 11 janvier 1990, a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant de circuler sur le territoire français pendant une durée de trois années, par arrêté du 7 mai 2020 du préfet de la Savoie. Il a ensuite été placé en rétention administrative par arrêté du 13 mai 2020 du même préfet. Il a demandé l'annulation de l'arrêté du 7 mai 2020 uniquement en tant qu'il porte interdiction de circulation sur le territoire pendant une durée de trois ans devant le tribunal administratif de Lyon, lequel a rejeté cette demande par jugement du 18 septembre 2020. M. C... demande l'annulation de ce jugement.

2. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., ressortissant communautaire a, après sa levée d'écrou de la maison d'arrêt de Chambéry, fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai et d'une interdiction de circuler sur le territoire français d'une durée de trois ans par arrêté du 7 mai 2020 puis d'une placement en rétention administrative par arrêté du 13 mai suivant, le préfet de la Savoie s'étant fondé sur la circonstance que le comportement personnel de l'intéressé constituait, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société suivant le 3° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il ne disposait pas de garanties de représentation suffisantes pour être assigné à résidence avant son éloignement.

Sur la régularité du jugement :

3. Si le requérant fait grief au préfet de la Savoie de ne pas avoir averti le tribunal administratif de Grenoble de son placement en rétention, il ressort toutefois des pièces du dossier, que M. C... a contesté l'arrêté l'obligeant à quitter le territoire devant le tribunal administratif de Grenoble dont le président a, à la date du placement au centre de rétention de Lyon Saint Exupéry de l'intéressé, transmis le dossier au tribunal administratif de Lyon par ordonnance du 27 mai 2020 prise sur le fondement de l'article R. 776-16 du code de justice administrative. En outre le tribunal a statué sur les conclusions de M. C... en formation collégiale, comme le permet l'article R. 222-19 du code de justice administrative. Dans ces conditions, le jugement attaqué est régulier.

Sur le bien-fondé de l'interdiction de circuler sur le territoire :

4. En premier lieu l'arrêté du 7 mai 2020 a été signé par M. A... D..., qui a reçu délégation à cet effet par arrêté du préfet de la Savoie du 2 janvier 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté comme manquant en fait.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français prononcée en application des 2° et 3° de l'article L. 511-3-1 d'une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée maximale de trois ans. ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Pour critiquer la décision lui interdisant de circuler sur le territoire français pendant trois ans, M. C... fait valoir en appel que cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il fait état de la durée de son séjour en France où il réside depuis 2015 avec ses quatre enfants, dont l'un y est né, ainsi que son épouse, où il s'est établi en tant qu'entrepreneur dans le négoce d'autos et où résident ses parents, notamment son père qui y poursuit un traitement médical de long court.

7. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. C... a été incarcéré à la suite de sa condamnation par un jugement du tribunal correctionnel de Lyon du 21 septembre 2018 à une peine de trois années d'emprisonnement avec dix-huit mois de sursis simple et interdiction de détenir ou porter une arme pendant cinq ans pour des faits de proxénétisme aggravé, pluralité d'auteurs ou de complices de proxénétisme aggravé et pluralité de victimes. Eu égard à la gravité des agissements de l'intéressé, et alors même qu'il vivrait maritalement avec une ressortissante roumaine et leur quatre enfants communs en France et qu'il y travaillait avant son incarcération, la décision par laquelle le préfet de la Savoie a interdit à M. C... de circuler sur le territoire pendant une durée de trois années n'a pas porté atteinte à son droit à mener sa vie privée et familiale et n'a ainsi pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 7 mai 2020. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Daniele Déal, présidente ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme G... F..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2021.

2

N° 20LY02962


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02962
Date de la décision : 13/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : BESSON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-13;20ly02962 ?
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